mercredi 31 octobre 2012

Vénalité

Le Grand est vénal, et ça m'agace. Je ne sais pas d'où ça lui vient. J'ai un rapport normal avec l'argent, que je dépense sans états d'âme mais raisonnablement, et Darling aussi. Or, ce gamin ne pense qu'au fric. Il n'est pas avare, ça non, il s'achète parfois des bonbons et est même capable de faire un cadeau à un copain, mais il sait toujours au centime prêt combien il y a dans sa tirelire, il se souvient encore de la somme exacte dépensée à Noël 2010 pour le cadeau fait à son père (des chaussettes extra-douces), il connaît sur le bout des doigts le prix de la moindre boîte Playmobil du catalogue, et a déjà calculé exactement combien de temps il lui faudra pour avoir dix mille euros sur le compte en banque que je lui ai fait ouvrir pour son anniversaire, si nous versons dessus cinquante euros tous les mois.

Le Grand est vénal, et ça m'agace. Si je porte une bague en or, il va me demander combien elle coûte. Si je lui dis de traiter avec délicatesse mes vieux Caroline car ils sont précieux, il va me dire que dans ce cas, je ferais mieux de revendre toute ma collection, quitte à faire des photocopies. Si je lui donne une amende de cinq centimes pour avoir traîné trop longtemps avant d'aller prendre sa douche (trop longtemps = plus de 45 minutes et plus de dix rappels à l'ordre), il me fait une scène avec cris hystériques, grosses larmes, supplications, etc. Si je lui demande de me suggérer une phrase quand je traduis un album pour les bébés, il exige de toucher au moins 5% de ma rémunération. Et si on lui annonce que son petit frère vient de se faire arracher une dent, il ne pense pas à la douleur éprouvée, mais au manque à gagner que cela représentera lors des futurs passages de la petite souris.

Le Grand est vénal, et ça m'agace. Il n'a pas l'air de comprendre qu'il y a des choses plus importantes que l'argent dans la vie, comme les loisirs, l'amour, la santé...
La santé !
Bon sang, j'ai oublié d'apporter à la crèche l'antibiotique pour le Petit !
Oh non ! Je vais devoir y retourner ! Comme si je n'avais que ça à faire ! La barbe !
A moins que...

— Mon Grand ? Si je te donne deux euros, tu veux bien aller apporter un médicament à la crèche ?
Environ trois secondes et demie plus tard :
— Voilà, j'ai mis mes chaussures. J'y vais. Tu me donnes le médicament et le code ? Et aussi mon argent ?

Le Grand est vénal, et ça m'agace...
... sauf quand ça m'arrange.

mardi 30 octobre 2012

Album en tissu

Je "traduis" (en réalité, j'invente le texte de toutes pièces, car il n'y a que des dessins dans la VO) un album en tissu pour les tout-petits. Six pages ; six phrases en tout, qui décrivent les images. Le lien entre celles-ci n'est pas toujours évident, mais je me creuse la tête pour trouver quelque chose de plus ou moins logique. Un mouton humanoïde qui joue ; un ballon ; un mouton qui se brosse les dents ; une fleur ; un mouton dans son lit ; la lune... Cela donne quelque chose comme ça :

Simon le mouton joue dans sa chambre. Il aime son ballon rouge ; c'est son jouet préféré. Puis il va se brosser les dents et enfile son pyjama. Au passage, il renifle la jolie fleur dans le vase du salon. Le voilà dans son lit, prêt à dormir. Il est tard : la lune se lève derrière les montagnes... Bonne nuit, Simon !

Réponse de l'éditrice :
Votre texte me convient tout à fait, mais :
- Nous avons déjà un personnage nommé Simon, pouvez-vous trouver un autre prénom en [on] ?
- Il faudrait éviter la répétition entre "il joue" et "son jouet".
- "Renifler" n'est pas un verbe très élégant. Pouvez-vous trouver autre chose ?
- Dans l'esprit des enfants, c'est le soleil et non la lune qui se lève. Il vaudrait mieux trouver une autre phrase.
- Et au fait, il y aura deux autres livres du même genre, pourriez-vous trouver un nom de collection ?

Je cherche d'autres prénoms, je cherche des synonymes, je reformule, j'invente encore, et je réponds par un email nettement plus long que l'album lui-même. Elle me réponds encore, conteste certains de mes choix. Je lui en propose encore d'autres, qu'elle valide. C'est bon, on a fini ? Non, car j'ai droit à un dernier message :

Pourriez-vous intégrer les modifications dans le document Word ?

Tout ça pour vingt euros.
Et pour un album que personne ne va jamais lire (vous lisez le texte des livres en tissu à vos bébés, vous ?).


Un copain du Grand, venu passer la journée à la maison, et qui regarde par-dessus mon épaule :
"Mais tu ne fais que ça, comme travail ?"
Heureusement, non...



lundi 29 octobre 2012

Compromis de vente

Jeudi, je suis donc allée signer un compromis de vente chez le notaire, avec un bébé qui avait non seulement une bronchiolite mais aussi une angine blanche et un début d'otite, même si nous ne le savions pas encore. Une nuit entièrement blanche avait succédé aux nombreuses nuits déjà dramatiquement écourtées, et le moins qu'on puisse dire, c'est que je n'y voyais plus clair. Je me souviens vaguement avoir signé des papiers et promis d'acheter quelque chose ; j'espère que c'est bien une maison de huit pièces en banlieue parisienne et pas un château en Sologne ou un studio au pied de Notre-Dame (pour rester dans le même ordre de prix).

Depuis, Darling et moi réfléchissons à la répartition des chambres. Laissons-nous les Things ensemble, pour qu'il y ait une salle de jeu où tous les enfants peuvent aller jouer, même s'il faudra probablement les séparer dans deux ou trois ans tout au plus ? Les séparons-nous d'emblée, et dans ce cas, auquel des deux attribuons-nous la plus grande chambre ? Donnons-nous la plus grande chambre au Grand, au contraire, même si cela signifie que les Things seront à deux étages différents et qu'il faudra répartir les jouets qu'ils ont en commun ? Prévoyons-nous de loger prochainement ensemble Mr Thing Two et le Petit, en partant du principe qu'ils sont du même sexe et auront peut-être plus d'intérêts communs que les jumeaux ? Gardons-nous une chambre libre pour une éventuelle jeune fille au pair, qui me soulagerait beaucoup mais avec qui ça peut mal se passer (c'est arrivé récemment à quelqu'un de ma famille) ? Logeons-nous le Petit dans cette petite pièce qui sert actuellement de dressing, sachant qu'il faudra forcément qu'il en change quand il aura besoin d'un lit plus grand, et que les placards seront donc inaccessibles quand il dormira ?

