Journée à IKEA. Dans un genre un peu différent, le même
genre d’expérience que notre fameux voyage en avion. Le moment du déjeuner,
avec les trois plus jeunes qui hurlaient, la queue au self, et les boulettes
suédoises que j’ai fini par manger froides, fut particulièrement éprouvant.
Bien entendu, nous sommes rentrés sans le lit, la commode
et le meuble de cuisine que j’espérais acheter. Et même pas tellement de
bricoles pour les remplacer. Pour acheter des trucs inutiles, il faut avoir le
temps de regarder dans les rayonnages.
(D’une certaine manière, je peux remercier mes enfants,
donc.)
Bref, quand nous arrivons enfin à la maison, moi avec les
yeux qui piquaient tellement j’étais fatiguée, les enfants d’une humeur
massacrante d’avoir fait une sieste bien trop courte, tous trop chaudement
habillés parce qu’il devait faire moche ce jour-là (je vais lui dire, à ma
voisine, que sa météo ne vaut rien), nous sortons de la voiture au milieu des
hurlements (encore, toujours), et c’est là que je m’aperçois…
… que je n’ai plus la clef.
A pu, clef. Envolée. Disparue.
Une femme de ménage d’IKEA doit être actuellement en
possession d’une clef orpheline, sans trousseau (Mr Thing Two m’a démoli mon
porte-clefs), trouvée dans le réfectoire après le passage de cette famille
nombreuse ultra-bruyante dont la mère a jeté son sac ouvert dans le chariot des
courses pour se hâter de nourrir sa gamine d’une main et son bébé d’un sein
afin de les faire taire, au moins ces deux-là.
Pas de clef. Au secours. Les voisins ont-ils la
clef ? Oui, mais ils ne rentrent du travail que dans deux heures, et dans
moins de cinq minutes, je vais me rendre coupable d’un infanticide si les
Things continuent à crier. Le monsieur qui s’occupe de la maison en mon absence
a-t-il la clef ? Oui, mais quand je lui téléphone, il m’annonce qu’il est
très loin de là.
Je vide intégralement mon sac pendant que Darling fait le
tour de la maison. Les Things hurlent. Le Grand râle. Le Petit pleurniche
(c’est de loin le plus sage des quatre). Je ne trouve rien. Darling non plus.
Pas de porte ouverte, pas de fenêtre ouverte, nulle part. Seule la porte de la
cave est exceptionnellement ouverte, à cause des travaux (je vous raconterai). Ce
qui me fait penser qu’à la cave, il y a un congélateur. Quelques instants plus
tard, je colle dans la main des deuzans un énorme cône trois fois trop grand
pour eux (les autres sont dans le congélateur de la cuisine, inaccessibles). Les
sales mômes se taisent pour la première fois de la journée, ou presque. On va
pouvoir réfléchir.
Alors, voyons. Toutes les portes sont fermées, y compris
celle qui mène de la cave à la cuisine. Mais contrairement aux autres, cette
porte n’est pas une porte super-solide avec une serrure de sécurité patati
patata. C’est censé être une porte intérieure, donc en bois massif, certes,
mais avec une serrure primitive. Et la clef est dedans.
Et si je me prenais pour Fantômette, pendant quelques
minutes ? Pourquoi pas ? Rien à perdre, c’est ça ou attendre deux
heures avec quatre enfants (ou encore casser une vitre renforcée, si on y
arrive). Après tout, dans les bouquins (pour les 8-12 ans, les plus grands n’y
croiraient plus), ça marche toujours.
Je monte jusqu’à la porte en question et je glisse sous
la rainure une grande feuille de papier (la liste de ce qu’on aurait dû acheter).
Puis j’emprunte au Grand le clou qu’il vient de trouver et avec lequel il
espérait crocheter la serrure sécurisée, et je commence à trafiquer. La clef
est tournée à l’horizontale, ce qui ne facilite pas les choses. Mais petit à
petit, je réussis à la mettre en position verticale. Puis je pousse une
profonde inspiration, et je pousse avec le clou.
Et la clef tombe.
Sur la feuille de papier.
Et l’interstice entre le sol et la porte est suffisamment
grand.
Je tire la feuille de papier, tout doucement…
… et je mets la main sur la clef !
Et voilà comment j’ai réussis à pénétrer chez moi par
effraction, ou presque, en utilisant un système dont je n’aurais jamais,
jamais, jamais cru qu’il marchait « en vrai » et surtout pas que
j’aurais l’occasion de le tester un jour. Un vieux truc que j’avais encore
trouvé il y a moins de trois mois dans une histoire de détective complètement
irréaliste pour les plus jeunes lecteurs.
Comme quoi, travailler dans l’édition jeunesse, ça peut avoir
des avantages insoupçonnés, parfois.
J'adore, Fofo ! Mamie Camille
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