vendredi 30 novembre 2012

Lève-toi et marche !

Je vous ai déjà raconté qu'il y a quelques mois, pas très longtemps après la naissance du Petit, j'avais un jour perdu la tête face à trois gamins hurlants et allongé sur le coussin d'allaitement... Miss Thing One, qui s'était même tue de surprise face à ce traitement inattendu. Dans la série "Quand on a beaucoup de gamins on perd parfois la tête et on mélange tout, quoique prétendent les mythes sur la parentalité", voici le dernier épisode :

L'autre jour, dans un café, tandis que j'essayais désespérément de convaincre les trois plus grands de rester à peu près sages, Darling a voulu déposer le bébé qu'il tenait dans les bras pour me venir en aide... et il l'a mis debout par terre.
Autant vous dire que le Petit, huit mois, s'est immédiatement vautré sur le carrelage, et a protesté très vivement contre ce traitement.
Personne dans le café n'a dû comprendre pourquoi ces parents indignes étaient écroulés de rire devant leur pauvre bébé qui venait de se casser brutalement la figure.
(Heureusement, les Things ont distrait l'attention en vidant une étagère, et nous avons échappé au signalement auprès de SOS Enfance Maltraitée.)

Interprétation et automatismes

Comment faire rire une assemblée d'ados désoeuvrés qui sont venus en traînant les pieds rencontrer un auteur étranger au Salon du Livre Jeunesse de Montreuil, et qui se fichent complètement de ce que ledit auteur a à leur raconter, à tel point qu'ils regardent à peine les objets que celui-ci a apporté et n'écoutent pas ses plaisanteries ?
Faites votre travail d’interprète consciencieusement. Traduisez les interventions de l'auteur en français. Traduisez systématiquement les questions des ados dans la langue de l'auteur, même s'il comprend un peu le français. Ceci jusqu'à l'épuisement.
Et puis à un moment, quand l'auteur, après une question assez facile, mobilise ses connaissances de la langue française pour répondre dans cette langue, traduisez imperturbablement la phrase qu'il vient de prononcer dans sa langue à lui, micro à la main, en vous adressant aux ados qui vous font face.
Succès garanti.

jeudi 29 novembre 2012

Liégeoises ou pas ?

J'ai fait des gaufres liégeoises pour le Grand et ses copains qui viennent ponctuellement dévorer un goûter gargantuesque tous les jeudis.
Sauf qu'en fait, je n'ai jamais mangé de gaufres liégeoises de ma vie.
Alors oui, le résultat est plutôt bon, mais comment puis-je savoir si ça ressemble de près ou de loin à l'original ?

Je vais plutôt aller préparer des chocolats liégeois, tiens. En plus, je suis sûre que ça ira bien avec les gaufres.

(Une fois, j'avais fait un "bortsch" parce que j'avais des betteraves à écouler. Mais, là encore, je n'en avais jamais mangé ni même vu de ma vie. Ce sont mes invités qui se sont étonnés que ce soit si peu liquide. J'ignorais que c'était censé être une soupe...)

mercredi 28 novembre 2012

Caramels

— Que veux-tu pour Noël ?, m'a demandé ma grand-mère.
Quelques secondes de réflexion, et puis :
— Heu... je ne sais pas... un découpoir à caramels ?

À son silence interloqué, j'ai bien senti que ce n'était pas la réponse à laquelle elle s'attendait.
Ben quoi ? C'est drôlement cher, et ça me serait très utile pour découper toutes mes friandises carrées (caramels, mais aussi guimauves, millionaire's shortbread*, carrés au citron, nougats, etc.)
Si je demande un couvercle retourne-omelettes ou un lot de becs verseurs amovibles, je suppose que ce n'est pas beaucoup mieux ?

Bon, ben on va dire une participation à un weekend au ski, ou un billet pour un opéra, ou une paire de boucles d'oreille, ou le DVD de "Rebelle" que je n'ai pas pu voir, ou un porte-tickets de métro, ou le dernier Daniel Pennac, ou un guide des potagers en carrés...
(Mais c'est moins original, convenez-en.)


*Après des années de recherche et une demi-douzaine de recettes testées, j'ai enfin trouvé une variante de cette gourmandise incroyable qui me convient totalement. Pour ceux qui l'ignorent, le millionaire's shortbread consiste en une couche de sablé, puis une de caramel, puis une de chocolat. Mais non, ce n'est pas trop sucré. C'est même bon. Mais si on y ajoute des brisures de noix de pécan, ça devient vraiment très bon. Vraiment très, très bon. Vraiment vraiment...
(Fofo, reste assise. Pas de pâtisserie aujourd'hui. Tu as un chapitre à terminer d'ici ce soir.)

mardi 27 novembre 2012

Match de mère

Je croise une voisine, la seule autre de la résidence qui ait aussi quatre enfants, dont trois du même âge que les miens (plus une intermédiaire, puisqu'elle n'a pas eu de jumeaux). Nous nous dévisageons mutuellement. Paupières tombantes, teint brouillé, cheveux en bataille, vieux jeans informe, T-shirt enfilé à l'envers. Et chacune un bébé dans les bras, alors que normalement, à cette heure-là, ils sont tous les deux ensemble à la crèche. Je me lance :

— On dirait que tu ne dors pas beaucoup...
— Six heures par nuit, en moyenne.
— Ah ? Moi ça doit tourner autour de quatre ou cinq.
(Un point pour moi.)

— Qu'est-ce qu'il a, ton bébé ?
— Une gastro ET une otite. Et le tien ?
— Une gastro, une otite, ET une conjonctivite.
(Un point pour elle.)

— Et ta deuxans, toujours des colères ?
— De temps en temps. Elle nous en a encore fait une dimanche.
— Tu as de la chance. Miss Thing One en a fait une hier soir, et Mr Thing Two ce matin.
(Un point pour moi.)

— Sinon, ton Grand, ça va ?
— Bof, il n'est pas allé à l'école ce matin, je pense qu'il est au bout du rouleau, il faut dire que tout le monde dort mal. Mais à part ça, ça va. Et le tien ?
— Moyen, il a de grosses difficultés scolaires.
(Un point pour elle.)

— Et ton mari ?
— Un peu surmené, mais il tient le choc. Et Darling ?
— Oh, comme d'habitude, les maladies chroniques, les problèmes de sommeil, les maux divers et variés, la fatigue permanente...
(Un point pour moi.)

