vendredi 31 janvier 2014

Liz et moi

Darling zappe. Une chatte sur un toit brûlant. La merveilleuse Liz Taylor fait une scène à son crétin de mari, les poings sur les hanches, les yeux étincelants de fureur. Le Grand :
— On dirait maman quand elle est en colère !
Jamais reproche ne m'a autant flattée...

jeudi 30 janvier 2014

Mr Thing Two, extraits

Hier matin, dans la rue, Mr Thing Two regarde autour de lui, pensif, puis lance :
— Nous, on est dans le ventre du ciel !
(Vivement l'accouchement. Ou pas.)

Le même, hier soir, face à une photographie datant d'il y a presque dix ans où figure Darling, plus jeune, avec des joues un peu plus rondes, et glabre, s'exclame très spontanément :
— Oh ! Un papa moche !
(Le Grand a mis un quart d'heure à s'en remettre.)

mercredi 29 janvier 2014

Latinisera-t-il ?

Hier soir, le Grand m'apporte une feuille à signer. Ça, ce n'est rien, mais il faut d'abord que je coche une case : mon gamin fera-t-il du latin dans les trois années à venir, ou pas ?
— J'ai dit au prof principal que je n'en avais pas vraiment envie, m'explique-t-il, mais il m'a dit d'en discuter tout de même avec mes parents.
Je me gratte la tête. Et je me rappelle soudain que cet enfant a deux parents :
— Darling, tu crois que le Grand devrait faire du latin en option ?
Darling, sans la moindre hésitation :
— Non. Une matière de plus, la barbe. C'est déjà bien assez casse-pied, l'école.
Je ne m'attendais pas à ça. En fait j'aurais même parié sur un "oui !" franc et massif. Darling s'intéresse énormément à l'histoire, aux civilisations anciennes, et aussi à la linguistique, à l’étymologie... Mais quand il était petit, il détestait les cours, et n'était pas très bon en classe. Tout ce qu'il sait, il l'a appris en autodidacte. D'où sa réaction épidermique.

Bon, on va dire que sur ce coup-là, le Grand n'a qu'un seul parent, en fait. Nous dressons donc ensemble une liste de "pour" et "contre".
Contre :
- deux ou trois heures par semaine de cours supplémentaires ;
- des devoirs à la maison.
Pour :
- Une petite chance d'apprendre des choses intéressantes sur la civilisation romaine ;
- Une petite chance d'acquérir quelques notions de grammaire qui pourront être utiles dans d'autres circonstances, par exemple lors de l'apprentissage de l'allemand ;
- Une petite chance d'apprendre un peu d'étymologie, et même d'améliorer légèrement son orthographe par ce biais ;
- Une petite chance, si l'effort est poursuivi jusqu'en terminale, d'avoir quelques points en plus au bac.

Si on additionne quatre petites chances, ça fait combien de vrais chances ?

En dehors de l'argument du bac, rien de tout cela ne convainc complètement mon gamin. Et pour tout dire, je n'y crois pas trop moi-même. C'est peut-être parce que j'ai eu un très mauvais prof la première année et que je n'ai ensuite jamais vraiment rattrapé mon retard, mais je n'ai pas le sentiment d'avoir appris grand-chose en cours de latin, en fait. Après l'avoir avoué, j'essaie pourtant vaillamment d'insister :
— Mais en fait, même si je ne m'en suis pas rendu compte, peut-être que ça m'a vraiment aidé pour la grammaire et pour d'autres choses. C'est toujours une certaine gymnastique de l'esprit...
Il soupire, et demande :
— En fait, en dehors des deux points au bac dont tu n'avais pas besoin, qu'est-ce que ça t'a vraiment apporté de faire du latin pendant six ans ? Pour de bon ?
— Eh bien, j'étais sans doute dans des classes un peu meilleures que celles qui ne font pas l'option latin, pour commencer. Et puis j'ai eu des profs super sympa, dont au moins deux que j'adorais. Et je me suis fait des copines et des copains en cours ! Sans le latin, je n'aurais sans doute jamais eu l'occasion de lier conversation avec mes amis D. et K., et ma vie aurait été très différente. Ah, et puis nous avons fait des voyages ! Un à Rome, et c'était un des plus beaux voyages de ma vie. Remarque, celui en Grèce n'était pas mal non plus. Et la Sicile ! C'était absolument superbe, j'en garde un souvenir ébloui. Et à part ça, ça m'a aussi donné l'occasion de comprendre pourquoi tout le monde disait que ma grand-mère, qui était prof de latin, était une prof excellente : elle m'a aidé à réviser le bac, et nous avons passé de bons moments ensemble. Ah, et puis je me souviens aussi que les profs nous racontaient parfois des histoires vachement chouettes quand on traduisait des textes...


Vous savez quoi ? Finalement, j'ai coché "oui". Et il n'a même pas râlé.

mardi 28 janvier 2014

Mieux vaut entendre ça qu'être sourd

Je traduis un album pour les petits enfants sur le corps. Une page est consacrée aux cinq sens, parmi lesquels l'ouïe, avec cette définition :

Grâce à l'ouïe, nous percevons toutes sortes de sons. Si nous n'entendions pas les gens qui nous parlent, nous ne pourrions pas écouter ce qu'ils nous disent.

Et si ce livre n'était pas publié, il ne paraîtrait jamais ?

lundi 27 janvier 2014

Le Hobbit 2


(Attention, spoiler !)

Samedi soir, moyennant 60 euros de frais de baby-sitting (qui me reprochait de ne pas sortir très souvent, déjà ?), Darling et moi sommes allés voir Le Hobbit : la désolation de Smaug. Ah oui, c'est notre grande spécialité, aller voir un film quelques jours avant qu'il ne disparaisse complètement des salles, pour avoir très peu de choix concernant le lieu et l'heure de la séance : le choix est beaucoup plus vite fait que quand le film se joue dans quinze cinémas dans les environs, comprenez-vous.
Hum.
Précision : je n'aime pas les adaptations, mais quand Le seigneur des anneaux est sorti en film, j'ai fait une exception pour Darling, qui avait très très envie de le voir. Et j'ai beaucoup aimé les films, même si j'aurais préféré une histoire originale et non tirée d'un roman. Voir Le Hobbit dans la foulée était logique. Fin de la parenthèse.
Bref, Le Hobbit, la suite. Des orcs de plus en plus laids, des cascades de plus en plus ahurissantes (au point que j'ai entendu des rires dans la salle lors de certaines bagarres, et je pouffais moi-même), un Légolas de soixante ans de moins qui en fait dix de plus, des araignées géantes que je n'ai absolument pas pu regarder (j'ai fermé les yeux pendant cinq minutes, j'avais la nausée dès que j'entrouvrais une paupière, Darling m'a vaguement résumé ce qui se passait) (si j'étais un hobbit ou un nain, je préférerais largement me retrouver nez à nez avec un dragon), beaucoup d'or, un scénario pas trop mal fichu, des acteurs pas mauvais, et puis une amorce d'histoire d'amour inattendue, avec un héros presque aussi beau qu'Aragorn (et nettement plus jeune).