Le reste de la maison est également l'objet de toutes sortes de réflexion. Le bureau, au rez-de-chaussée (pour pouvoir surveiller les gamins dans le jardin, et la cuisson du risotto) ou au deuxième étage (pour être tranquille) ? La télévision, au sous-sol ou dans le salon ? [En fait, j'ai déjà pris ma décision sur ces deux points : bureau ET télévision au rez-de-chaussée, sinon Darling et moi serons à trois étages de distance soir après soir. Remarquez, ça éviterait des disputes du genre "Baisse le son, je bosse"...]. La cuisine, dans la véranda / verrière (pas encore construite) ou dans cette pièce bien trop petite pour contenir mes innombrables appareils et ustensiles (pour faire des économies) ? La machine à laver et le sèche-linge, dans la salle de bain du deuxième avec branchements déjà prévus (bonjour pour aller étendre le linge dans le jardin) ou dans la petite pièce de la chaudière au sous-sol (bonjour pour aller chercher le linge sale au deuxième) ?

De graves questions, je sais. A côté, la philosophie, la vie et la mort, l'importance de l'art, tout ça, c'est de la blague. C'est bien simple, ça me réveille la nuit. (Ah non, en fait c'est le Petit, je confonds.)

En fait, la seule question déjà résolue, c'est sur quels pans de murs du rez-de-chaussée nous mettrons nos livres.
Tous.


(Sérieusement, c'est une des premières choses que j'ai vérifié : y a-t-il la place pour mes étagères ? Juste avant d'emménager dans l'appartement où nous sommes actuellement, nous en avions visité plusieurs autres, dont un qui nous plaisait beaucoup... sauf qu'en haut de tous les murs, il y avait une sorte de corniche qui empêchait de mettre une bibliothèque. Il aurait donc fallu troquer mes 21 Lundia contre 23 ou 24 d'autres plus petits. Adieu le joli appartement plein de charme avec son grand salon lumineux...)

dimanche 28 octobre 2012

Anniversaire bloguesque

Ce blog a un an !

Petit calcul : si on estime que je passe en moyenne vingt minutes pour écrire un billet (une moyenne très grossière, des fois c'est cinq minutes, d'autres fois c'est une heure), sachant que j'ai écrit plus de 300 messages en un an, cela fait donc environ 100 heures utilisées à bavarder virtuellement (et toute seule, en plus) au lieu de travailler ou des ranger des chaussettes ou de faire des gâteaux.

Bon, d'accord. Mais si on considère qu'en moyenne, les français passent 3h et quart par jour devant la télévision, ce qui fait donc une centaine d'heures par mois, on peut en conclure que, puisque je ne ne regarde jamais la télévision, j'ai onze mois d'avance sur le temps "perdu" par Monsieur Tout-le-monde. Si, de plus, on tient compte du fait que les français passent en moyenne 13 heures par semaine sur Internet (hors travail, bien sûr), qu'il me faut environ sept minutes pour aller jusqu'à la crèche, que je passe approximativement deux fois plus de temps à faire des lessives qu'une famille lambda, et que je travaille au moins deux heures par jour pendant les vacances estivales, on peut calculer aisément l'âge du capitaine. Je ramasse les copies dans une semaine.

Allez, c'est reparti pour un an.

jeudi 25 octobre 2012

Jamais

Je n'ai jamais autant manqué de sommeil, sauf peut-être quand j'avais deux jumeaux nouveaux-nés.
Je n'ai jamais été autant en retard sur mon planning de traduction, même quand je nidifiais.
Je n'ai jamais pris aussi peu de temps pour cuisiner et pour manger, même quand j'étais célibataire.
Je n'ai jamais entamé une année scolaire avec autant d'enfants.
Je n'ai jamais acheté une maison, et encore moins dans une banlieue dont j'ignorais l'existence il y a trois mois.
Je n'ai jamais visité New York.
(Non, aucun rapport, je continuais sur ma lancée) (désolée) (faites pas attention, je vais me coucher...)



mercredi 24 octobre 2012

A bout de souffle

Premier hiver en collectivité pour le Petit. Premiers microbes, ou premiers virus (jamais compris la différence).
Deux ou trois jours un peu ronchon, avec une température un peu trop haute, un nez pris, de la toux. Et surtout, deux ou trois mauvaises nuits, qui se terminent en apothéose sur celle où le gamin ne dort QUE dans mes bras entre 3h30 et 7h, heure à laquelle se lève la maisonnée.

Et puis hier matin, enfin, un bon petit 38,5° ! Allez, hop, on appelle le médecin !
Sauf que le pédiatre travaille non-stop de 7h30 à 21h, que le médecin de la résidence est en vacances, et que mon propre médecin est à la retraite. Je finis par dénicher un généraliste qui me reçoit hier soir. Un jeune médecin, un remplaçant, qui n'a de toute évidence pas l'habitude des enfants ; très gentil, mais qui a un peu de mal à examiner la gorge ou les oreilles d'un bébé qui se débat.
Verdict ?
— L'examen clinique est normal, madame. Il n'a rien.

Bon. Je sais déjà ce qui m'attend : une autre très mauvaise nuit, et puis une autre consultation demain ou après-demain, où on m'annoncera que le môme a une otite carabinée. C'est toujours comme ça. Quand un médecin jure la main sur le coeur qu'un gamin n'a rien (ou la version plus conciliante, "ce doit être les dents") alors que les parents en bavent depuis un bout de temps (et le gamin, n'en parlons pas), ce sont toujours les parents qui ont raison. Toujours. Il n'a peut-être rien de visible pour l'instant, ce gosse, mais il a quelque chose. Et comme mes deux grands-parents maternels, ma mère, ma soeur, moi-même et mes trois premiers enfants sont tous victimes d'otites à répétition, je parierais pour une otite.

Une très mauvaise nuit plus tard, le pédiatre accepte de me recevoir "entre deux patients".
En fait, c'est une bronchiolite. Ah oui ? Tiens, c'est nouveau, ça. Il paraît que j'en ai fait, petite, mais en tant que parent, je suis miraculeusement passée au travers. Du coup, je suis presque guillerette. J'aime les nouvelles expériences.
Bronchiolite, donc. Bronchiolite "sifflante", même. Ce qui signifie apparemment qu'il fait un bruit de pneu qui se dégonfle en permanence, qu'on peut compter toutes ses côtes à chaque fois qu'il tente d'inspirer un peu d'air, et qu'il halète toute la journée comme s'il venait de courir un marathon. Remèdes ? Pas d'antibiotique, juste du doliprane, de la ventoline (bon courage), et... de la kiné respiratoire. On m'en avait parlé, je l'ai testée cet après-midi. Une dame adorable a torturé mon gamin, a appuyé de toutes ses forces sur sa cage thoracique, lui a fourré un mouchoir jusqu'au fond de la gorge pour le faire vomir, puis lui a fermé la bouche et a injecté au moins un demi-litre de sérum phy dans sa narine gauche, lequel sérum phy est ressorti par la narine droite accompagné d'un bon litre de mucus. Tu m'étonnes qu'il n'arrivait plus à respirer, le pauvre chou.
Je ne sais pas s'il a été traumatisé, mais moi, oui.
— On se revoit demain ? m'a dit la dame adorable quand je suis partie.
Ah ben oui, vous pensiez qu'une unique séance suffisait ? Que nenni.