— Et ta traduction ?
— J'avais quatre mois pour la faire, il ne reste bientôt plus qu'un mois, et j'en suis à la moitié.
— Ah, c'est mal parti.
— On peut le dire. Et toi ?
— Ben, en plus de mon boulot à plein temps, je vais réessayer de passer ma thèse, puisque c'est la dernière année où je peux le faire, donc j'ai repris mon mémoire...
(Un point pour elle.)

— Bon, alors bon courage !
— Merci, à toi aussi. On va s'en sortir, hein, dis ?
— Mais oui, mais oui... Je crois... J'espère...

(Match terminé. Égalité.)

dimanche 25 novembre 2012

Santons

Plus qu'un mois avant Noël !
Pour fêter ça, le Grand et moi sommes allés avec quelques amis au marché de Noël des Champs-Élysées, à la recherche de nouveaux santons et d'une jolie couronne de l'avent, quête vaine qui m'occupe depuis des années. Toujours pas de couronne (oui, je sais que je pourrais en fabriquer une, sauf qu'en fait je ne peux pas, j'ai piscine), mais il y avait un santonnier Escoffier.
Ayant déjà, outre les indispensables et une demi-douzaine de spectateurs, la dame qui allaite (offerte par une amie) et la dame assise par terre à côté d'un enfant, j'ai hésité à prendre la bohémienne avec un bébé sur le dos, mais finalement j'ai choisi la lavandière, en souvenir de mes dix ou douze lessives quotidiennes.
Quant au Grand, il a choisi un personnage qui lui rappelait son père.
Un monsieur avec un gros tonneau de vin.

(A part ça, c'était sympa, même s'il n'y avait pas beaucoup de stands vraiment intéressants. Mais nous avons bien ri, nous avons mangé un très mauvais kebab et complété le repas par une crêpe au nutella, nous avons croisé une dame complètement bourrée juchée sur des talons hauts qui nous a demandé si nous voulions chanter avec elle, nous avons admiré des bijoux importables, et nous avons complété la sortie par un tour sur la grande roue de la place de la Concorde. Et en plus, il faisait beau. Un chouette dimanche.)

vendredi 23 novembre 2012

Charité bien ordonnée commence par soi-même

Je reçois un message me disant plus ou moins ceci :

Chère Madame,
Je m'appelle Viviane Vivemoi et je suis auteure de plusieurs romans formidables mais dont malheureusement aucun éditeur n'a jamais voulu, j'ignore pourquoi. Je les ai donc auto-édités, et à présent, j'aimerais les faire traduire en anglais pour en faire des philantrolivres, des livres dont la moitié des droits d'auteurs sont reversés à une association humanitaire. Comme je n'ai pas les moyens de financer ces traductions, je cherche des traducteurs bénévoles entre lesquels je répartirai la tâche. Bien entendu, si vous acceptez de participer, en plus d'aller au paradis pour avoir aidé les petits Biafrais, vous serez citée en dernière page en petit caractères dans les remerciements. Alors, ça vous botte ?

(J'ai modifié des éléments et le style de la lettre, mais pas le contenu de la proposition. Nom connu de la rédaction.)

Alors, en dehors du fait que 1) Faire traduire un livre découpé en petits bouts par pleins de traducteurs n'est pas l'idéal du point de vue de l'unité du style ; que 2) cette dame semble ignorer qu'on traduit toujours vers sa langue maternelle, et qu'elle ferait donc mieux de contacter des traducteurs anglais ; et que 3) je n'ai déjà pas le temps de faire les traductions pour lesquelles je suis payée (mais ça, elle ne peut pas le savoir, je vous l'accorde), il y a un petit truc qui me chiffonne :
Arrêtez-moi si je me trompe, mais cette dame demande à des inconnus de travailler gratuitement pour qu'elle puisse ensuite partager les bénéfices entre elle-même et les petits Mongols ?
En gros, c'est moi qui bosse, et c'est elle qui empoche ?
Elle souhaite être rémunéré par ses employés, c'est bien ça ? Comme si je demandais à une baby-sitter de me payer après avoir gardé mes gosses ?

Un peu chagrine, je lui fais remarquer que c'est bien gentil de parler de philanthropie, mais que personnellement je philanthrope toute seule sans son aide, merci bien, et qu'au moins, quand je donne quelques dizaines d'euros à une association humanitaire, il n'y en a pas la moitié qui est détournée au passage. Puisqu'elle souhaite faire preuve de générosité, pourquoi ne pas jouer le jeu jusqu'au bout ? Pourquoi ne pas reverser la totalité des bénéfices aux petits Mapuches ?

Réponse :

Chère Madame,
Si je diffuse mes livres gratuitement, je n'ai plus aucun revenu. Je suis auteure pour gagner ma vie.

Ah. Et moi, je suis traductrice pour passer le temps, quand je m'ennuie entre deux lessives ?

Vexée que je me méprenne à ce point sur ses intentions, elle a fini par se draper dans sa dignité :

Vous n'avez rien compris. D'accord, je profite de l'occasion pour gagner du fric sans bouger le petit doigt et essayer de me faire une renommée internationale. Mais ce n'est pas ça qui compte. Le principe est de partager les fruits de notre travail. C'est un point de vue philosophique (sic !). Mais bon, à chacun ses valeurs (re-sic !).

En effet.

jeudi 22 novembre 2012

Mon royaume pour une bonne nuit

Ça doit faire une semaine que je dors maximum quatre heures par nuit. Je ne sais pas ce qu'a le Petit, sans doute des dents qui poussent, à moins que ce soit des cheveux ou des ongles, mais il n'a jamais si mal dormi. Depuis plusieurs semaines, ça ne fait qu'empirer. Et dire que quand il était nouveau-né, j'ai cru que m'était enfin échu un bon dormeur.
C'est bien simple, j'en suis au point où j'ai parfois du mal à me rappeler comment je m'appelle. Alors mes enfants... (Je devrais faire comme quelqu'un de ma connaissance qui appelait à la fois sa femme et ses deux filles "ma chérie". Comme ça, aucun risque de se tromper.)