Depuis je me demande si Kili va réellement mourir, comme le prévoit le bouquin. J'imagine que oui, et que le scénariste est juste en train de nous forcer à nous attacher à lui pour mieux nous briser le cœur le moment venu. Sadique.
En cherchant des spoilers sur Internet, je suis tombée sur un forum (parmi d'autres !) avec exactement 203 messages sur le sujet.
Du coup je suis doublement déprimée. D'abord parce que je pressens une fin tragique, et ensuite parce que ça ne devrait pas être permis de manquer d'originalité à ce point.
Je vais aller me consoler en me repassant quelques scènes avec Aragorn, tiens.


(Je me demande si on peut en déduire quelque chose au sujet de moi et des hommes bruns aux longs cheveux, avec moustache et barbe, et au regard intense ?)



vendredi 24 janvier 2014

Le pain à l'attaque de la garde-robe

Je fais du pain. En quatrième vitesse, comme toujours. Ces derniers jours, je cours après le temps. J'ai même renoncé à faire les soldes, alors que je n'ai plus rien à me mettre.
Du pain, donc. Ça va plus vite de le faire que d'aller l'acheter, maintenant que je n'ai plus une boulangerie sur le trajet entre la crèche et l'appart. Et c'est moins cher. Et surtout, il se garde beaucoup plus longtemps. Bref, ne perdons pas de temps. Vite, j'ouvre la boîte à farine. Un nuage s'en échappe. Ah, mince ! Mon pull est tout blanc. En fait ce n'est pas mon pull, c'est celui de Darling, car je n'ai pas assez de pulls. Il va râler. Darling, pas le pull. Tant pis. Je peux m'en passer. Du pull, pas de Darling. Je l'enlève ; de toute façon je n'ai plus froid.
J'ajoute la levure, un peu de sucre, du sel dans un coin, et je me retourne vivement pour prendre de l'eau. Un peu trop vivement. Zut ! Qui a laissé ce bol contenant encore un fond de céréales imbibées de lait ? J'ai tâché mon pantalon ! Pas grave ? C'est vite dit. En excluant ceux qui sont troués, je n'ai plus que deux pantalons qui me vont, et le second est au sale. Bon. Je frotte avec de l'eau. Ça part, mais j'ai perdu au moins une minute. Activons-nous.
Je verse l'eau, laisse mon kitchenaid pétrir pendant que je vide le lave-vaisselle. Puis je renverse la pâte sur le plan de travail fariné. Beurk, ça colle aux mains. Ah, zut, j'ai oublié de retrousser les manches de mon T-shirt. Si j'utilise mes doigts, je vais encore me salir. Sans compter que je ne suis même pas certaine d'avoir un T-shirt correct et propre à me mettre à la place : je n'en ai vraiment pas beaucoup. Je pourrais me laver les mains, certes. Mais je perdrai encore une précieuse minute. Alors je fais comme tout le monde dans ce cas-là, j'attrape ma manche avec mes dents, et...
Crac !
Ah.
Bon.
Finalement, je vais peut-être aller faire les soldes, en fait.

Moralité : comme dit un proverbe chinois ou indo-éthiopien que je me répète quinze fois par jour et que je n'applique jamais, "quand tu es pressé, va encore plus lentement que d'habitude".
(Et comme disait ma grand-mère, "quand tu cuisines, mets un tablier, andouille.")

jeudi 23 janvier 2014

Alors voilà...

Alors voilà, on traduit des bouquins à longueur de temps, on relit des épreuves à l'heure du déjeuner, et dans les transports ou pendant le brossage de dents, on lit des romans pour lesquels on doit faire des fiches de lecture ; du coup, quand on décide de prendre deux heures de temps libre, une fois par semaine, on choisit plutôt de regarder un film pour améliorer un peu sa culture cinématographique.
Et puis un soir, on est entre deux romans-en-attente-de-fiche-de-lecture, alors on prend quelque chose sur sa PAL ("pile à lire", pour les non-initiés), une PAL qui, forcément, ne bouge pas beaucoup de mois en mois, et dans laquelle se trouvent des bouquins qui attendent depuis plusieurs années, parce que décidément, non, on n'a plus l'occasion de lire "pour le plaisir", plus le temps*. On prend un bouquin, donc, juste pour lire en se lavant les dents (on ne peut pas se permettre de perdre une minute – alors trois, pensez !), et éventuellement dix minutes avant de dormir.

Et on plonge. Dans un univers inconnu, un hôpital, avec un jeune interne qui voit toutes sortes de personnes défiler aux urgences, et qui raconte des histoires, parfois tristes, parfois émouvantes, souvent drôles. Le temps passe, on oublie complètement qui on est, où on est, comment on s'appelle ; on est là-bas, on est lui, ce narrateur, cet interne qui vit une vie tellement différente, tellement lointaine. On sourit, on rit, on a les yeux qui pique, on tourne une page après l'autre. Et quand enfin on arrive au dénouement, à cette dernière tristesse, puis cette dernière joie, cette dernière histoire, celle de la vie, on pose enfin le livre.
Et on s'aperçoit qu'il est trois heures du matin.
Cette nuit, c'était Alors voilà, les 1001 vies des urgences, de Baptiste Beaulieu.
La fois précédente, c'était Hunger Games.
Et avant, il y a eu Daniel Pennac, Alexandre Dumas, J.K. Rowling, Arthur C. Clarke, et bien d'autres encore.

On le paie, bien sûr. En éteignant la lumière, on calcule le nombre d'heures qui reste avant le matin, et on se traite de tous les noms. On a du mal à s'endormir, car on a raté le train du sommeil. On se lève au radar quand le réveil sonne, à 6h45. On bâille toute la journée. Mais pendant quelques heures, on est parti, vraiment loin, très très loin, à tel point qu'on ne savait même plus d'où on était parti ; on a voyagé sans quitter son lit, et surtout, on se rappelle pourquoi on passe ses journées à traduire des bouquins, relire des épreuves, faire des fiches de lecture :
parce qu'on aime les livres.

* Mais "le temps de lire est toujours du temps volé." Daniel Pennac, Comme un roman.

PS : Le blog de Baptiste Beaulieu est ici.

mercredi 22 janvier 2014

Un oeuf chez les Grecs

Aujourd'hui, Darling travaille, alors que normalement, le mercredi est son jour de repos. Mais mon planning ne me permet pas de passer une journée sans avancer ma traduction. Pour la deuxième fois de la semaine – l'instit était absente lundi, c'était chouette – j'ai donc essayé de travailler avec les Things à la maison.
Autant dire que ça n'a pas très bien marché.
(Je les déteste.)
Tant et si bien qu'en fin de journée, lorsque, exaspérée par leurs sollicitations incessantes ajoutées à celles du Filou qui entre dans une phase très pénible, je les envoie au diable pour la énième fois, Mr Thing Two résume ma pensée de manière à la fois concise et exhaustive :
— Va te faire foutre un œuf chez les Grecs !
...
Je n'aurais pas mieux dit moi-même.

(Le prochain mercredi sans Darling, je jure que je les mets au centre de loisirs.)
(Au moment même où j'écris ces lignes, le Filou braille dans son lit. Ça fait trois fois que j'y vais.)
(Je les déteste tous.)