Ah, et j'oubliais le meilleur : pas de crèche. Le pédiatre m'a annoncé ça d'un air un peu désolé ; il faut croire que ma bonne mine laisse deviner que j'ai dormi environ huit heures en trois nuits. Mais c'est comme ça. Le gamin a besoin de repos, ce qui consiste à faire les aller-retour à la crèche pour aller chercher les Things, aller à la pharmacie, aller chez le kiné, aller faire les courses d'appoint, bref, à passer la journée en vadrouille dans les rues de Paris.
C'est moi qui le garde, bien sûr, parce que Darling travaille, lui. Trois jours, jusqu'au weekend. Le jour où je devais traduire ces albums urgents ? Oui. Le jour où j'avais rendez-vous dans une énième banque pour essayer de trouver un financement acceptable ? Oui, aussi. Et le jour où j'avais rendez-vous chez le notaire pour signer la promesse d'achat de notre future maison ? Oui, ce jour-là également.

— Tant pis pour toi, m'a dit Darling. Tu n'avais qu'à ne pas le sevrer.

mardi 23 octobre 2012

Fantômette


Fantômette vue par Josette Stefani
Je m'aperçois que, dans la liste des mes grands amours littéraires de jeunesse, je ne vous ai jamais parlé de Fantômette.
Pourtant, Fantômette, c'est mon héroïne numéro un. LA compagne de mon enfance. LA série de livres que je connais par cœur ou presque. Au cours de ma vie, je n'ai rencontré que deux personnes qui étaient meilleures que moi au quiz Fantômette, avec des questions comme "A quel moment voit-on Fantômette boire une tasse de thé ?" ou "Dans quelles histoires Fantômette se déguise-t-elle en garçon ?" ou même "Que mange Fantômette sur l'île de la Sorcière ?", ou encore "A quelle occasion apprend-on que Fantômette parle espagnol ?"
A tel point que lorsqu'il a fallu choisir un avatar pour ce blog, c'est tout naturellement cette jolie Fantômette bouclée et sans son masque dessinée par Jeanne Hives (ci-dessus, à droite) que j'ai choisie...

Qui est Fantômette, donc ?
Eh ! bien, c'est une fille, d'un âge indéterminé (quelque part entre 10 et 14 ans, disons ; selon l'auteur, "elle a l'âge du lecteur"), à la double identité, qui va à l'école pendant la journée et traque les bandits le soir (et en vacances !). Sa particularité ? N'en avoir aucune. Pas de pouvoirs magiques, pas de gadgets improbables, rien de spécial, juste une intelligence hors du commun et un goût de l'aventure très poussé. Et ça, c'est formidable. Comment voulez-vous vous identifier à Superman ou à Artemis Fowl ? A Fantômette, en revanche, c'est possible !
Elle est presque toujours flanquée de deux amies improbables, dont une grande farfelue au caractère ahurissant qui plaît parfois plus que Fantômette elle-même à certains fan de la série, la fameuse Ficelle. Il y a aussi un journaliste qui tire notre aventurière de bien des mauvais pas, et lui permet de se mouvoir dans un monde d'adultes sans attirer l'attention. Et puis un chat noir qui reste sagement à la maison pendant que sa maîtresse court les rue, un commissaire assez borné, et toute une galerie de méchants de tous poils !
La série comprend une cinquantaine de volumes, dont la plupart écrits entre 1961 et 1987, parus dans la Bibliothèque Rose (Hachette), et successivement illustrés par Jeanne Hives, Josette Stefani, Philippe Daure, et d'autres encore, jusqu'aux rééditions actuelles avec des dessins de Laurence Moraine. Quarante-neuf volumes (très exactement) que j'ai lu, relus, et re-re-relus, probablement une bonne vingtaine de fois chacun, ou plus. Même adolescente, alors que j'avais théoriquement passé l'âge, il m'arrivait encore d'en avaler un en même temps que mon goûter. Une heure plus tard, la parenthèse enchantée terminée, je pouvais attaquer mes devoirs ou un Balzac...
Bien sûr, au fil du temps, la série a évolué. Les premiers volumes fleurent bon la campagne, avec le carnaval de la ville, des écolières qui jouent à la marelle, des petits méchants sans envergure, et même des plumes qu'on trempe dans un encrier. Le milieu de la série pétille, avec des aventures plus palpitantes, plus poussées, des voyages, des méchants grandioses. La fin est moins réussie, en particulier les derniers volumes (dont quatre nouvelles histoires parues depuis 2006), où on sent que l'auteur s’essouffle – et comment le lui reprocher, après plus de quarante titres ?

Au salon de Montreuil, en décembre 2010
Pourquoi est-ce que je vous raconte ça aujourd'hui ?
Parce que Georges Chaulet vient de mourir, à l'âge de 81 ans. J'avais eu le plaisir de le rencontrer à plusieurs reprises ; c'était un sacré bonhomme, souriant, farceur, plein d'entrain, conscient de sa valeur mais jamais hautain, avec qui il était impossible de discuter sérieusement pendant plus de deux minutes sans que ça dégénère en jeux de mots et plaisanteries de tout genre. Un vieux monsieur toujours jeune, qui voulait absolument qu'on l'appelle "Jojo", et que je n'ai jamais suffisamment remercié d'avoir autant contribué à mon amour de la lecture et probablement à mon envie d'écrire.

Merci, Monsieur Jojo.

lundi 22 octobre 2012

Repas à six

Une troisième chaise haute ultra-solide est arrivée d'Allemagne vendredi. Du coup, ce weekend, nous avons pris nos premiers repas à six autour de la table. Certes, le Petit avait mangé auparavant, mais comme il râlait quand on le mettait par terre, nous l'avons pris avec nous et lui avons donné un morceau de pain dur à ronger, pour l'occuper. En semaine, je fais trois services (petit-moyens-grands), mais le weekend, nous mangeons de plus en plus souvent avec les Things. Et donc, à partir de maintenant, avec le benjamin de la famille.
Disputes et fous-rires, caprices et câlins.
Parfois, on se serait cru dans un asile de fous, et deux minutes plus tard, on aurait pu tourner une pub pour l'ami-du-petit-déjeuner, ou Nutella, ou Kinder, ou n'importe quel aliment qui rend les familles heureuses, unies, en bonne santé, et mortes de rire.
En revanche, Darling et moi avons renoncé à avoir une conversation sérieuse à table pour les vingt années à venir. Au moins. Mais ça tombe bien, nous n'avons pas grand-chose de vraiment sérieux à nous dire.

dimanche 21 octobre 2012

Dans la foulée

Il y a deux ou trois jours, le Petit a enfin compris comment s'asseoir. L'équilibre n'est pas encore impeccable, mais ça devrait venir très vite.
Hier, après avoir perfectionné sa technique pendant quelques semaines, il a appris à marcher à quatre pattes pour de bon. Il en a profité pour faire le tour de l'appartement.
Aujourd'hui, il s'est mis debout pour la première fois, en s'agrippant à la couette qui pendait du lit du Grand.