Depuis le sevrage, en octobre, je n'ai pas eu une semaine d'affilée avec des nuits correctes.
Enfin, maintenant que j'y pense, quand je l'allaitais deux fois par nuit, ce n'était pas formidable non plus.
Depuis mars 2012, je n'ai pas eu une semaine d'affilée avec des nuits correctes.
Remarquez bien qu'avant, enceinte, avec les impatiences et les envies de faire pipi et les crampes etc., on ne peut pas dire que je me reposais idéalement bien.
Depuis la rentrée 2011, je n'ai pas eu une semaine d'affilée avec des nuits correctes.
Cela dit, pendant l'été, les Things dormaient atrocement mal. Ceux qui ont passé quelques vacances avec nous s'en souviennent encore.
Depuis le printemps 2011, je n'ai pas eu une semaine d'affilée avec des nuits correctes.
Quoique l'hiver n'ait pas été mieux. Ils venaient de rentrer à la crèche, et étaient sans cesse malade. Je passais mon temps à faire les cent pas dans l'appartement au cœur de la nuit, un bébé dans les bras.
Depuis l'automne 2010, je n'ai pas eu une semaine d'affilée avec des nuits correctes.
Et avant ça, vous croyez que c'était le rêve ? Quand je les allaitais tous les deux, y compris la nuit ?
Depuis avril 2010, je n'ai pas eu une semaine d'affilée avec des nuits correctes.
Mais en y réfléchissant, une des pires périodes de ma vie a probablement été ma grossesse gémellaire. A côté de ce calvaire, mes autres grossesses ont été presque agréables, c'est dire. Dire que je dormais mal est un euphémisme.
Depuis l'été 2009, je n'ai pas eu une semaine d'affilée avec des nuits correctes.

Ça va faire bientôt trois ans et demi que je manque de sommeil.
Pas étonnant que je sois fatiguée...

mercredi 21 novembre 2012

Des lettres et des chiffres


"J'ai inventé une potion magique qui va me permettre de devenir cent fois plus fort. Avec ça, je vais être capable de porter cent fois mon propre poids ! Je pèse trente-cinq kilos ; je vais pouvoir porter jusqu'à trois cent cinquante kilos ! Je vais pouvoir soulever le lit de mes parents avec eux dedans !"

L'auteur a écrit ça, dans sa langue. Le texte a été relu par un correcteur, par un préparateur de copie, par un éditeur, par un directeur de collection (je mets tout au masculin, mais en réalité, dans l'édition jeunesse, il y a surtout des femmes). Puis le bouquin a été envoyé à cette maison d'édition française pour laquelle je travaille. Je l'ai lu, et une autre lectrice l'a lu. L'éditrice l'a acheté sur la foi de nos deux fiches positives et m'a confié la traduction. Je l'ai traduit. J'ai fait un premier jet, que j'ai retravaillé dans un second temps, puis j'ai re-relu le texte encore une fois avant de l'envoyer. Ma traduction a été relue par l'assistante de l'éditrice, par l'éditrice, par un correcteur, par un préparateur de copie. Il a été mis en page. J'ai reçu les épreuves. Je les ai re-re-relues.

Et ce n'est qu'à ce moment-là que j'ai repéré cette petite, cette minuscule erreur que personne n'avait remarquée avant moi.
Ce n'est pas pour rien que j'ai eu 17/20 en maths au bac, quand même.

mardi 20 novembre 2012

La plonge

D'abord, nous avons appelé un petit réparateur de quartier, pour aller plus vite. Il a examiné notre lave-vaisselle, a nettoyé un tuyau, resserré un boulon, réclamé 55 euros, puis est parti en nous lançant : "De toutes façons, il ne vaut rien, votre lave-vaisselle. Il n'y a qu'une seule bonne marque sur le marché, et c'est pas celle-là. Il ne va pas durer six mois, c'est moi qui vous le dit."

Six jours plus tard, exaspérés par cet engin qui bloquait au milieu de presque tous les programmes, nous avons téléphoné à Darty après avoir vérifié que le machin était encore sous garantie. Il l'était, mais le réparateur na mis une semaine à venir. Entretemps, l'appareil s'est mis en grève totale. Quand le réparateur a enfin daigné se montrer, il a démonté la bête, a vaguement retiré une petite pastille de plastique parce que "c'est peut-être ça qui bloque", puis est reparti. Le soir même, nouvelle panne. Nouveau coup de fil à Darty. Nouvelle attente de cinq jours.

Enfin, ce matin, le réparateur est revenu.Démontage, vérifications, réflexions, puis verdict :
— C'est votre pompe de vidange qui a un défaut d'étanchéité.
— Ah. Et c'est long à réparer ?
— Il faut la remplacer. Je vais vous en commander une.
— Oh, non ! Elle arrivera quand ?
— Ben, en fait, on pourrait déjà l'avoir demain, mais il faut aussi que je vous remplace le pied de l'appareil, et ça, c'est plus long.
— Le pied ? Pourquoi le pied ? Je n'y ai pas touché, au pied, moi !
— Je sais ; c'est moi qui l'ai cassé en basculant l'appareil pour réparer la pompe de vidange... Mais ne vous inquiétez pas, je vais vous le changer gratuitement. Vous êtes là la semaine prochaine ?


A part ça :
- La crèche est en grève aujourd'hui, j'ai donc les trois petits sur les bras
- J'ai dormi quatre heures la nuit dernière, guère plus les cinq ou dix précédentes
- Il y a une grosse fuite à mon lavabo
- Je viens d'apprendre qu'il allait falloir refaire entièrement l'électricité dans notre future maison
- Darling est malade, et moi-même j'ai ma à la gorge
- Je viens d'arriver à la moitié de ma traduction en deux mois de boulot, et il me reste un mois pour la terminer, ce qui pose un petit problème de calcul.

Et sinon, vous, ça va ?


lundi 19 novembre 2012

Prise de sang

J'avoue que, parmi les étapes du parcours du combattant que l'on nomme "obtenir un prêt-relais", je n'avais pas du tout pensé à la prise de sang.
Oui, je sais, dans le fond, c'est logique. Aucune banque n'a envie de prêter plusieurs centaines de milliers d'euros à quelqu'un qui peut passer de vie à trépas avant d'avoir remboursé un centime. Donc l'emprunt est assuré, et l'assurance vous envoie voir un médecin qui doit déterminer si votre "pronostic vital" est plutôt ouhlalapasbon ou ouaisbonçava. Pour compléter, on vous fait une prise de sang et une analyse d'urine qui permet de déterminer votre glycémie, votre cholestérol, votre taux de globules rouges, et votre couleur de cheveux, entre autres.