Des journées XL et un joli lapsus

Hier soir, 23h40. Je n'ai pas encore atteint mon quota de pages, après une journée où Darling est parti à 8h20 pour rentrer à 20h40, une journée où, en plus de ma traduction, j'ai réglé quelques problèmes administratifs, fait une fiche de lecture, répondu longuement à deux emails, multiplié les allers-retours vers l'école et l’assistante maternelle, rangé toute la maison, lancé-séché-plié-rangé trois lessives, confectionné des cookies pour le goûter, préparé un dîner miraculeusement équilibré avec des fonds de placards, passé une commande de produits frais, donné trois douches, etc.
Je n'y arrive pas. J'ai beau essayer de me concentrer, manger du chocolat, me pincer les joues, mes yeux se ferment. Je n'atteindrai pas la page 157 aujourd'hui.
Je me lamente auprès de Darling, lui-même au bout du rouleau :
— Comment veux-tu que j'arrive à tout faire ? Les journées n'ont que 48 heures !
...
Du coup, avant de déclarer forfait et d'aller nous coucher, nous avons terminé la journée sur un éclat de rire. C'est déjà ça.

lundi 20 janvier 2014

Homonymie

Expéditeur : Fofo
Pour : Virginie Beaunimoche ; Cécile Pleutdemain
Objet : Nouvelle série d'espionnage
Chères Virginie et Cécile,
Ma traduction du premier volume de la nouvelle série progresse bien, et j'espère que les éditions Flamboyantes feront un tabac avec ! Je voudrais juste vous reparler des noms des personnages. Comme je vous l'ai déjà expliqué, chaque personnage a un nom et un surnom, et ces surnoms signifient respectivement...
(...)
A très vite,
Fofo

Dans les minutes qui suivent, je reçois deux emails en réponse au mien. Le premier :

Expéditeur : Virginie Beaunimoche
Pour : Fofo
Objet : RE : Nouvelle série d'espionnage
Chère Fofo,
Tu m'as envoyé un email qui ne me concerne pas... Je travaille pour les éditions du Solide, pas pour les éditions Flamboyantes, et je n'ai jamais entendu parler de cette série. Je suppose que tu t'es trompée de destinataire.
Bien à toi,
Virginie
Et le deuxième (oui, parce que si je n'avais pas envoyé mon message à deux personnes à la fois, ça aurait été moins drôle) :

Expéditeur : Cécile Pleutdemain
Pour : Fofo ; Virginie Ouininon
Objet : RE : Nouvelle série d'espionnage
Chère Fofo,
Avant toute chose, je mets Virginie en copie : tu as envoyé ton message à une autre Virginie, aux éditions du Solide, et non à mon assistante... Heureusement que nous ne travaillons pas sur le même créneau !
Au sujet des surnoms...
(...)  
Amitiés,
Cécile

Oups.
La gaffe.
La bourde.
La grosse bévue.
Heureusement que, en effet, Virgnie B. s'occupe d'albums pour les tout-petits et pas de romans pour les ados. N'empêche. Si j'avais été en train de traduire le prochain Harry Potter, j'aurais pu être condamnée à trente-cinq ans de prison et quatre millions d'euros de dommages et intérêts. Au moins.


Moralité : ne jamais faire confiance à la saisie semi-automatique, surtout dans le champ "destinataire" d'un email.
(Mais aussi, qu'est-ce que c'est que toutes ces Virginie qui travaillent dans l'édition, hein ? Pourraient pas s'appeler Azelma ou Lambertine, non ?)


PS : Remarquez bien qu'on peut faire encore plus embarrassant. Il y a quelques années, un monsieur charmant, quoique plus tout jeune, avait envoyé une invitation à déjeuner légèrement teintée de flirt à ma sœur, qui travaillait à l'époque dans la même boîte que lui. Quelques instants plus tard, il avait reçu une réponse de mon père adoptif (même boîte également, même nom de famille que ma sœur, et prénom commençant par la même initiale) : "Cher collègue, merci beaucoup pour votre invitation, mais n'est-ce pas plutôt avec ma fille que vous désirez déjeuner ?". J'en ris encore !

dimanche 19 janvier 2014

Anne Sylvestre

J'ai raté Léo Ferré, que je ne connaissais pas très bien, mais qui m'avait l'air d'un sacré bonhomme. J'avais pris un billet pour son dernier spectacle, pourtant. Mais il est mort quelques semaines avant. J'étais fort déçue. Et agacée : on m'a remboursé le billet, mais pas les frais de réservation.

J'ai raté Jean Ferrat, que j'aimais énormément. J'avais absolument tous ses disques. Je guettais son retour sur scène. Mais je l'ai découvert trop tard, et il ne chantait presque plus.

Bien entendu, j'ai raté Georges Brassens, et Jacques Brel. En fait, il serait plus court de faire la liste des chanteurs que j'ai vus sur scène : Renaud, quatre ou cinq fois, et Barbara, une fois. Et c'est tout. Jusqu'ici, je n'ai même pas encore vu une seule fois "en live" Jean-Jacques Goldman, qui est pourtant très bien placé dans mon hit-parade personnel.
(Ah oui, je vous avais bien dit que ma connaissance de la chanson française n'était pas des plus modernes. Mais on m'a offert quelques disques à Noël : ça devrait s'arranger).

J'ai même raté Guy Bedos ! Oui, je suis consciente que ce n'est pas un chanteur. N'empêche que quand, à Noël, j'ai vu qu'il montait sur scène pour la dernière fois, j'ai voulu voir s'il y avait encore des places, mais c'était trop tard. Je m'en veux encore.

Du coup, quand j'ai lu dans Le Monde, il y a trois ou quatre jours, qu'Anne Sylvestre allait donner un concert pendant trois jours à Paris, à 79 ans, je n'ai pas hésité. Cinq minutes plus tard, j'avais pris une place pour le dimanche après-midi, la seule date possible pour moi.

Donc voilà, j'ai vu Anne Sylvestre. N'ayant que quatre albums d'elle (parmi sa discographie pour les adultes, je veux dire), et pas le dernier en date, je ne connaissais pas la plupart des chansons qu'elle a chanté, mais sa voix est si claire et les arrangements si discrets qu'on comprend tout ce qu'elle dit, donc ça ne m'a pas gênée, au contraire : j'ai eu le plaisir de la découverte. Il y avait des chansons drôles, des chansons tristes, des chansons énervées. Et puis des chansons émouvantes, aussi. Celle qui m'a le plus émue personnellement était Les rescapés des Fabulettes, parce que même si j'apprécie énormément son écriture et son talent dans ses chansons pour les adultes, Anne Sylvestre, pour moi, c'est d'abord – chronologiquement, du moins – quelqu'un qui parle d'un petit sapin au milieu de grands arbres, d'un square avec un toboggan, d'une maison pleine de fenêtres, d'un bel escalier, de pommes rouges vertes ou bleues, d'un balayeur de ruisseau, d'un bateau qui s'appelle Étoile, d'une île pour y vivre tranquille...
Moi j'étais celle qui soulève
Des questions à poser aux grands
Je disais que c'étaient les rêves
Qui faisaient grandir les enfants
Aussi faudrait pas qu'on se moque
S'ils viennent me voir un beau jour
Faire signer la pochette en loques
D'un bien-aimé 45 tours
Quand à présent je les regarde
En les voyant si lumineux
Je souhaite que toujours ils gardent
Cette étincelle dans les yeux
Mon seul regret, c'est qu'elle n'ait pas chanté Une sorcière comme les autres, peut-être ma préférée. Mais je suis vraiment heureuse d'être allée dire mon admiration à cette grande dame et la remercier de tout ce qu'elle m'a donné, dans mon enfance ou plus tard. Merci, Anne Sylvestre.