Mardi, il vient faire un petit footing de dix kilomètres avec moi ?

samedi 20 octobre 2012

Course à pied

Après la grossesse et l'accouchement, il a fallu attendre la fin de la rééducation périnéale : sport interdit avant.
Après la rééducation périnéale, il a fallu attendre l'entrée en crèche : je n'allais pas courir avec le gamin dans le porte-bébé.
Après l'entrée en crèche, il a fallu attendre le sevrage : je ne rentrais plus dans mes soutiens-gorge de sport, et c'était déjà la taille maximale chez Decathlon (chez Go Sport, ils m'avaient envoyé sur les roses).
Après le sevrage, il a encore fallu attendre la fin des engorgements et désagréments divers.

Je me suis mise à la course à pied en 2008, sur les conseils de Darling, tout en étant convaincue que je détesterais ça. J'ai très vite accroché. Six mois plus tard, je faisais ma première course officielle de 10 km. J'en ai beaucoup fait pendant deux ans. Puis j'ai enchaîné des soucis de santé, la gestation des Things, l'allaitement, une nouvelle grossesse quelques mois plus tard, avec un agenda professionnel plein à craquer par-dessus le marché. Autant dire qu'au cours des dernières années, je n'ai pas eu beaucoup d'occasion de pratiquer régulièrement, ou même de pratiquer tout court.

Et puis hier, j'ai décidé que c'était le moment de m'y remettre.

Je me suis levée presque gaiement, j'ai petit-déjeuner sur le pouce, j'ai changé les trois couches et habillés les trois petiots, j'ai expédié lesdits petiots à la crèche avec Darling, et je me suis préparée. Le soutif : c'est bon, je rentre. Les vêtements : un peu serrés, mais on s'en fout. Les chaussures : bon sang, mais où sont-elles ? Ah, oui, ensevelies sous toutes les autres. La clef : bien coincée dans la poche intérieure. Le mouchoir : dans le soutif, à portée de main. Un billet de dix euros : on ne sait jamais, une entorse, besoin d'un taxi... Et ma carte Vélib' ? Introuvable. Tant pis pour ma carte Velib', je ferai une boucle au lieu d'aller le plus loin possible et de rentrer en vélo. Pas de lecteur MP3, pas aujourd'hui, il va falloir que je me concentre sur ma respiration. Pas de cardio-fréquencemètre pour vérifier où j'en suis , je ferai de l'endurance, ce sera déjà bien si je tiens plus de dix minutes. Allez, hop, c'est parti !

J'ai couru un peu plus de six kilomètres. Cinquante minutes, en comptant deux petites pauses pendant lesquelles j'ai marché. Pas de point de côté, pas de crise cardiaque, pas même d’essoufflement majeur. Je suis heureusement surprise de m'en être si bien sortie, même si j'avais déjà constaté que recommencer après des mois ou des années d'interruption n'équivalait pas du tout à repartir de zéro. Des étirements par acquit de conscience, une bonne douche, une tasse de thé vert fumante, une certaine lassitude dans les membres, une grande satisfaction, la vie est belle, je suis fière de moi, je suis ravie, tout va très bien !


Ça, c'était hier. Aujourd'hui, je peux à peine me lever de ma chaise tant je suis moulue par les courbatures.

Allez, demain, j'y retourne.

vendredi 19 octobre 2012

Ça va banquer !

Ma banque, dans laquelle je suis depuis que ma mère m'a ouvert un compte quand j'étais petite ; c'est dire si je suis une cliente fidèle. Rendez-vous avec ma conseillère (la quatrième en trois ans).
On m'a bien dit que cette banque était une des plus chères et moins flexibles du marché, mais vu la manière dont on m'a reçue dans cette autre banque, j'ai décidé que ce serait plus simple d'aller là où on me connaissait déjà.


— Bonjour, Madame. Alors voilà : je suis sur le point d'acheter une maison à X00.000 euros, et j'ai un appart de X50.000 euros à vendre, donc ça couvre aussi les frais de notaires. Je voudrais un prêt-relais.
— Vous avez un apport personnel ?
— De l'argent de côté, vous voulez dire ? Ben non. Pourquoi ?
— Parce que c'est indispensable. Ça doit représenter au minimum l'équivalent des frais de notaire. A la rigueur, on peut vous aider à le financer en partie, en vous faisant un prêt à la consommation très très cher avec des conséquences très très lourdes, mais il faut que je demande l'autorisation de mon directeur.

(Allons bon. Ça commence mal. Mais Darling a un frère cossu qui devrait pouvoir nous prêter ça officieusement. Vive la famille.)

— Bon, alors admettons que j'aie un apport personnel.
— Très bien. Alors je vais vous faire un prêt-relais qui couvre 70% de la valeur la plus basse estimée par les agences.
— Comment ? Mais ça ne va pas suffire !
— Pas de problème, on vous fera aussi un prêt immobiliser sur vingt ans pour couvrir la somme restante.
— Mais qu'est-ce que ça change ?
— C'est plus sûr. Et puis le taux d'intérêt du prêt immobilier est supérieur à celui du prêt-relais, nous y gagnons.

(Ah. Je vois.)

— Bon. Alors admettons que je prenne un prêt-relais ET un prêt immobilier. Je rembourserai les deux quand j'aurai vendu mon appartement.
— Ah, mais attention, si vous remboursez trop tôt, il y a de grosses pénalités. Et puis de toutes façons, chez nous, il est interdit de rembourser les prêts immobilier avant cinq ans.

(C'est à ce stade de la conversation que j'ai décidé de changer de banque.)

— Bon. Alors admettons que j'aie un apport personnel, et que je prenne un prêt immobilier dont je n'ai absolument pas besoin, et que je ne le rembourse pas tout de suite. Quand j'aurai vendu mon appartement, il me restera de l'argent, du coup. Qu'est-ce que j'en fais ?
— Vous pouvez le placer chez nous, à des taux très avantageux.
— Vraiment ? Meilleurs que ceux du prêt immobilier sur vingt ans que vous m'obligez à prendre ?
— Ah non, bien sûr que non ! Sinon, quel serait l'intérêt pour nous ?

( C'est bien ce qui me semblait.)

— Bon. Alors admettons que j'aie un apport personnel, que je prenne ce prêt immobilier, que je ne vous rembourse pas trop tôt, et que je place l'excédent ensuite. Maintenant, c'est bon ?
— Vous allez pouvoir payer les intérêts du prêt-relais ? C'est une grosse somme.
— Ben, oui, quand j'aurai vendu mon appart, j'aurai plein d'argent – emprunté –, du coup...
— Ah non, je suis désolée, il va falloir les payer mensuellement.
— Ah bon ? Mais on ne peut pas payer les intérêts à la fin, en même temps qu'on rembourse le prêt-relais ? C'est ce qui se fait habituellement, non ?
— Si... mais pas chez nous.