Je n'avais pas du tout pensé à la prise de sang, donc. Et je n'avais pas non plus pensé qu'il fallait aller dans un centre médical spécifique, ni qu'il y avait seulement deux centres médicaux de ce genre à Paris, ni que l'un d'eux (à dix minutes de chez moi) serait fermé pendant une semaine. Et qu'il faudrait donc que j'aille au second, situé littéralement à l'autre bout de Paris.

Oh ! joie, encore une demi-journée de travail de perdue.

J'y suis allée en pestant, râlant, et bougonnant. En chemin, je me suis bien répété les consignes de ma mère, très simples : "Tu dis non à tout" (le contraire d'un mariage, quoi) (toujours honnête, j'ai tout de même signalé que j'avais été opérée de l’appendicite à sept ans et des dents de sagesse à dix-huit : on ne se refait pas). Je suis arrivée là-bas d'une humeur massacrante.

Et puis en fait, j'ai bien fait d'y aller :
- Le médecin, adorable, a juste bavardé avec moi quelques minutes (un moyen plus humain qu'un autre de vérifier si j'étais saine d'esprit, je suppose) et n'a même pas sorti son stéthoscope ;
- Il m'a pesée, pour la forme, mais il m'a crue quand j'ai protesté que "chez moi la balance indique trois kilos de moins", et il a noté le poids que JE jugeais être correct ;
- En revanche, il m'a mesurée et a constaté que je mesurais un centimètre de plus que je ne le croyais, ce qui a l'avantage de faire baisser mon IMC (oui je sais c'est psychologique mais c'est chouette quand même) ;
- Les résultats de la prise de sang vont m'être gratuitement envoyés en copie, donc je vais savoir où j'en suis niveau anémie, cholestérol et glycémie, ce qui m'évitera de le faire la prochaine fois que je verrai un médecin ;
- Pendant que j'y étais, j'ai même fait faire un certificat médical m'autorisant à participer à des courses à pied officielles (aller voir un médecin exprès pour ça me semblait un vrai gâchis) ;
- J'en ai profité pour vérifier ma vue, toujours aussi excellente (je sais, ça ne va pas durer éternellement, mais pour l'instant, je peux encore lire les toutes petites lignes en bas des contrats sans lunettes, c'est pratique) ;
- J'ai eu droit à un vrai petit-déjeuner, avec des croissants délicieux, du jus d'orange 100%, du thé avec de l'eau réellement chaude et servie dans une vraie tasse, des petites madeleines toutes fraîches, et je me suis régalée (du coup je leur ai presque pardonné de m'avoir donné un rendez-vous à 10h45 à jeun, les monstres) ;
- En sortant, je suis allée regarder des étagères (mon péché mignon) (c'est plus cher que les chaussures, mais ça dure plus longtemps) dans le magasin Lundia qui se trouvait juste à côté du centre médical, pour commencer à réfléchir à l'aménagement de mon futur bureau (l'objet de tous mes désirs).

J'ai presque envie d'envoyer une lettre de remerciement à mon futur banquier, tiens.

dimanche 18 novembre 2012

Piti gasson

Ce matin, une heure après le petit-déjeuner, il est venu me voir :
— Maman ? Va changer la couche, maman ? A fait caca.

Ce midi, en réponse à mes taquineries, sur un ton très convaincu :
— Mais non ! Pas un piti monst', moi ! A piti gasson !

Cet après-midi, alors qu'il avait involontairement heurté sa soeur et qu'elle s'avançait vers lui, rugissante, toutes griffes dehors :
— Na pas fait 'xprès !

Ce soir, au moment de se coucher :
— Bonnuit, maman ! Dormez bien !

Pas de doute, mon bébé est en train de se transformer en petit garçon. Il est en train d'apprendre à PARLER.
C'est aussi ça, d'avoir des enfants. Toucher le fond du découragement un jour, et déborder de bonheur le lendemain. Vouloir les jeter par la fenêtre un jour, et se rappeler qu'on les aime par-dessus tout le lendemain. Subir une colère inexpliquée un jour, et découvrir qu'on peut (parfois) commencer à communiquer le lendemain...

Vous n'avez plus le temps d'aller à la fête foraine ? Pas de problème, voici les montagnes russes à domicile ! (Attention, jeu très très cher et avec obligation d'achat.)


samedi 17 novembre 2012

Shopping Privé

Je reçois une invitation exclusive à un shopping privé. Dans quelques jours, les Galeries Farfouillettes* ouvriront pendant toute une soirée uniquement aux détenteurs d'une carte Visa Premier de la Société Pas Géniale ! À peine quelques dizaines de milliers de personnes, donc.
L'invitation, valable pour deux personnes, est strictement personnelle : c'est marqué dessus. Même si mon nom n'est indiqué nulle part.
Ce jour-là, c'est la fête : le parking pour la voiture que je ne possède pas est gratuit, je peux participer à des ventes privées comme les dizaines qui existent déjà sur Internet, et on me fait une remise de 15% sur l'ensemble du magasin sauf sur une liste de rayons longue comme une page du Petit Robert.
Et attention, cerise sur le gâteau : si je dépense plus de 200 €, on m'offre une bougie ! Mais si, une bougie toute entière, rien que pour moi ! C'est fou.
À me faire quasiment regretter de changer de banque, non ?

* © Georges Chaulet (l'auteur de Fantômette, pour ceux qui ne suivent vraiment pas)

vendredi 16 novembre 2012

Tout va bien

Sortie, ce soir. Dîner avec un ami, pour la première fois depuis longtemps. Je vais au restaurant juste en face de chez moi : courageuse, mais pas téméraire. Quand je pars, les gamins sont couchés, mais ne dorment pas encore. Au retour, j'interroge Darling :
— Tout s'est bien passé ?
— Oui, oui, pas de problème.
— Tant mieux. Les Things ne m'ont pas réclamée ?
— Si, ils ont pleuré pendant une demie-heure, mais ensuite ils se sont endormis. Le Petit a pleuré, lui aussi, mais il a fini par s'arrêter. Tout va bien.

Ah. Ouf. Quand je pense que je m'inquiétais !

jeudi 15 novembre 2012

Coup de pompe

Fatiguée.