samedi 18 janvier 2014

Une maman sonne toujours deux fois

17h. Je vais chercher le Filou chez l'assistante maternelle après avoir récupéré les Things à l'école. Je monte au septième étage, je sonne à la porte de l'appartement.
Drriiiing !
— Maman ! fait à l'intérieur la voix de mon gamin, dont j'entends les petits pieds qui se rapprochent en courant de la porte.
L'ass mat m'ouvre, entouré des gamins qu'elle garde : je suis toujours la première mère à arriver. Câlins, bisous, bavardage, et juste au moment où je m'agenouille devant le Filou pour lui mettre ses chaussures avant de l'emmener (c'est mieux qu'en chaussons), un autre parent sonne à la porte.
Drriiiing !
— Maman ! fait mon gamin en se précipitant à nouveau vers la porte.
...
...
...
Mais enfin ?


(Je me demande comment il aurait réagi si ça avait effectivement été une autre moi, sur le palier ?)

vendredi 17 janvier 2014

En amour comme à la guerre...

Mercredi matin. Le Filou est chez son assistante maternelle, le Grand au collège. C'est le jour de repos de Darling. J'ai prévu de passer une partie de la journée hors de la maison ; juste avant de partir, je vais saluer les Things.
— Au revoir mes chéris, à tout à l'heure !
— Tu t'en vas ? s'étonne Mr Thing Two.
— Oui, vous allez déjeuner avec papa, et ensuite je reviendrai après la sieste.
Il acquiesce vaguement. Il faut dire qu'il est en train de jouer aux Lego, donc le reste ne l'intéresse pas beaucoup.
Miss Thing One, elle, se renfrogne :
— Non ! Je veux pas que tu t'en vas !
— Je reviens très vite, ma puce. Vous aurez juste le temps de déjeuner et de faire la sieste. Je serai là au moment du goûter.
Elle fronce encore plus les sourcils (c'est sa spécialité), me fusille du regard, prend une grosse voix furieuse, et rugit :
— Non ! Je veux pas que tu t'en vas parce que JE T'AIME !
J'ai eu une pensée apitoyée pour le garçon (ou la fille, hein, on ne sait jamais) à qui elle déclarera un jour son amour...

(Je suis quand même partie. En chantant, même. "... Et si je t'aime, prends garde à toi...")

jeudi 16 janvier 2014

Gigot de sept heures

(Allez, parlons un peu cuisine, ça faisait longtemps !)

Hier, j'ai refait un gigot de sept heures, ou gigot à la cuillère*. J'avais tant aimé ça à Noël que j'ai voulu recommencer. Et puis c'était parfait, j'avais un invité à dîner alors que je devais passer la journée hors de la maison.
Version rapide (la préparation, pas la cuisson !), exécutée à la va-vite à dix heures du matin : plein d'oignons, de carottes, d'ail et de céleri coupés en petits cubes grâce à mon alligator (un coupe-légumes, peut-être l'ustensile de cuisine que j'utilise le plus avec ma râpe à fromage et mon kitchenaid), un litre de vin rouge pas trop mauvais, un peu d'eau en plus, un peu de sauce soja parce que j'en avais envie, une épaule d'agneau, et hop, au four dans une énorme cocotte en fonte. Cinq minutes, lavage de l'alligator compris. J'ai donné des instructions à Darling concernant l'allumage du four (120°, vers 13h), et je suis partie.
Le meilleur de l'histoire ? Quand je suis rentrée en fin d'après-midi, la maison embaumait. Et pour la première fois depuis que j'ai quitté la maison parentale, ou presque, j'ai su ce que c'était de rentrer chez soi en fin de journée avec l'estomac dans les talons et de humer les effluves du dîner en cours de préparation.
Et je me suis dit que Darling avait de la veine, quand même.
— Oh là là, ça sent bon ! me suis-je exclamée.
— Oui, hein ? m'a-t-il répondu d'un air de fausse modestie. J'ai préparé un bon petit dîner dont tu me diras des nouvelles...

* Ainsi nommé parce qu'après cette longue cuisson à basse température, la viande est si tendre qu'on peut la découper avec une cuillère. Juré.

mercredi 15 janvier 2014

bdc


Ça faisait longtemps que je n'étais pas passée dans mon ancienne rue parisienne. Mais comme toujours pendant les mois précédant mon déménagement, en voyant ce graffiti tout là-haut, j'ai pensé "bas de casse", et je me suis même demandé pourquoi le tagueur l'avait écrit en lettres capitales.

Oui, je crois qu'on peut parler de déformation professionnelle.


(PS : pour ceux qui ne viennent pas de passer des heures à relire des épreuves mal fichues, sachez qu'on écrit "bdc" dans la marge quand on veut indiquer que tel mot ou lettre doit être mis en minuscule et non en majuscules. "bdc", c'est-à-dire "bas de casse", expression qui vient de l'époque où les caractères en plomb étaient rangés en bas de la casse du typographe pour les minuscules, et en haut pour les majuscules. Merci de votre attention et bonne journée.)

mardi 14 janvier 2014

La suite ?

Cher Editeur,
J'ai enfin terminé de relire les épreuves truffées de fautes ; vous pouvez donc m'envoyer un coursier pour les récupérer. Je les ai lues un peu partout (dans le métro, en me lavant les dents, en surveillant les gamins au square...), donc si mon écriture est parfois illisible, n'hésitez pas à me poser des questions !
J'en profite pour vous demander si vous avez déjà une idée de la date à laquelle il vous faudra la traduction du second volume. Quand j'ai évoqué ce sujet en octobre dernier, vous m'avez répondu qu'il paraîtrait en 2015, mais que vous n'en saviez pas plus. Je sais que c'est encore loin, mais il faut que je lui prévoie de la place dans mon planning : vu sa longueur, ce n'est pas un roman qu'on traduit en trois semaines... Avez-vous au moins une vague idée ?
Merci d'avance,
Bien cordialement,
Fofo

Réponse :

Chère Fofo,
Merci pour votre relecture. Je vous envoie un coursier immédiatement. Pas de code ni d'interphone ?
Pour le second volume, il devrait sortir début janvier 2015. En tenant compte des délais de correction, fabrication, mise en place etc., cela signifie qu'il me faudrait la traduction début mai. Je vous confirme ça assez vite.
Bien cordialement,
Editeur

J'ai cru que j'allais tomber de ma chaise.
Un bouquin de 450 pages, grand format. Plus de 600.000 signes. Trois mois de boulot. Peut-être moins pour quelqu'un qui traduit vite, qui n'a pas d'enfants ni de corvées ni de vie sociale, et qui peut bosser dix heures par jour, weekend compris. Pour moi, trois mois de boulot, ou à la rigueur deux et demi. Je devrais donc m'y mettre début février.
Mais qu'est-ce qu'il s'imagine ?
Que je paie l'assistante maternelle, les fenêtres à double vitrage et les dix kilos de coquillettes mensuels avec LA traduction annuelle que je fais pour eux ? Que quand je ne travaille pas pour eux, je me tourne les pouces et je fais du tricot ? Que j'ai une telle confiance en l'avenir que je ne me demande qu'en janvier comment je vais gagner ma vie en février ?
Et il avait l'intention de m'en parler quand ? Le mois prochain ?