(Elle me cherche, là.)

— Bon. Admettons donc que j'aie un apport personnel, que je prenne un prêt immobilier, que je ne le rembourse pas trop tôt, que je place l'excédent, et que je paie les intérêts mensuellement. Vous me le faites, maintenant, ce prêt-relais, oui ou non ?
— Alors, voyons voir... Vos ressources... Les avis d'imposition... Les impôts fonciers... Les estimations des agences... La somme à emprunter... Les taux du prêt-relais... Oh ! Il y a un problème.
— Encore ? Lequel ?
— Comme les intérêts du prêt-relais sont très élevés, ça vous fait un taux d'endettement à 60%.
— ... ?
— Autrement dit, les intérêts couvrent 60% de vos ressources.
— Ah... et alors ?
— Alors on ne peut pas faire de crédit quand le taux d'endettement dépasse 30%.
— Mais... ça ne sera que pour deux ou trois mois, tout au plus !
— Je suis navrée, mais l'ordinateur refuse d'aller plus loin. Je peux faire autre chose pour vous ?


J'avais bien une réponse toute prête, mais je suis polie.

jeudi 18 octobre 2012

Contradiction

J'aime bien cette auteure, mais décidément, elle écrit trop vite.
"Il lui lança un regard noir et sortit de la pièce en l'ignorant complètement."
Faudrait savoir : il la regarde de travers, ou il l'ignore ?
Et c'est toujours au traducteur de régler ce genre de problème a posteriori...

(Et encore, ça, ce n'est rien. Chez mes collègues qui traduisent à la chaine des romans sentimentaux écrits avec deux pieds gauches, j'en connais qui ont déjà dû se dépatouiller avec un personnage qui mourait, au grand désarroi de l'héroïne, et se portait comme un charme quelques pages plus loin... Ou avec une île grecque dont les habitants parlaient tous couramment l'italien... Ou avec des personnages qui partaient deux mois et trouvaient au retour le fils des voisins plus âgé de deux ans... etc. !)

mercredi 17 octobre 2012

Cauchemar (suite)

Peut-être pour faire plaisir à la commentatrice qui m'a réclamé "la suite" dimanche dernier, j'ai fait un nouveau cauchemar, cette nuit. On annonçait la fin du monde (oui, rien que ça), et le soleil disparaissait. Ce qui, dans un premier temps, ne posait pas de problème particulier, sauf qu'il faisait toujours nuit. Du coup, des milliers de gens mettaient fin à leur jour en se jetant par la fenêtre ; ça rendait d'ailleurs la circulation dans la rue assez difficile.

Je pense que ça a quelque chose à voir avec le poème que récite en boucle ma mère à chaque fin d'été : "Bientôt nous plongerons dans les froides ténèbres..."*

Cela dit, je vous rassure, je trouvais ça beaucoup moins angoissant qu'avoir douze bébés dans une maison en ruine. Et d'ailleurs, personnellement, je ne déteste pas l'hiver, malgré le manque de lumière, du moment qu'il n'est pas éternel...
(Et puis c'est bientôt Noël !)



*Pour ceux qui ne l'ont pas entendu chaque année depuis le berceau, c'est un poème de Baudelaire :
Bientôt nous plongerons dans les froides ténèbres ;
Adieu, vive clarté de nos étés trop courts !
J'entends déjà tomber avec des chocs funèbres
Le bois retentissant sur le pavé des cours.

Tout l'hiver va rentrer dans mon être : colère,
Haine, frissons, horreur, labeur dur et forcé,
Et, comme le soleil dans son enfer polaire,
Mon coeur ne sera plus qu'un bloc rouge et glacé.

J'écoute en frémissant chaque bûche qui tombe ;
L'échafaud qu'on bâtit n'a pas d'écho plus sourd.
Mon esprit est pareil à la tour qui succombe
Sous les coups du bélier infatigable et lourd.

Il me semble, bercé par ce choc monotone,
Qu'on cloue en grande hâte un cercueil quelque part.
Pour qui ? - C'était hier l'été ; voici l'automne !
Ce bruit mystérieux sonne comme un départ.

mardi 16 octobre 2012

Tapioca

C'est la première fois de ma vie que je fais du tapioca (ou "perles du japon"), et aussi la première fois que j'en mange. C'est tout simple, en fait, comme du riz au lait (dans ma recette, il y avait aussi du lait de coco et des épices ; j'imagine qu'on peut imaginer des tas de variantes), et ce n'est pas mauvais, avec une texture un peu bizarre, un peu gélatineuse, un peu caoutchouteuse, mais aussi moelleuse... J'ai terminé sans peine mon ramequin, et Darling a adoré. J'en referai, avec d'autres saveurs.

Cherchant d'autres recettes sur Marmiton, je suis ensuite tombée sur ce commentaire qui m'a interloquée :
"Je me suis trompée dans la recette, au lieu de 2 cuillère à soupe de tapioca, j'en ai mis seulement 2, et c'est aussi bon !"
Ce qui est assez logique, quand on y pense.

Rangement

Aujourd'hui, ménage dans le salon, avec rangement de tout ce qui traînait des jours ou des semaines : les cartons à descendre à la cave, la pile de livres sur l'imprimante, les tonnes de documents sur le tabouret, les cinq sacs en plastiques accrochés à la poignée de porte, les deux boîtes de mouchoirs vide sur le canapé, les chaussures dans un coin, les magazines entassés par terre, et bien sûr, les jouets éparpillés partout.
Quand Mr Thing Two rentre de la crèche, il s'arrête sur le seuil, éberlué :
— Oh ! C'est tout nu !
Je crains de l'avoir déjà rendu incapable d'apprécier un jour le style minimaliste.

(Notez bien qu'il sait dire "tout propre", ou plutôt "trou tropre" ; c'est vraiment le dépouillement tout relatif de cette pièce ultra-pleine qui l'a impressionné. Disons que pour une fois, on voyait le plancher, quoi.)

dimanche 14 octobre 2012

Cauchemars de circonstance

Lever à 6h45 après une mauvaise nuit – de toutes façons, j'enchaîne les mauvaises nuits depuis quelques semaines... quelques mois... quelques années, en fait. Sauf que là, cette fois, ça fait une nuit de trop. Je n'arrive même pas à garder les yeux ouverts. Donc après avoir expédié quelques tâches indispensables (ce qui nous mène à 9h) et avoir convaincu Mr Thing Two de me lâcher (ce qui nous mène à 10h – je ne sais pas ce qui lui a pris, il restait collé à moi, il a même fait les cent pas avec moi dans le couloir, agrippé à mon pantalon, tandis que je berçais le Petit), je souhaite bonne chance à Darling et je retourne au lit pour une petite sieste.