Des nuits entrecoupées, toujours deux ou trois réveils nocturnes du Petit, souvent un cauchemar de Mr Thing Two, parfois une crise de Miss Thing One qui se plaint que "ça" la démange et ne se calme pas tant qu'on ne l'a pas mise dans un bain, ou même une crise d'asthme du Grand, tout ça entre 23h et 6h du matin, heure à laquelle le Petit décide que la journée commence.
Des matins survoltés, trois enfants à changer et à habiller, minimum une colère d'un gamin de deux ans et des poussières, le Grand qui ne sait pas lacer ses chaussures, les biberons, une douche à caser quelque part, les cris, les sempiternels "Non, pas papa ! C'est Maman !", y compris de la part du Petit qui ne parle pas encore mais se fait très bien comprendre, le départ pour la crèche sans même avoir pris un petit-déjeuner, le trajet interminable avec des enfants qui s'arrêtent sans cesse pour commenter ce qu'ils voient.
Des journées trop rapides, lessives, rangement, vaisselle, et puis la perspective du déménagement, les visites aux banques, aux agences, les documents à rassembler, les détails à vérifier, et puis encore les démarches administratives, un chèque à encaisser, les feuilles de maladie à envoyer, un rendez-vous chez le médecin, une commande à passer, et l'après-midi qui touche à sa fin sans que j'aie jamais fait le nombre de pages prévu sur ce roman de 480 pages qui n'avance pas.
Des soirées de folie, toujours des cris, des caprices, le Petit à surveiller comme le lait sur le feu pour qu'il ne se mette pas en danger, le Grand qui excite les autres, l'heure du dîner qui approche alors qu'on ne sait pas ce qu'on va manger, les gamins qui ne veulent pas prendre leur douche, ni manger des légumes, ni changer la couche, et encore moins aller au lit, des disputes, le voisin qui ne supporte plus les petits pieds qui courent sans cesse, le livre à lire, encore des disputes, des cris, des câlins à faire, un bébé à bercer... et quand enfin, ils sont tous couchés, on n'a pas même l'assurance que c'est fini pour aujourd'hui, qu'on peut se remettre à ces quelques pages à terminer, parce qu'il y en a toujours un qui se réveille, qui tousse, qui râle, qui pleure, qui menace de réveiller les autres. Et si jamais tout le monde dort, des fins de soirées passées à travailler sur ce bureau trop petit, avec la télévision allumée à deux mètres de mois, sans relâche, jusqu'au moment d'aller se coucher, avec des yeux qui piquent tellement on n'en peut plus.
Et de nouveau une nuit trop courte, et de nouveau une journée trop courte, et la semaine se termine alors qu'elle vient de commencer, et voici le samedi si redouté, avec les siestes décalées et la nuit qui tombe avant même que tout le monde soit sorti du lit. Et puis le dimanche, avec tout le monde qui se marche sur les pieds dans cet appart trop petit, le Grand qui devient fou entre ces quatre murs, deux fois plus de corvées de repas, les dissensions entre ceux qui veulent écouter de la musique et ceux qui rêvent de silence, la fin de la journée interminable.

Est-ce à cause de ces fichues vacances qui ont achevé de me vider de toute mon énergie ? Du manque de sommeil cumulé, jour après jour, semaine après semaine, mois après mois ? Des fois, j'ai l'impression que je ne vais pas y arriver, que je vais craquer, flancher, faire une déprime, voire une dépression, tomber malade. Jour après jour, je sens monter de plus en plus souvent des pulsions violente, je dois me mordre le poing pour me retenir de frapper cette gamine qui m'assourdit avec ses cris stridents, pour ne pas hurler contre ce bébé qui refuse de me laisser dormir, pour ne pas assommer ce petit garçon qui me tient tête alors que je ne veux que son bien, ou ce préado de plus en plus insolent. Je suis prise de véritables désirs de les taper, de les secouer, de les faire taire, enfin.

J'avais tenu le choc jusqu'ici, pourtant. J'avais résisté à la naissance des Things, et même à celle du Petit. J'espérais toujours refaire surface prochainement. Mais j'ai dû replonger sans avoir pu reprendre mon souffle. Je savais qu'il me fallait tenir bon pendant trois ans, jusqu'à ce que ces bébés se transforment en enfants. Avec l'arrivée du Petit, cette durée est passée à cinq ans. D'ici là, aucune perspective de vacances, de repos, de détente. Pendant cinq ans.

Comment fait-on, dans ces cas-là ? Comment met-on un pied devant l'autre ?

On se concentre sur des petites joies. Des bonheurs modestes, mais proches. Des bons moments à venir.
Pas de vacances en perspective, mais des perspectives tout de même.
Un petit footing demain matin.
Une pause avec un cappuccino en début d'après-midi.
Un dîner avec un ami de longue date que je n'ai pas vu depuis un an.
Une sortie au cinéma avec Darling, en dépit du prix de la baby-sitter, du travail en retard, des nuits trop courtes.
Un coup de téléphone à une copine.
Un prochain weekend avec quelques amis venus passer deux jours à Paris.
Noël qui s'approche.
Des biscuits à tester.
Les visites toujours rapides mais régulières de mon père adoptif, le seul à habiter assez prêt d'ici pour "faire un saut" de temps en temps.
Un bon bouquin à lire, même à coup de vingt pages par jour.
Un blog à remplir, avec chaque jour, cette parenthèse d'une écriture qui libère, qui exorcise les idées noires, qui enchante le quotidien.
Quelques déplacements professionnels prévus dans les mois à venir.
Un rendez-vous avec une éditrice sympa.
Les plans de ma future cuisine à concevoir.
Deux ou trois films très attendus qui vont sortir en hiver ou au printemps.
Et puis encore, et surtout, surtout du lien, des gens, de la famille ou des amis avec qui rire, parler, prendre l'air, même virtuellement.

Et petit à petit, sans qu'on s'en rende compte, le temps passe ; et soudain, un enfant sait parler, un bébé sait s'assoir, un grand garçon sait faire ses devoirs tout seul, et mois après mois, la vie trouve son rythme. Bientôt, plus bientôt que je ne le pense, les sorties en famille redeviendront possible, les bons moments ensemble seront plus nombreux, les nuits se normaliseront, les problèmes disparaîtront pour laisser la place à d'autres qui me préoccupent moins, et l'angoisse de la suffocation se dissipera. Je survivrai. Je respirerai. Je ne serai pas noyée. Pas cette fois-ci.