Ma réponse, laconique :

Non, pas de code ni d'interphone, c'est une maison.
Pour la traduction du deuxième volume, mon planning est plein jusqu'en juin...

Si c'est "pressé", qu'ils fassent appel à un autre traducteur. Ou alors, j'ai une meilleure idée : qu'ils sautent l'étape de la correction ! Ça nous fera gagner du temps à tous...




lundi 13 janvier 2014

Des épreuves éprouvantes

C'est la plus longue traduction que j'aie jamais faite (pour l'instant). J'ai bossé tout l'été, pendant mes "vacances", pour la terminer à temps. J'ai rendu un texte impeccable, sans fautes d'orthographe (j'ai un correcteur très performant), sans coquilles, parfaitement bien ponctué, relu deux fois, avec en prime des explications sur mes choix de traduction et un index des noms enrichi par rapport à celui de la VO. Du bon boulot, quoi. Normal, en fait : rien de plus que ce pour quoi je suis payée. J'ai d'ailleurs été bien payée, et assez vite.

Sauf que quand on est traducteur, même quand la traduction est terminée et qu'on ne recevra plus un seul centime, le boulot n'est pas terminé : il y a les épreuves, c'est-à-dire, pour ceux qui ne connaissent pas ce milieu, le texte corrigé par un correcteur professionnel, et mis en page. En théorie, les éditeurs sont tenus d'envoyer les épreuves à l'auteur ou au traducteur, pour que celui-ci donne son "bon à tirer", ou BAT, c'est-à-dire qu'il vérifie que le texte est bien conforme à celui qu'il veut voir apparaître en librairie sous sa signature. En pratique, certains éditeurs "oublient" d'envoyer les épreuves, et ceux qui le font envoient bien souvent les premières épreuves, qui seront encore corrigées par quelqu'un, et non les dernières épreuves, ce qui signifie qu'on ne voit pas le texte définitif. Mais le plus souvent, c'est bien suffisant. Même si je trouve forcément quelques bourdes, j'ai en moyenne une remarque, une correction ou une objection à apporter toutes les dix ou quinze pages, pas plus. Je ne renvoie d'ailleurs jamais les épreuves sur papier, j'écris juste un email avec la liste des dernières modifications à apporter.

Mais tous les traducteurs ont connu un jour ou l'autre des épreuves éprouvantes. Les plus fréquentes sont celles où on s'aperçoit que le correcteur a fait du zèle. Surtout quand le texte est traduit de l'anglais, et que le correcteur est anglophone. Il est alors susceptible d'introduire des contresens monstrueux parce qu'il est trompé par des faux amis, ou des tournures de phrases affreusement lourdes parce qu'il juge que le traducteur s'est trop éloigné du texte, ou des erreurs de grammaire ou d'orthographe parce qu'il croit, sans avoir vérifié, que le traducteur a fait une faute. Un exemple personnel : un de mes personnages, après avoir été malade, était de nouveau "sur pied" au bout de deux ou trois jours. La correctrice avait ajouté un S : "sur pieds". Non non, ai-je noté dans la marge : vérifiez donc dans un dico, on écrit bien "sur pied", au singulier, comme on écrit "à pied". Mais ça la perturbait vraiment, ce singulier, donc par retour de courrier, elle m'a proposé d'écrire que mon personnage était de nouveau "sur ses pieds". HEIN ? Mais bien sûr. Et donc, quelques pages plus loin, au lieu d'aller à la gare à pied, il devait y aller "avec ses pieds", j'imagine ?

Malgré quelques petits incidents, jusqu'ici, j'avais cependant échappé aux épreuves catastrophiques. Jusqu'ici.
Plus maintenant. C'est enfin arrivé, et manque de pot, c'est tombé sur le roman le plus long que j'aie jamais traduit.
Première page, premier paragraphe : Il se redressa peu à peu et grimace.
Un peu plus loin : Soutiens-!
Encore plus loin : Elle en compta six, mais se doutait qu'elles étaient bien plus nombreuses davantage.
Juste après : Le corps heurta le sol avec un son mal.
Etc.
Ajoutez à cela une ponctuation lamentable, et des modifications injustifiées (certes, "prie-dieu" est plus courant que "agenouilloir". Mais si j'ai choisi ce dernier mot, c'est peut-être parce que sur cette planète, la divinité suprême est une déesse, non ?)
Cette fois, je pense que ce ne sont pas tant les corrections elles-mêmes qui sont en cause que le report des corrections. Comme si l'écriture du correcteur n'était pas très lisible et si c'était un stagiaire ne parlant pas un mot de français qui avait intégré les corrections ensuite.
Du coup, au lieu d'une erreur, coquille, répétition grossière, virgule mal placée, mauvaise concordance des temps etc. toutes les dix pages, j'en trouve environ deux par page.
Et il y a 474 pages.
Plus de 20 heures de boulot, au rythme où je vais. Trois jours. Non rémunérés. Alors que je suis en retard sur ma prochaine traduction, déjà.
(Non, je ne peux pas m'en laver les mains et refuser de relire les épreuves. Mon nom sera sur le bouquin. Tout le monde croira que les contresens et phrases bancales sont de moi !)

Allez, j'y retourne. Et pour le second volume, je leur suggérerai aimablement de faire plus attention...

(Je me demande s'il me reste du chocolat non grignoté par les souris quelque part ?)

samedi 11 janvier 2014

Souris donc !

Il y a quelques semaines, j'ai découvert qu'un sac de 5 kg de coquillettes que j'avais laissé à la cave avait été légèrement déchiqueté.
Ah zut, me suis-je dit. Nous avons des souris.
J'ai transvasé le sac dans une boîte hermétique et je n'y ai plus songé. Je n'ai aucune phobie des souris, de toute façon.
Quelques jours après, j'ai trouvé qu'une des pommes, parmi les trois cageots de dix kilos que nous vidons à très grande vitesse, avait été rongée. Une seule.
Bon, me suis-je dit. Il faut croire que les bestioles ne sont vraiment pas très nombreuses, ou même qu'il n'y en avait qu'une, qui ne faisait que passer.
J'ai lavé la pomme, découpé le morceau rongé, et mangé le reste.
Cela ne s'est plus renouvelé. Aucun autre dégât n'a été constaté. Les sachets de fruits secs ou de petit épeautre sont restés intacts. Les pommes de terre, oignons etc. également.

Et puis hier, en faisant des cookies, j'ai compris pourquoi quasiment toute la nourriture avait été épargnée.

Parce que les souris avaient trouvé mieux.