Une petite sieste assez agitée. En effet, j'ai rêvé que j'avais douze enfants, tous bébés, tous plus ou moins du même âge (des duodéctuplés, j'imagine ?), à tel point que je n'arrivais pas à les reconnaître et encore moins à me rappeler leurs noms. En plus, certains d'entre eux étaient très moches ; je soupçonnais le personnel de la crèche de profiter de mon état de confusion pour me refiler les gamins les plus laids de la section, ni vu ni connu.
Mais ce n'était pas tout. Nous vivions dans la maison que nous espérons acheter prochainement, et je m'apercevais – un peu tard – qu'elle tombait en ruine. Un pan de mur s'écroulait, le toboggan dans le jardin (en vrai, il n'y en a pas) basculait sur le côté, le lit à baldaquins (idem !) s'effondrait, etc. Et tandis que j'essayais malgré tout de m'en sortir, les larmes aux yeux, toute seule avec mes douze braillards dans une baraque délabrée, quelqu'un sonnait à la porte pour m'informer que tout le quartier allait être rasé pour construire un parc, ah bon, le vendeur ne vous avait pas prévenu ?

Rarement ai-je été aussi contente de me réveiller dans un appart trop petit avec quatre mômes surexcités un dimanche pluvieux.

samedi 13 octobre 2012

Coucou les jumeaux !

Quand on a des jumeaux, tout le monde vous le dit et vous le répète, il faut faire bien attention de ne pas les traiter comme une entité unique. Ce sont deux individus, différents, avec chacun ses besoins propres, blablabla patati patata. Bon, on vous tient surtout ce discours quand ce sont des monozygotes (ou "vrais" jumeaux), mais c'est valable aussi pour les autres. Même quand il y a une fille et un garçon, gare à vous si vous leur mettez les mêmes vêtements, si vous leur faites tout faire en même temps, et surtout, surtout, si vous les appelez "les jumeaux". Ah non. Ça, faut pas. Jamais. Vilain.

Nous avons donc fait très attention à ne pas céder à cette facilité de langage. Jusqu'à il y a quelques mois, c'était relativement simple : quand on avait la flemme de dire "Miss Thing One et Mr Thing Two" (leurs vrais prénoms, quoi), on disait "les bébés", ou "les petits". Depuis l'arrivée du Petit, c'est plus compliqué. On se retrouve souvent à dire quelque chose comme "Je vais y aller avec les petits, je veux dire les moyens, enfin les ju... non, bref, les deux zigotos, les Things, quoi !"
Ce qui ne nous fait guère gagner de temps, j'en conviens.

Et puis l'autre jour, à la bibliothèque, je suis tombée sur ce bouquin que j'avais déjà repéré il y a quelques mois, à l'époque où les Things étaient encore trop petits pour ce genre d'album : Coucou les jumeaux de Charlotte Voake, traduit par Anne Krief (Gallimard, 2006). Un livre très court et simple, avec quelques stéréotypes (la fille construit une tour, le garçon la démolit), mais qui tombent assez juste : Miss Thing One est d'ailleurs tombée en arrêt devant le dessin de la gamine qui suce son pouce, rêveuse, pendant que son frère dévore le contenu de son assiette. Quelques phrases courtes pour expliquer que Charlotte et Simon, quoique jumeaux, ne se ressemblent pas, mais que ça ne les empêche pas d'être heureux ensemble. Un bon petit bouquin, et un des rares à être consacré à des jumeaux dizygotes, souvent oubliés de la littérature.

Je leur ai donc lu, toute contente, anticipant leur émerveillement à voir reproduite pour la première fois dans un livre leur propre situation.
Résultat ?
J'ai fait un flop.
Ils m'ont écouté avec un intérêt poli, voilà tout.
Et c'est alors que j'ai réalisé que Darling et moi-même, mais aussi les employées de la crèche, les autres membres de la famille, les amis, etc. avons si bien suivi la consigne de ne surtout pas les appeler "les jumeaux" qu'ils ne connaissent pas ce mot, et ne savent donc pas du tout que leur situation est particulière.

Je crois qu'on mérite dix sur dix pour la différenciation. C'est bien, ça fera remonter notre moyenne générale de parents indignes.

vendredi 12 octobre 2012

Goûter réconfortant

Un des GROS avantages du travail à la maison...

... c'est que le goûter, même pris devant l'ordinateur, à tout de même plus de classe que le triste petit-beurre / thé dans un gobelet en plastique auquel on est abonné au bureau.

(De gauche à droite : un shortbread, un brownie, et un speculoos – pas tous faits le même jour ! Et derrière, un chocolat chaud mousseux. Oui, j'avais faim, aujourd'hui.)

jeudi 11 octobre 2012

Journée de travail (ou presque)

Lever à six heures et demie, après une mauvaise nuit.
Trois biberons, trois couches, cinq petit-déj, huit chaussettes, etc.
Départ à huit heures et demie avec les trois plus jeunes, que je conduis à la crèche.
De là, je me rends directement à la banque, où j'ai rendez-vous.
Deux heures de montages financiers abracadabrants s'ensuivent.
Sur le chemin du retour, passage par la librairie où j'ai commandé des albums pour les Things.
J'arrive enfin à la maison, je déjeune.
Tri du linge, lessive, pliage de la lessive précédente, et plus tard nouvelle lessive, nouveau pliage, etc.
Le lave-vaisselle à vider, un peu de rangement à faire, deux coups de fils à passer, trois emails à écrire, des papiers à classer.
Quatre heures et demie, le Grand rentre avec un copain.
Je pars à la crèche récupérer les trois autres.
Bains, dîners, etc.
Neuf heures, les quatre enfants dorment, j'explique longuement à Darling ce que m'a raconté la banquière.
Dix heures et quart. J'ai prévu d'aller me coucher à 22h30, car je suis tellement fatiguée que j'ai eu plusieurs fois le tournis aujourd'hui.
Qu'est-ce que je fais de ce quart d'heure de liberté ?

Je pourrais peut-être... travailler ? Traduire ? Le truc que je suis censée faire au moins sept heures par jour ? L'activité à laquelle je n'ai pas pu consacrer une seule seconde aujourd'hui ?




Non, allez, je vais plutôt bloguer.