Allez, on prend une profonde inspiration, et on replonge. Encore une brasse. Encore une. Encore une. Encore une...

mercredi 14 novembre 2012

Il ne faut pas souffrir, ni être belle

Les cheveux de Miss Thing One s'allongent de jour en jour, et frisent de plus en plus. Les bouclettes sont tellement serrées qu'on dirait des ressorts ; elle a exactement les mêmes cheveux que moi quand j'étais petite. C'est absolument adorable. Et j'adore enrouler les boucles autour de mes doigts, comme je le faisais autrefois avec mes propres boucles.J'adore aussi la coiffer. Caresser les doux cheveux, et en faire des couettes, une demi-queue, une queue de cheval. Bientôt des tresses, peut-être ? Et d'autres choses encore plus élaborées ?
Mais l'hiver arrive. Et avec lui, le temps des capuches et des bonnets, sous lesquels les plus jolies boucles s'aplatissent. Avec pour résultat que ces cheveux pendouillent devant la visage de la gamine et lui tombent dans les yeux. Et qu'il faut déméler la chevelure bien plus souvent. Ce qui ne plaît pas toujours à la demoiselle.
Alors quoi ?
Alors on décide qu'on va avoir le courage de ses opinions. Oui, elle est adorable avec ses anglaises. Mais elle sera aussi adorable sans. Légèrement moins mignonne, peut-être. Et alors ? Pourquoi diable faudrait-il qu'elle soit mignonne ? Qui a dit qu'il était obligatoire d'être aussi jolie que possible ? Et au détriment du confort, en plus ? Il faut souffrir pour être belle, c'est ça ? Eh ! bien, non. Pas question. Pas ma fille. Il ne faut pas souffrir, et il ne faut pas être belle. C'est un droit, pas un devoir. Je ne mets pas d'escarpins parce que c'est inconfortable, je ne vais pas lui imposer de longues séances de coiffure à deux ans et demi à peine sous prétexte que MOI, je trouve ses bouclettes jolies. Alors qu'elle, elle s'en fiche, et elle a raison.

J'ai mis quelques jours à m'y résigner, mais je l'ai fait. En revenant de la crèche, tout à l'heure, nous sommes donc passés chez la coiffeuse, et dix minutes plus tard, la jolie petite fille avait perdu ses anglaises.

Et en fait, vous savez quoi ? Sa toison de mouton lui va aussi drôlement bien.
En plus, maintenant, elle ressemble à Fantômette.

(Et puis d'ici l'été prochain, ça va repousser, hein ? On pourra refaire des couettes, et des queues de cheval, et des tresses...)

mardi 13 novembre 2012

Ça compte aussi la gentillesse

Apparemment c'est tout petit
Ce n'est jamais très important
Ça fait modestement son nid
Très loin des autres sentiments (...)

Ça compte aussi, la gentillesse
Et tout au fond de nous je crois
Qu'en plein été, c'est de l'eau fraîche
En plein hiver, un feu de bois

Ça compte aussi, la gentillesse
Ça rend meilleur le quotidien
C'est un bonjour, la gentillesse
Mais un bonjour qui fait du bien

Pour la journée mondiale de la gentillesse (World Kindness day), je cite du Dorothée.
Mais oui, j'assume.
Je vais même aller relire Pollyanna, tiens. Même pas peur.


(En fait, je n'ai pas le temps, bien sûr. Pas grave, je le connais par cœur, je vais me le réciter en lavant quinze piles d'assiettes. Je vous ai dit que mon lave-vaisselle était en panne ? Et que ce satané maudit réparateur ne vient que demain soir ? Quelqu'un l'a-t-il informé que c'était la journée mondiale de la gentillesse, envers moi de préférence ?)

lundi 12 novembre 2012

Calendrier des pompiers

21h10. On sonne à la porte. Pitié, dites-moi que ce n'est pas une fois de plus le voisin du dessous qui vient se plaindre que nos gamins sont un peu bruyants !

Heureusement, non. Ce n'est pas avec le voisin que je me retrouve nez-à-nez, mais avec un beau pompier.
Armé d'un calendrier.
— Bonjour Madame, je viens vous proposer notre calendrier de l'année prochaine. Vous en voulez un ? Vous donnez ce que vous voulez.
Soupir. Je vais chercher mon porte-monnaie en faisant la moue :
— J'espère au moins qu'il n'y a pas des blessés à toutes les pages, comme l'année dernière...
— Non, non, ne vous inquiétez pas, beaucoup de gens se sont plaints, donc ils ont changé ça. Cette année, il y a...
Moi, pleine d'espoir :
— Des beaux pompiers en plein entraînement ?
— ... des articles sur la prévention des accidents domestiques, ce genre de truc.
Ah. Oh. Beurk.
— Mais enfin, vous ne pourriez pas utiliser un peu votre image ? Mettre des photos un peu plus... intéressantes ? Ce que les rugbymen peuvent faire, vous pouvez le faire, non ?

Il n'a pas relevé. Soit il n'a pas saisi l'allusion, soit il ne sait pas à quoi je fais référence (mais ce serait étonnant). Soit l'idée qu'on lui propose de poser nu pour des photos suggestives ne lui fait ni chaud ni froid.

N'empêche qu'il est affreusement moche, leur calendrier.

(Et puis que diable, nous ne sommes même pas encore à mi-novembre ! Je sais bien qu'ils veulent passer avant les facteurs à cause des pingres qui ne donnent qu'une fois, mais quand même !)

samedi 10 novembre 2012

Les raisons de la colère

Ce matin, au réveil, Mr Thing Two était d'humeur exécrable et cherchait un prétexte pour faire une colère.
Je ne lui en ai donné aucun. Ma longue expérience m'a permis d'assimiler cette règle de base (que même Darling et le Grand ont encore un peu de mal à comprendre) : avec un Deuxans en pleine "petite adolescence", on ne fait RIEN sans son consentement express, MÊME PAS quelque chose de gentil et que le Deuxans en question exige absolument tous les jours. On ne lui fait pas un bisou, on ne lui donne pas de gâteaux, on ne lui tend pas son doudou, on ne l'aide pas à descendre de sa chaise sans lui avoir demandé la permission auparavant.

(Sauf si on n'a pas le temps, ou qu'on est d'humeur batailleuse, ou qu'on a des principes éducatifs très fermes, ou qu'on en a marre de marcher sur des œufs. Oui, ça m'arrive. Parfois. Souvent.)