Une tablette de chocolat d'un kilo. Bio. 70% de cacao. A peine entamée. Laissée bêtement entrouverte, sans protection, sur une étagère.
(La tablette de Milka en dessous, c'est pour vous donner une idée de la quantité qui a été rongée. Vous voyez les traces de petites dents ?) (Non, ce ne sont pas les gamins. Les petits n'ont pas accès à la cave, et le Grand n'aime pas le chocolat noir.)

Alors, on réfléchit, et on passe en revue les solutions potentielles.
- Prendre un chat
La solution la plus évidente. Ça tombe bien, j'adore les chats. Et maintenant, j'habite dans une maison, et je travaille à domicile, donc il ne s’ennuierait pas. Mais je n'ai pas vraiment besoin de corvées et de soucis en plus (litière, vaccins, viande à ne pas laisser traîner dans la cuisine...), et surtout, je pars deux mois tous les étés ! Qu'en ferais-je ?
- Mettre des pièges, ou du poison
En dehors du fait que je n'ai pas très envie d'aller ramasser les cadavres, je suis plus que dubitative sur l'efficacité de cette mesure. J'aurais beau en tuer quelques-unes, il y en aurait d'autres qui viendraient, non ?
- Mettre toute la nourriture sous clef
Ça c'est assez facile. Enfin, pas sous clef, mais dans des bocaux, des boîtes métalliques ou des boîtes hermétiques. C'est déjà le cas pour 90% de ce que je conserve dans ce que j'appelle pompeusement "le cellier". Reste les cageots de pommes... Mais s'il ne restait plus rien d'accessible, est-ce que je ne risquerait pas de voir les rongeurs s'attaquer à mes cartons, à mes papiers, ou même monter à l'étage supérieur, dans ma cuisine ?

J'ai longuement réfléchi (au moins deux minutes), et finalement, j'ai trouvé une solution peut-être provisoire, mais qui m'a paru excellente.
J'ai redescendu la tablette à moitié rongée, et je l'ai posée par terre, en plein milieu de la pièce.

Sérieusement, toute créature normalement constituée ayant le choix entre du chocolat et des pommes, du quinoa ou des cartons devrait se cantonner au chocolat, non ?

vendredi 10 janvier 2014

La Petite Charlotte

Les Things ont appris une chanson à la maternelle : La petite Charlotte, d'Henri Dès. Mais bien sûr, leur mémoire est parfois imprécise, et ne va pas au-delà du premier couplet, lui-même incomplet. Je cherche donc sur Internet, je trouve, j'écoute une fois la chanson. Un peu plus tard, à table, je la répète (j'ai une mémoire aussi excellente pour les chansons qu'épouvantable pour les noms et les visages, et cette chanson-ci est vraiment très simple) :

— Pan pan pan !
— Qui est là ?
— C'est la P'tite Charlotte. J'aurais besoin d'un rouleau pour faire mon gâteau...
— Je n'en ai pas, je n'en ai pas, débrouille-toi comme ça ! (...)

Ensuite, la Petite Charlotte réclame un fourneau, puis un plateau, et se fait rembarrer avec la même amabilité. Et quand son gâteau est malgré tout terminé et que son interlocuteur en réclame une part, elle lui demande avec raison :

— Qu'est-ce que tu as fait pour mon gâteau, mon gâteau si beau ?
— Rien ma foi, rien ma foi...
— Eh bien t'en auras pas !

Et là, au lieu d'applaudir cette chute attendue, le Grand se récrie :
— Oh, mais elle est méchante !

Identification avec la Petite Charlotte qui fait des efforts pour arriver à quelque chose ? Zéro. Identification avec le flemmard qui refuse de lever un petit doigt pour l'aider, et ensuite veut profiter de son travail ? 100%.

C'est officiel, j'ai raté son éducation.

jeudi 9 janvier 2014

Un dragueur

8h45. Je reviens de l'école. Un homme entre trente et quarante ans, qui a garé sa voiture en face de chez moi, m'interpelle :
— Excusez-moi, vous pouvez me dire le nom de la rue ?
— Heu, oui, c'est la rue Chémoi.
Il sort un plan de sa poche et commence à chercher. Je l'aide :
— Regardez, c'est ici.
— Et ça ?
— Ça, c'est le boulevard des Bagnoles, juste là.
— Et pour aller ici, comment faut-il faire ? C'est loin ?
— Eh bien, vous prenez tout de suite à gauche sur le boulevard. Mais si vous y allez en voiture, il faut d'abord que vous alliez à droite et que vous fassiez demi-tour au carrefour. Il y en a pour cinq...
Il m'interrompt :
— Vous êtes une femme très belle.
— ...
— En fait je vous ai demandé ces renseignements juste parce que j'avais envie de parler avec vous. Vous êtes vraiment très belle.
Il est charmant, pas du tout agressif ou inquiétant, mais je suis prise de court. Ça faisait quelques années que ça ne m'était plus arrivé (depuis que je me balade sans cesse avec des gamins dans les pattes, peut-être ?).
— Heu... merci... Je disais donc qu'il y en a pour cinq minutes, ce n'est pas loin du tout...
Visiblement, il s'en fiche. Il ne m'écoute plus :
— Vous êtes mariée ?
— Eh oui, désolée !
— Je ne vous crois pas, conteste-t-il en souriant. Vous n'avez pas d'alliance.
Ça me rappelle une conversation que j'ai eue récemment avec une amie, qui soulignait à juste titre l'absurdité de ces polars où un flic décrète, après avoir examiné un cadavre : "Ah, il est célibataire, puisqu'il n'a pas d'alliance, donc personne ne l'attend chez lui".
— N'empêche que je suis mariée, ou tout comme, et j'ai quatre enfants !
En théorie, tout homme normalement constitué devrait prendre ses jambes à son cou, à ce stade, non ? Surtout que je viens d'entrer dans une grande maison où il est évident que je ne vis pas seule. Mais il insiste, plein d'espoir :
— Vous êtes divorcée, alors ?
— Non, pas du tout ! Et maintenant, si vous voulez bien m'excuser...
— Mais je veux vous revoir ! Je peux vous donner mon numéro de téléphone ?
— Pas la peine. Bonne journée !
— Si, si, on ne sait jamais ! C'est le 06...
Quand je suis entrée dans ma maison, il était encore en train de me crier des nombres à travers la grille du portail.


J'ai raconté l'histoire à Darling en prenant mon petit déjeuner. Il s'est inquiété aussitôt :
— Et il était vieux ? Moche ? Ou...
— Non non, il était normal, et il avait à peu près mon âge. Peut-être pas d'un niveau socio-culturel très élevé, cela dit.
(Oui, je suis snob, je sais. Je suis abonnée à Télérama, vous comprenez.)
 — Ah ! dit Darling. Il va falloir qu'il s'achète des lunettes.
J'en suis restée comme deux ronds de flanc. Darling a des défaut, mais normalement la goujaterie n'en fait pas partie, et il a toujours soutenu que j'étais très belle (quoique très mal fringuée). Est-il réellement en train de me dire que si ce dragueur avait porté des lunettes, il ne m'aurait pas fait du gringue ?
Il remarque mon air éberlué, réfléchit à ce qu'il vient de dire, puis se récrie brusquement :
— Ah, mais non, mais non, ce n'est pas ce que je voulais dire ! Je voulais juste dire qu'il devrait mettre des lunettes pour avoir l'air d'un intello !
Ah, bon. Tant mieux. Parce que j'étais à deux doigts de ressortir demander au monsieur s'il voulait bien me dicter à nouveau son numéro de téléphone...

mercredi 8 janvier 2014

Dernier sommeil

Les Things jouent ensemble avec des peluches. Miss Thing One couche un renard par terre.
— Oh ! s'étonne Mr Thing Two. Pourquoi il dort ?
— Non, non, le détrompe sa soeur :  il dort pas, il est juste mort.
— Ah, d'accord.