(A ce train-là, je vais être en retard non seulement sur cette traduction, mais aussi sur toutes les suivantes jusqu'en juin...)

mercredi 10 octobre 2012

Traduction casse-gueule

Je reçois des petits albums à traduire, présentant des animaux qui ont perdu une partie de leur corps : leur queue, leur patte, etc. Une petite roue à faire tourner permet de leur rendre leurs éléments égarés.
My tail, se nomme le premier, que je traduis logiquement par "Ma queue".
My foot, s'intitule le deuxième, que je traduis bien sûr par "Ma patte".
My fur, s'intitule le troisième, que je traduis évidémment par "Mon pelage".
Quant aux quatrième, il s'intitule My mouth.
Or, l'animal représenté en couverture est un crocodile.
Quelque chose me dit que si je lui propose "Ma gueule", l'éditrice va tiquer...

mardi 9 octobre 2012

Une voleuse déconcertante

Comme je l'espérais très fort, la personne qui a volé mon portefeuille il y a quelques jours s'est empressé de s'en débarrasser après avoir fait son choix dans ce qu'il contenait. J'ai donc pu aller le récupérer aux objets trouvés. Quand je l'ai examiné, j'ai été un peu surprise de voir ce qui manquait (en plus de l'argent liquide, bien sûr) :
- ma carte bleue sur mon compte personnel, mais pas la carte bleue du compte joint ;
- ma carte vitale, mais pas ma carte de mutuelle ;
- une petite aquarelle de Darling, mais pas la photo de mes gamins ;
- ma carte électorale, mais pas ma carte d'identité ni mon permis de conduire ;
- ma carte de fidélité à la librairie du quartier (!), mais pas ma carte de fidélité IKEA ;
- ma carte de bibliothèque (!!), mais pas ma carte vélib.

Une voleuse qui aime les livres, peut-être ?

lundi 8 octobre 2012

On ne prête qu'aux riches

Rendez-vous avec un banquier. J'explique que je vais acheter une maison, que je vais vendre mon appart, blablabla, que je voudrais en profiter pour changer de banque car la mienne est nulle, blablabla, et qu'il va me falloir un prêt, d'un montant très raisonnable, blablabla.
Le monsieur examine mes documents, réfléchit, va voir un collègue, discute longuement, et revient :
— Alors, je regrette de vous dire que nous ne pourrons pas vous accorder ce crédit.
— Vraiment ? Mais ce n'est pas énorme, pourtant !
— C'est vrai, mais c'est trop dangereux de faire un prêt à une personne dont on ne connaît pas l'historique bancaire.
— Et si je vous montre tous mes relevés depuis quinze ans ?
— Non, ça ne suffit pas. Nous ne pouvons pas prendre ce risque. Je vous conseille de vous adresser à votre propre banque, qui n'a aucune raison de refuser.
— Bien sûr, je l'ai déjà fait, et j'ai déjà leur accord de principe, mais ils sont très chers et peu flexibles !
— Peut-être, mais vous aurez votre crédit. Et ensuite, quand vous aurez tout remboursé, n'hésitez surtout pas à revenir nous voir : nous serons très heureux de vous accueillir parmi nos clients.

Donc quand je n'aurai plus besoin d'eux, ils seront ravis de me rendre service.
Il se fichait de moi, vous croyez ?

dimanche 7 octobre 2012

Doltoïenne

C'est bien connu, il faut leur parler, leur dire ce qui va se passer, même si on a l'impression qu'ils ne nous comprennent pas. 

Une semaine avant :
"Dans une semaine, je vais partir en weekend. Je serai absente trois jours, et puis je reviendrai. Seulement trois jours. Ce n'est pas très long."
Deux jours avant :
"Je vais bientôt partir. Je l'avais déjà dit, pas vrai ? Je serai absente trois jours. Trois journées et trois nuits sans moi, et puis je reviendrai. Vous vous débrouillerez tous très bien sans moi."
La veille :
"Je pars demain matin. C'est bien compris ? Je ne serai pas là pendant trois jours. Je ne pourrai pas m'occuper de tout. On pourra se parler au téléphone le soir, c'est tout. Mais je reviendrai au bout de trois jours. D'accord ?"


Néanmoins, j'ai beau le lui répéter tous les jours depuis une semaine, je ne suis pas sûre que Darling ait réalisé que je partais demain matin pour trois jours.

samedi 6 octobre 2012

Concis

Opération Nuit Blanche à Paris. Comme tous les ans, je laisse Darling à la maison et je sors avec le Grand, bravant la pluie et ma fatigue. Nous grimpons en haut de l'Institut du Monde Arabe, nous profitons du son et lumière futuriste de Jussieu, nous admirons les danseurs du bord de Seine, nous prenons un thé à la menthe et des pâtisseries orientales à la Mosquée...
De retour à 23h15, nous trouvons Darling qui nous attend. Il veut savoir ce que nous avons fait. Je proteste :
— Il faut qu'il aille se coucher, il est horriblement tard !
— Oh, allez, rapidement ! Vous m'en direz plus demain matin, mais racontez-moi un peu ce que vous avez vu !
— Bon, mais en deux mots, alors ! Vas-y, mon grand, dis à Papa comment c'était...
— Très bien.
Il ne m'a jamais obéi aussi scrupuleusement.

vendredi 5 octobre 2012

Visites de maison

En dehors de celles que nous n'avons pas visitées (trop loin, trop chères, trop petites, déjà vendues...), nous avons vu, dans des banlieues pas trop moches, et à une distance raisonnable de Paris :
- Un loft avec un séjour où on pourrait caser tout mon appart, mais avec des chambres très mal fichues et plein de travaux à prévoir ;
- Une petite maison en plein centre-ville, mignonne comme tout, mais avec un séjour encore plus petit que celui que j'ai actuellement et une chambre de bébé trop courte pour y caser un vrai lit d'enfant ;
- Une maison complètement biscornue pour causes de réaménagements successifs, avec un bureau dans le garage, une entrée dans la cuisine et une autre dans une chambre, et où je me perdais complètement ;
- Une grande maison avec seulement trois chambres, mais dans laquelle l'agent immobilier m'a juré qu'on pouvait réaménager le sous-sol et y faire des chambres et une salle de bain pour maximum 15.000 €, "mais si madame, il n'y a que l'isolation et l'électricité et les murs et la plomberie à faire, c'est tout" ;
- Une grande maison qui avait l'air parfaite sur le papier, grand jardin, secteur OK, pleins de pièces, mais que Darling et moi avons tous deux trouvé déprimante ("On dirait une vieille école des années 70 désaffectée", a dit Darling) ;
- Une maison sans charme mais fonctionnelle avec des combles soit-disant aménageables... pour peu qu'on rehausse le toit.

Et puis une maison très chic, un peu trop bourgeoise à mon goût, mais jolie, refaite à neuf, qui répond à tous nos critères, ou à peu près : le bon nombre de pièces (mais petites), un jardin (mais réduit et orienté au Nord), un grand salon (mais donnant sur une cuisine trop étroite), une terrasse (mais pas terminée), deux salles de bain (mais pas de toilettes séparées), un grand sous-sol (mais trop bas de plafond pour Darling), et même une cheminée. Et le RER à dix minutes. Et même une biocoop pas trop loin.

Nous avons fait une offre.
Et le propriétaire a eu la mauvaise idée de l'accepter.

Au secours !

(On respire. On respire. On respire...)

Il ne faut pas jouer avec le feu...

... ni laisser les couteaux traîner trop près de la gazinière.