— Bonjour, mon chéri. Je peux te faire un câlin ?
— Non ! Pas câlin !
— D'accord. J'allume la lumière ?
— Non !
— Tu veux que je te sorte du lit ?
— Non !
— Tu veux ton biberon ?
— Non ! Pas biron !
— Je vois que tu as jeté ton doudou. Je te le rends ? Je le ramasse ? Je le pose sur la commode ?
— Non ! Paterre doudou !
— Je le laisse par terre, très bien. Résumons : tu ne veux pas te lever, ni prendre ton biberon, ni avoir ton doudou. Tu veux encore dormir ?
— Non ! Non ! Nooooon !
— Ne t'énerve pas, j'ai très bien compris. Tu ne veux pas dormir. Alors tu sais, je vais arrêter de te proposer plein de choses. Je vais m'en aller. A moins que tu veuilles que je reste près de toi ? Je m'assieds ici ?
— Non ! Pas s'asseoir maman !
— Message reçu. Alors je vais sur le canapé avec ta soeur, et quand tu veux que je vienne, tu m'appelles, d'accord ?

Du coup, le malheureux a été contraint de faire une colère sans le moindre prétexte. Ce fut peut-être une des plus longues et plus violentes qu'il ait jamais faite, et j'ai été rongée de remords. Comment voulez-vous que cet enfant se calme rapidement s'il n'a aucune raison d'être énervé, s'il n'a subi aucun tort qui puisse être réparé ? Je suis une idiote de ne pas avoir compris ça plus tôt.
Demain matin, je lui allumerai la lumière dans les yeux, je lui donnerai un biberon trop froid, et je serai occupée à autre chose quand il voudra sortir de son lit. Pour lui rendre service, bien entendu. Par pure charité. On est une bonne mère ou on ne l'est pas.

vendredi 9 novembre 2012

Voyage hivernal, erreur fatale !

Finalement, je suis revenue deux jours plus tôt que prévu.
Pourquoi donc ?

Les vacances à la campagne, quand on est citadin, c'est chouette. Les vacances à la campagne avec des jeunes enfants, ce n'est pas très reposant, mais ça peut être chouette. Les vacances à la campagne en hiver avec des jeunes enfants, ça peut être pénible, malgré quelques moments chouettes. Les vacances à la campagne très loin de Paris en hiver avec des jeunes enfants malades, ce n'est pas chouette, ni hibou, ni aucun volatile à plumes, à poils ou à écailles.

Bilan : deux journées entières passées sur les routes (de 7h à 21h, avec pauses pipi, pauses casse-croûte, pauses colère et pauses vomi), plusieurs coups de fils à des médecins et un passage par les urgences de l'hôpital le plus proche, une bonne vingtaine de kilos de boue répandus dans toute la maison, des dizaines de boutonnages de pulls et manteaux puis déboutonnages vingt minutes plus tard, des très mauvaises nuits avec un bébé dans la chambre, des repas constitués presque exclusivement de pâtes et aucun légume, presque aucune sortie pour cause de siestes décalées, des disputes entre les plus grands, la nuit qui tombe à cinq heures, la terrasse inutilisable car toujours à l'ombre, et bien sûr, pas une seule minute pour travailler : l'ordinateur portable est resté dans son étui.

Note pour l'avenir : ne plus partir en vacances à la campagne, en hiver, avec une si nombreuse marmaille, et surtout pas en voiture.
Ne plus partir en vacances en hiver avec une si nombreuse marmaille, en fait.
Ne plus partir en vacances, tant qu'à faire.
Ne plus partir.
Ne.

(C'est l'heure de la sieste, non ?)

jeudi 8 novembre 2012

Les relevés fantômes, ou la goutte d'eau...

... qui fait déborder la baignoire.

Je vous ai déjà parlé de ma banque, mais je ne vous ai pas raconté tous les déboires que j'ai eu avec elle. Et je ne vais pas le faire, ce serait fastidieux. Disons simplement qu'il y en a eu beaucoup. Par paresse et administraphobie, je n'en ai jamais changé. Mais là, je crois que ça ne va pas tarder.

L'autre jour, je me suis rendu compte que je n'avais pas accès à mes relevés en ligne. Comme, en un an, je n'en ai jamais eu besoin (je surveille mes comptes sur Internet), je ne m'en étais jamais aperçue. Je téléphone, j'explique, je réclame. Vérifications faites, la conseillère confirme :
 — Écoutez, je ne sais pas ce qui s'est passé. Depuis combien de temps ne recevez-vous plus les relevés papier ?
— Depuis un an, date à laquelle j'ai demandé à passer aux relevés en ligne.
— D'après notre logiciel, vous n'êtes pas abonnée aux relevés en ligne.
— Oui, j'ai remarqué ça. Mais alors pourquoi est-ce que je ne reçois plus les relevés papier ?
— Peut-être que l'adresse est mauvaise...
— Ça ne tient pas debout, puisque je continue à recevoir les relevés papier du compte joint, et c'est la même adresse.
— Écoutez, franchement, je ne sais pas quoi vous dire.
— Moi non plus, mais ne vous inquiétez pas, je n'avais pas l'intention de faire un scandale, je voudrais simplement recevoir enfin les relevés de l'année écoulée, s'il vous plaît.
— D'accord, je vais vous les envoyer... mais je vous préviens, ça coûte dix euros par relevé.
— HEIN ?
— C'est comme ça, c'est le tarif.
— Mais ce n'est pas moi qui ai égaré les relevés, c'est vous qui avez cessé de me les envoyer sans pour autant me donner l'accès aux relevés en ligne ! C'est votre erreur !
— Peut-être, mais je n'y peux rien, c'est un service payant... Bon, allez, je vous fais une fleur, je vais vous faire cadeau de 50% des frais. Ça ne vous fera que 60 €, du coup. Quand voulez-vous passer les chercher ?
— ... [bruits d'étranglement]

Finalement, elle va me "faire une fleur", elle va me les envoyer par la poste. En me faisant payer les frais de port, j'imagine.