Ouf, tout va bien, alors.

(Un rapport avec leur nouvelle devise, "Plutôt mourir que faire la sieste" ?)

mardi 7 janvier 2014

Rémunération forfaitaire

Bonjour, je vous contacte sur les conseils de ma collègue Machine, que vous connaissez bien [Ah bon ?]. Nous recherchons un traducteur pour un roman graphique de qualité, d'environ 200 pages. La traduction serait à rendre fin février, et je vous propose une rémunération forfaitaire de 1000 euros. Ces conditions vous conviennent-elles ?

Alors,
S'il y a 1000 signes par page : Vous vous fichez de moi ou vous avez oublié un zéro ?
S'il y a 500 signes par page et que c'est une nouvelle adaptation en BD de Fantômette : Peut-on négocier un peu le tarif, siouplé ?
S'il y a 300 signes par page et que ce sont les aventures porno-sado-maso d'un tortionnaire pendant l'ultime guerre mondiale : Ce compte mail a été désactivé, merci de ne plus jamais écrire à cette adresse sous peine de faire exploser le serveur.
S'il y a 100 signes par page, et que la moitié des pages sont occupée uniquement par des dessins : Où dois-je signer ?

(Tous les traducteurs vous le diront : il faut toujours connaître le contexte !)


lundi 6 janvier 2014

Rencontre annuelle

Ce sont des gens que rien ne me destinaient à rencontrer un jour, réunis presque par hasard, mais qui, au fil du temps, sont devenus des véritables amis. Ce weekend, ils étaient cinq invités à dormir chez moi, et quatre de plus pendant les journées et les repas, en comptant les enfants. Pendant deux jours, nous avons bavardé de tout et de rien ; nous avons visité un château déserté par les touristes ; nous avons tiré les rois avec deux fèves fabriquées spécialement pour l'occasion, et deux galettes confectionnées par mes soins, dont une sans produits laitiers qui s'est finalement avérée être la meilleure ; nous avons suivi des conversations croisées et eu un immense fou-rire quand l'une de nous, discutant avec deux personnes à la fois, a semblé dire qu'une femme de ménage n'était pas obligée de couvrir le sol de paillettes après l'avoir lavé ; nous avons forcé une non-initiée à regarder le premier et le dernier épisode de Friends, en un raccourci saisissant ; nous avons laissé les gamins vivre leur vie, piocher dans les assiettes ce qui leur plaisait, mettre le bazar dans toute la maison, sauter la sieste pour les petits, jouer à la DS plusieurs heures de suite pour les grands ; nous nous sommes rappelés qu'une femme pouvait rester glamour, en longue robe noire et bijoux étincelants, même avec un pot de chambre plein à la main ; nous avons chanté Le magicien d'Oz à pleine voix ; nous nous sommes relayés pour gonfler un matelas pneumatique et avons testé plusieurs méthodes différentes ; nous avons fait la queue à la douche ; et surtout, nous avons beaucoup ri.
La seule chose que je me demande, c'est pourquoi Darling manquait d'appétit au point de sauter le repas du samedi soir ET celui du dimanche midi, et pourquoi il est resté vingt-quatre heures au lit, deux étages au-dessus de celui où la fête battait son plein ?

samedi 4 janvier 2014

RER gallo-romain

— Et ça, là-bas, c'est quoi ? me demande une touriste, en me désignant le pont sur lequel passe le RER, un peu plus loin dans ma rue.
— C'est le viaduc du métro de banlieue.
— Oh ! s'extasie-t-elle. Un viaduc ? Comme un aqueduc ? Il date du temps des Romains ?

vendredi 3 janvier 2014

Alors moi, va pleurer !

Un garçon et une fille de trois ans et demi, dans une salle de jeux, au milieu d'une mer de Lego.

LUI, saisissant une sorte de panneau indicateur :
— Moi, ze prends celui-là, paske c'est mon préféré, c'est comme un Pokemon X !
[Gné ? Il faudra que le Grand m'explique...]
ELLE, d'une voix autoritaire :
— Mais alors toi tu me le donnes, d'accord ? Pake il est pour moi.
LUI, geignard :
— Mais non, c'est mon préféré, c'est comme un Pokemon X, regade !
ELLE, d'une voix féroce :
— Oui mais toi tu me le donnes, d'accord ? Pake sinon, moi, va pleurer !
LUI, de plus en plus geignard :
— Non, il est pour moi !
ELLE, d'une voix plus menaçante et hargneuse que jamais :
— Alors moi, va pleurer !
Bref silence, puis encore LUI, des larmes dans la voix :
— Mais alors moi z'en a plus !

D'où j'en conclus qu'il a cédé.

Je les rejoins dans la salle de jeu, et j'interviens. J'ordonne à la gamine de rendre ce Lego (qui ne l'a jamais intéressée jusqu'à présent) à son frère. Elle hurle :
— Alors moi, VA PLEURER !
— Eh bien pleure, ma chérie, pleure. Et quand tu auras fini de pleurer, tu pourras recommencer à jouer.
Elle me regarde comme si elle voulait me tuer, essaie de hurler un bon coup, lance un grand coup de pied dans ma direction (mais d'assez loin, car ce matin elle m'a touchée, et ma main a été plus rapide que mes principes : elle s'est pris une bonne tape sur la jambe en retour). Je l'ignore, rends le Lego à Mr Thing Two, repars.
Une minute plus tard, la gamine arrive, tout sourire :
— Il a donné le Lego à moi, regade !

Jusqu'à présent, elle menaçait de lui taper dessus, et passait à l'acte si nécessaire, sans jamais de représailles en retour (à part quelques cris). Que va-t-il devenir si maintenant, la simple menace qu'elle se mette à pleurer suffit à le faire céder ?

jeudi 2 janvier 2014

La Belle et la Bête et les comédies musicales

Je vous ai récemment parlé de mon amour pour les "grands classiques" Disney, en particulier ceux postérieurs à La Petite Sirène, avec une histoire d'amour qui finit bien (donc pas Pocahontas), des héros humains (donc pas Le Roi Lion) et plein de chansons. Logiquement, donc, La Belle et la Bête fait partie de mes préférés.

 Quand je suis allée visiter Londres pour la première fois, il y a une quinzaine d'années, j'ai découvert qu'un théâtre présentait une version scénique de ce dessin animé. A l'époque, je n'avais jamais vu de comédies musicales ; je ne savais même pas ce que c'était, ou presque, ce qui ne m'empêchait pas, en bonne lectrice de Télérama, d'en penser le plus grand mal. Mais la demi-minute d'extraits que j'ai vue à l'office du tourisme m'a beaucoup plu, et j'ai donc déboursé une somme astronomique pour aller le voir avec l'amie qui m'accompagnait et le copain qui nous hébergeait pendant ces quelques jours.