Vous saviez que ça ne fait pas que fondre, le plastique ? Que ça peut aussi faire des flammes ? De drôles de flammes bleues, basses et lentes. C'était si joli que je ne l'ai pas éteint tout de suite.
(Dans ma future grande maison de 300 mètres carrés à deux minutes de Paris et dix mètres du métro, mais si, j'espère bien qu'il y aura une cheminée. J'adore ça !)

jeudi 4 octobre 2012

Demeure de charme

— Oui, allô, je téléphone pour l'annonce sur Demeures de charme.
— Ah, ouais. Qu'est-ce que vous voulez savoir ?
— Eh ! bien, vous pouvez m'en dire un peu plus sur la maison ?
— Six chambre, un salon super-grand, un jardin, blablabla...
— En effet, ça a l'air de correspondre tout à fait ce que je cherche. Et les photos sur le site donnent vraiment envie. Et le quartier ?
— Ben, comme c'est marqué sur l'annonce, le RER est tout près...
— Mais c'est dans quelle ville, exactement ? Vous ne dites pas quelle est la station de RER.
— C'est à Machintruc.
— Ah ! C'est plus loin que je le croyais. Et, heu... c'est comment, comme coin ?
— Oh, ça va, quoi.
— Y a-t-il des crèche, des écoles ?
— Oui... Il y a un bon collège pas très loin, à vingt minutes, un collège privé.
— Ah... et des commerces ?
— Ben, il y a une boulangerie à cinq minutes de la maison, et puis sinon, il y a le Carrefour, sur la nationale.
— ...
— Vous voulez la visiter ? C'est à moins d'une heure de Paris, quand le RER fonctionne.
— Heu, heu, heu, je vais y réfléchir... Je vous rappellerai...
(Ou pas.)

mercredi 3 octobre 2012

Première déchirure

Mr Thing Two regarde un livre de Mimi la souris, puis le laisse au beau milieu de la pièce. Hélas, pour une fois, le Petit n'est pas enfermé dans son parc. Et depuis une quinzaine de jours, il a appris à ramper. Quant à moi, je suis en train de petit-déjeuner, et je me concentre sur ma tartine.
La suite est aisée à deviner. Une voix outrée me fait me retourner :
— Ah non ! L'est vilaine, Fifil* ! Pas décirer lire ! Pas geontil !
C'est Mr Thing Two qui chapitre son frère, car celui-ci a fait de la charpie avec la page 6 du livre.
J'interviens, j'explique qu'il ne l'a pas fait exprès, je ramasse tous les morceaux, je promets de les recoller. Sauf que je n'en trouve que deux, bien froissés. Il manque un petit bout de l'image. Où est passé la jupe de Tallulah ? Quelqu'un a vu la jupe de Tallulah ?

C'est le pédiatre qui l'a retrouvée, presque deux heures plus tard, collée au palais du Petit. Un beau morceau de papier de deux ou trois centimètres carrés, que l'enfant n'avait visiblement pas réussi à avaler. Trop gros, trop dur, trop difficile. Mais je ne me fais aucun soucis : ça viendra.

*C'est ainsi qu'il appelle son frère. Non, ne cherchez pas.

J'en tiens une couche (et même deux)

La dernière fois, j'avais oublié le sucre. Cette fois-ci, c'était la levure. Je m'en suis rendu compte juste avant d'enfourner. Je l'ai ajoutée in extremis, et j'ai vaguement mélangé, sans trop oser racler le fond de peur que ça attache (pour une fois, j'avais beurré le moule).
Résultat : un gâteau original.
Une couche aérée sur une couche bien dense, le tout avec un bon goût d'amandes et de cirtron.
— Ah bon, ce n'était pas fait exprès ? s'est étonné le copain du Grand en se resservant une troisième part.

La prochaine fois, que pourrais-je bien oublier ? La farine ?

mardi 2 octobre 2012

Déménagement : les prémices

Je vous ai déjà expliqué que le Petit dormait dans un placard, que mon salon était devenu un hall de gare ou presque, et que les Things n'arrêtaient pas de se réveiller mutuellement pendant la nuit ou à la sieste.
Il faut dire que l'appartement où nous vivons a été acheté du temps où nous étions, disons, deux et quelques. Nous y avons vécu à trois pendant huit ans, et c'était parfait. Ensuite, en moins de deux ans, le nombre d'habitants a doublé. Ce n'est plus parfait.
Conclusion ?
Après avoir résisté aussi longtemps que possible, il faut bien se rendre à l'évidence : nous devons déménager.
Et puisque j'ai assez peu de chance de trouver un sept pièces (si si, cinq chambres + un séjour + un bureau, j'ai déjà compté environ 74 fois, ça fait bien sept pièces) dans mon quartier au même prix que mon quatre pièces, on passe le périph. En d'autres termes, moi, la parisienne pure et dure, je vais devenir banlieusarde.
Non non, ne vous inquiétez pas, je le vis très bien. Je vais même peut-être bientôt arrêter les antidépresseurs.

Blague à part, tant qu'à déménager, autant essayer de trouver 1-plus grand (ça, c'est le minimum), 2-sans voisins qui nous haïssent car nous faisons trop de bruit (trop de quoi ?), 3-avec un jardin où envoyer courir les mômes surexcités (même par -10° : un môme surexcité n'a jamais froid), 4- à proximité d'une ligne de métro ou de RER qui fonctionne correctement (histoire que Darling ne rentre pas à neuf heures du soir les jours où il fait la fermeture du magasin, le pauvre) (ou plutôt, qu'il ne se la coule pas douce pendant une heure à bouquiner dans son train pendant que moi je me bagarre avec les-bains-les-devoirs-les-repas-les-dents etc.). Et puis 5-disponible pour un déménagement l'été 2013 (pas avant, sinon je vais devoir emmener les gamins à la crèche et à l'école en RER, non merci) (mais pas après, car il faut que je fasse les inscriptions au collège / école maternelle / crèche à temps). Ah, et puis 6-pas trop cher.
On y croit. Je suis pleine d'optimisme. Pas stressée du tout. Où est ma tablette de chocolat ?

Tout ça pour dire que je me suis lancée avec délectation dans les visites de maisons, les rendez-vous avec des banques, les estimations de mon appart par des agents immobiliers, les recherches sur Internet, etc. J'y passe au moins trois matinées par semaine, mais ce n'est pas grave, ce n'est pas comme si j'avais quatre gamins et un travail à plein temps, non plus. Tout va bien.

Bref, j'inaugure donc aujourd'hui sur ce blog la rubrique "déménagement", qui sera sans doute aussi riche en péripéties joyeuses et événements plaisants que la rubrique "grossesse". On dit merci qui ?

lundi 1 octobre 2012

Sevrage (coda)

J'ai du mal à y croire moi-même : lors de sa toute dernière tétée, le Petit a trouvé le moyen de me faire... une crevasse. Le genre de petit bobo de début d'allaitement que je n'avais pas eu depuis plus de cinq mois.

Ce que j'ai ressenti ce matin-là, ce n'était donc pas un pincement au cœur, mais un pincement tout court. Je comprends mieux, maintenant.

Il a probablement voulu être certain que je n'aurais aucun regret. Charitable enfant !