PS : Au cas où ça intéresse quelqu'un, ma banque, c'est la Société Générale. Mais plus pour longtemps, vous pouvez me croire.
PS 2 : Et les grands esprits se rencontrent : Caroline aussi veut claquer la porte...

mercredi 7 novembre 2012

Kamo

L'autre jour, j'ai rencontré une éditrice qui me disait que le roman de Susie Morgenstern, La sixième, continue à se vendre par milliers d'exemplaire à chaque rentrée scolaire. Normal, me dit-elle : c'est un des rares bouquins pour enfants à aborder de front le thème de l'entrée au collège.
C'est alors que j'ai découvert qu'elle n'avait jamais lu les histoires de Kamo. Je lui en ai parlé avec enthousiasme, et moins d'une semaine plus tard, j'ai reçu un email ravi : elle avait acheté le livre et avait adoré.
Les quatre aventures de Kamo, d'abord parues chez Je Bouquine (j'étais abonnée quand j'étais petite), puis reprises par Gallimard, font partie des trop rares romans que Daniel Pennac a écrit pour les enfants. Tout le monde ou presque connaît cet auteur, ancien prof, mais plus souvent pour sa série des Malaussène ou pour son superbe essai Comme un roman. Or, si j'aime aussi beaucoup ses livres pour les adultes, je raffole peut-être encore plus de Cabot-Caboche, de L’œil du Loup, et des Kamo, donc.
Kamo est un garçon qu'on rencontre alors qu'il est au CM2 et qu'il s'inquiète, comme tous ses copains, du passage en sixième. C'est alors qu'il a "l'idée du siècle" : demander à leur instituteur de les préparer à passer ce cap difficile en mimant plusieurs profs différents. Et l'instituteur accepte. Malheureusement...
Parmi les trois autres histoires, il y a aussi Kamo, l'agence Babel où Kamo perd un pari contre sa mère et se retrouve contraint à apprendre l'anglais... en trois mois ! Pour l'y aider, sa mère lui trouve une correspondante anglaise. Mais cette Kathy est une fille bien étrange, qui vit avec des personnes encore plus allumées qu'elle, et qui ne semble connaître aucune des inventions modernes, pas même les stylos à plume. D'où vient-elle ? Qui est-elle vraiment ? Une enquête s'impose...
Ces livres allient le style incroyablement ciselé de Daniel Pennac (peut-être ce que je préfère chez cet auteur, qui fait que je peux lire n'importe quoi de son cru, quel que soit le genre abordé) à des intrigues originales et des personnages très attachants, en particulier Kamo, bien sûr, mais aussi le narrateur qui a la particularité de n'être jamais nommé... ce qui n'empêche pas de s'y identifier, au contraire !
Dernier argument en faveur de ces romans : le Grand, toujours aussi réticent quand il s'agit de se plonger dans un roman, les a lus d'une traite. Si ça, ce n'est pas un gage de qualité...

lundi 5 novembre 2012

Café, salade ou graminée ?

Lors de mon dernier séjour en Italie, un jour, dans un bar, j'ai eu une conversation surréaliste avec la cafetière, heu, la bistrotière, heu, la barwoman, enfin, la dame qui au comptoir, quoi. Voyant que j'hésitais à reprendre un cappuccino à cause de la caféine (oui, j'allaitais), elle me propose :

— Tu veux que je te fasse un cappuccino avec de l'orge ?
(Pardon ?)
— De l'orge ? Tu veux dire la céréale ?
— Ah, je ne sais pas. Oui, je crois que c'est une céréale. Tu n'as jamais goûté ?
— Heu, ben si, j'ai déjà mangé de l'orge perlé, mais ce n'est pas de ça que tu parles, si ?
— Ah non, je te parle du café d'orge. Attends, tu vas voir.

Sur quoi elle me fait une drôle de boisson noire qui ressemble effectivement à du café, et à laquelle elle ajoute du lait mousseux. Soyons franc, ça ressemble autant à un cappuccino qu'une infusion à la menthe ressemble à un thé Earl Grey, mais l'infusion à la menthe, ce n'est pas mauvais non plus. Juste pas pareil que le thé Earl Grey, mais pas mauvais. En l’occurrence, la boisson à l'orge est crémeuse, avec un petit arrière-gout de noisettes, enfin, pas mauvaise du tout.

—  C'est un succédané du café ? C'est drôle, je n'en avais jamais entendu parler. Il me semble qu'en France, on utilise plutôt de la chicorée.
(Là, elle me fait exactement la même tête que moi deux minutes plus tôt, au moment où elle m'a parlé d'orge.)
— De la chicorée ? Tu veux dire la salade ?
— Ah, je ne sais pas. Oui, je crois que c'est aussi une salade. Tu n'as jamais goûté ?
— Heu, ben si, j'ai déjà mangé de la chicorée avec de l'huile et du vinaigre, mais ce n'est pas de ça que tu parles, si ?

Vérification faite, en passant les Alpes, il n'y a pas que le café qui change, mais aussi le succédané de café. D'un côté, on utilise presque exclusivement de l'orge torréfiée, tandis que de l'autre, on utilise surtout des racines de chicorée torréfiée, en rebaptisant du nom de "scarole" la chicorée dont on mange les feuilles en salade. Je compte faire une étude comparative poussée des vertus gustatives comparées de l'une et de l'autre un de ces jours.
Et après, je recommencerai à boire du chocolat chaud, parce que c'est quand même meilleur.



samedi 3 novembre 2012

Xylostomiase

Mon personnage a la gueule de bois. Sauf que ce n'est pas le genre de texte où on peut utiliser cette expression. Il me faut trouver un équivalent.
Peu inspirée, je cherche dans mon dictionnaire de synonymes. Y en a-t-il seulement un ?
Non : c'est inespéré, il y en a deux !
Xylostomiase, et xylocéphalie.
Hum.
Même le correcteur orthographique ne les connaît pas, c'est dire.
M'est avis que mon personnage va avoir "mal à la tête suite aux excès de la veille".
En plus, c'est beaucoup plus long, donc je serai payée davantage. C'est tout bénef.

jeudi 1 novembre 2012

Demain, dès l'aube

Demain, dès l'aube, à l'heure où blanchit la campagne,
Je partirai. Avec pas moins de cinq enfants.
J'irai par l'autoroute, j'irai par la montagne,
Et je poursuivrai même au-delà du Mont Blanc.

Je conduirai, les yeux fixés sur mes pensées,
Sans rien voir que l'asphalte, supportant tous les bruits,
Les mains sur le volant, stressée, le dos courbé,
Lasse, et le jour pour moi sera comme la nuit.

Je ne regarderai ni l'or du soir qui tombe,
Ni les neiges aux loin, ni les timides fleurs,
Et quand j'arriverai  – si bien je ne succombe –,
J'affronterai dix jours mes gamins et leurs pleurs.




Je vous ai programmé quelques billets à lire en mon absence. On se revoit dans dix jours. Soyez sages !

(PS : L'original de Victor Hugo est .)