Coup de foudre.

Pas pour le copain, si sympathique fût-il. Ni pour La Belle et la Bête : j'avais déjà vu le dessin animé au moins trente fois, donc on peut dire que j'étais déjà amoureuse. Mais pour les comédies musicales en général. Moi qui ai toujours beaucoup aimé le théâtre, y compris très classique, voir juste sous mes yeux ces acteurs évoluer dans un décor souvent extraordinaire, chanter en direct, danser parfois, ça a été une révélation. Comment l'expliquer ? C'est comme aller voir votre chanteur préféré sur scène. Sa voix sera peut-être moins bonne que dans le CD, il y aura peut-être même des faux pas ou des fausses notes, et sauf si vous être incroyablement bien placés, vous le verrez nettement moins bien que sur votre écran chez vous, mais il y aura quelque chose, une magie, une présence physique, un lien, un charme que vous n'aurez jamais ressenti. Alors imaginez si, en plus, il ajoute des chansons que vous ne connaissez pas déjà par coeur...

La Belle et la Bête, c'était ça. Tout à coup, les personnages ont pris vie sous mes yeux. C'était une vraie jeune femme qui vivait cette histoire devant moi. Ses chansons, elle les chantait pour de vrai, accompagnée par un vrai orchestre. Et tout ce qui était fastoche dans un dessin animé – les transformations magiques, les chorégraphies, les décors grandioses – devenait une prouesse.
Un coup de foudre, je vous dis.

Depuis, j'ai vu des dizaines d'autres comédies musicales pendant les deux ans et demis passés à Londres. Et j'ai acheté le CD de celle-ci, ma première, pour avoir aussi les nouvelles chansons ajoutées à celles du dessin animé. C'est même ce CD-là que j'ai écouté la nuit de mon premier accouchement, au début, avant que la douleur ne m'empêche de me concentrer sur quoi que ce soit.

Cette longue introduction pour vous dire que l'autre jour, je suis allée avec mes deux sœurs voir la comédie musicale de La Belle et la Bête, enfin arrivée en France, au théâtre Mogador, à Paris. J'étais ravie de partager ça avec elles, et de montrer à la plus jeune (douze ans) ce que c'était qu'une comédie musicale, puisque je lui en avais tant parlé. J'avais juste peur d'être déçue. Ces spectacles exigent des décors très coûteux (ce qui est moins gênant à Londres, où ils peuvent rester des années à l'affiche), des grands théâtres, des acteurs sachant à la fois à chanter et danser (ce qui est bien plus rare en France que dans les pays anglo-saxons), une fosse d'orchestre... Des ingrédients difficiles à réunir, et qui, ajoutés à la quantité incroyable de répétitions qu'exigent les chorégraphies, justifient largement le prix du billet. J'avais peur que le spectacle ait été raccourci, que les acteurs soient moins bons, que les décors soient moins beaux, bref, qu'on perde 50% du charme de l'original...
Je serai franche : il y a un peu de perte, en effet. Mais plutôt 15 à 20%, pas plus. L'introduction est racontée sous forme de livre, comme dans le dessin animé, alors qu'à Londres, c'était déjà en trois dimensions. La scène est un peu moins grande, mais ce n'est pas gênant. Les acteurs sont un peu moins nombreux, mais ils se donnent à fond, même les "figurants" qui méritent tous cinq étoiles pour leur énergie et leur talent. Les chorégraphies sont formidables, impressionnantes, géniales. Les décors sont splendides.
Parmi les acteurs principaux, j'ai été particulièrement enchantée par Belle, vraiment exceptionnelle, et Gaston (exactement le physique de l'emploi, et il a une voix tellement magnifique que quand il a chanté "Aux armes, tous avec moi !", j'étais à deux doigts de prendre une faux et de monter sur scène pour aller tuer la Bête avec lui...). Quant aux chansons, ce sont les mêmes qu'à Londres, et les arrangements, adaptations et dialogues aussi : là-dessus, pas de surprise pour moi, mais un vrai bonus pour ceux qui ne connaissent que le dessin animé.
(A ce sujet : ma soeur craignait que les paroles des chansons aient été changées ; elle m'a dit que ça avait été le cas pour la comédie musicale du Roi Lion. Heureusement, pas cette fois. En revanche, les dialogues ont été retraduits ; ils ressemblent de très près à ceux de la VF du dessin animé, mais avec des petites différences du début à la fin. J'ignore pourquoi. Des questions de droits, sans doute...)

Aucun regret, donc. Au contraire, la joie d'avoir passé un excellent moment, et l'espoir que ce ne sera pas le dernier, et que d'autres comédies musicales ayant fait un tabac outre-Manche ou outre-Atlantique débarqueront peu à peu chez nous. Certes, j'aurais un prétexte de moins pour aller à Londres de temps en temps, mais ce sera moins loin !


mercredi 1 janvier 2014

Réveillon en famille

Ça a failli être un réveillon comme celui de l'année dernière, ou de l'année d'avant. Mauvaise humeur générale après une journée enfermés tous ensemble, dîner à base de soupe et de pain sec, deux heures de boulot sur mon ordinateur, et au lit à 11h30 au risque d'être éveillés par les cris et les pétards des gens qui s'amusent, eux.

On n'en est vraiment pas passé loin. Mais après la sieste, à défaut de pouvoir sortir, nous avons construit une superbe maison en Lego, tous ensemble dans la salle de jeux. Pour le dîner, à défaut de mettre les petits plats dans les grands, nous avons inauguré mon "multi-crèpes party" reçu à Noël, et avons avalé plein de crêpes miniatures au jambon ou au fromage, pour la plus grande joie des enfants. Après le dîner, à défaut de rester debout jusqu'à minuit, les petits ont longtemps dansé avec nous sur des chansons de ABBA, et nous avons tous beaucoup ri. Et après avoir couchés les gamins, à défaut de faire la fête, j'ai laissé tomber ma traduction et nous avons regardé une comédie romantique qui s'est terminée pile à 11h59, ce qui nous a laissé le temps de nous souhaiter mutuellement une bonne année.

On est d'accord, ça manque de champagne et de flonflons – même si, franchement, je n'aime pas le champagne et ne tiens pas vraiment au flonflons. Surtout, ça manque un peu de lien social, d'amis avec qui accueillir cette nouvelle année. Mais par rapport à nos réveillons habituels, c'était beaucoup, beaucoup plus joyeux.

(En plus, ce matin, les enfants nous ont fait la grâce de nous laisser dormir jusqu'à huit heures ; et il restait des crêpes pour le petit-déjeuner ; et j'ai inauguré l'année en allant courir une petite heure, ce qui m'a épuisée mais ravie.)

Allez, l'année prochaine on sort les confettis et le champomy.

PS : Bonne année à tous ! Que 2014 vous apporte l'occasion de réaliser des projets qui vous tiennent à cœur, et le courage de les mener à bien ; de l'amour et de l'amitié par wagons ; des grands bonheurs, des petites joies, et des plaisirs par milliers.