jeudi 24 novembre 2022

Un métier parfois méconnu

Rencontre scolaire dans la périphérie d'une ville de taille moyenne, à 12 km du centre-ville (le détail a son importance). Une classe de CM1. A cet âge, on croit toujours qu'il y a maximum trois personnes qui interviennent dans la chaîne du livre : l'auteur, l'illustrateur et quelqu'un d'autre qui fabrique et/ou vend les bouquins. Je viens de leur présenter un certain nombre de métiers : traducteur, correcteur, éditeur, maquettiste, etc. J'arrive enfin au bout, juste après l'imprimeur:
- Et donc, il y a encore un distributeur, qui est celui qui fait transporter les cartons de livres jusqu'aux points de vente. Et enfin, le dernier métier, c'est quoi, à votre avis ?
(Silence.)
- Voyons, vous, les lecteurs, comment vous faites pour acheter vos livres?
- On va au Leclerc!
- Euh... Oui, d'accord, très bien, mais on peut aussi aller dans un magasin spécialisé. Comment ça s'appelle ?
- La Fnac?
- Alors, oui, tout à fait, mais la Fnac vend aussi d'autres trucs. Un magasin qui ne vend que des livres, c'est...?
(Silence.)
- Je vous jure qu'il n'y a pas de piège ! Le dernier métier de la chaîne du livre, c'est celui de la personne qui vend les livres. C'est un li...
- Un livreur?

C'est évidemment stupide de ma part, mais découvrir que sur les 26 élèves de la classe, il n'y en avait pas un seul ayant déjà mis les pieds dans une librairie, je ne m'y attendais pas.

3 commentaires:

  1. C'est navrant. Pour l'anniversaire de mon fils (bon, il a 28 ans), nous sommes allés dans une librairie et je lui ai dit "choisis tout ce que tu veux". On s'est régalés !

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  2. (JulienFromDijon)
    :D Estime-toi chanceuse, tu as échappé à :
    - (...) Le dernier métier de la chaîne du livre, c'est celui de la personne qui vend les livres. C'est un li...
    - Li...amazon?

    Si je remonte le temps, en terme de presse et livre payant :

    - Amazon -que je boycotte-
    (La blague est plutôt américaine. Ce monstre qu'est Amazon a percé comme libraire, surfant -je l'imagine- sur le désert en librairie sur le maillage du territoire, et sur un catalogue immense auprès des gens déjà mordu de livres. J'aurais préféré que PriceMinister survive mieux -aujourd'hui cette belle au bois dormant appartient au Japonais Rakuten-. Vinted a une offre intéressante.)

    - Fnac et grosses librairies
    (Même la FNAC, de l'écho que j'en ai en Espagne, a une image de grosse librairie qui fait rêver dans certains pays. En France, de mon impression, la FNAC est un choix par défaut dans une grosse ville quand on n'a pas une unique pure grosse librairie. Quand j'étais à Dijon, il y avait Gilbert, la librairie de l'université -avant fermeture, puis un Bio c'est bon, puis fermeture-, et même la librairie Privat, en plus de la Fnac.

    - gros complexe de supermarché
    (Mais j'étais déjà adulte, l'entre-deux a été le complexe de magasin "La toison d'or" dans les année 90, qui surfait sur la mode et l'inconscient collectif de l'époque, qui était qu'on accédait à la mondialisation par les boutiques spécialisées de ce genre de complexe -dont une librairie et point presse très fournie-. C'était avant le vrai boom d'internet et de son offre en ligne.).

    - Uhm... CM1. C'est un peu top pour avoir un budget "livre neuf" et pouvoir s'imaginer acheter dans une librairie.
    C'est vers la 6ème et le collège, que j'ai commencé à envisager d'acheter des livres neufs. Avant, c'était les Fantômette à 25Fr à la supérette du coin, ou les Picsou magasine à ~20Fr chez le marchand de presse. Je me reposais énormément sur Emmaüs pour acheter des livres "en propre".

    Soutenir le secteur du livre.
    Toutefois, le propos implicite de ton billet, c'est l'enjeu politique d'éduquer les jeunes à soutenir, par leur achat "en neuf", un secteur du livre et de la presse pour qu'il reste dynamique. Bibliothèque d'école ou de village, Emmaüs, toute l'offre de seconde main, problèmes -et avantages- de la gratuité de l'offre illégale, ... Le secteur -disons "industriel"- du livre ne trouve rémunération qu'au premier achat. (Dans le secteur du luxe, c'est aussi la raison pourquoi certaines marques se moquent de réguler la contrefaçon : elle atteint surtout le milieu de la revente d'occasion et hors circuit, là où la marque ne perçoit plus d'argent de toute façon).

    Le manque de soif de lire des jeunes à qui tu parlais?
    Ca semble désolant.
    L'autonomie de la lecture et le déchiffrage fluide n'arrive qu'avec le CE2 et le CM1, ainsi que la première recherche de livre de 100 pages.
    Le "livre" est aussi un héritage culturel, comme dirait Bourdieu. Dans ma famille, il y avait des livres à la maison, et même si je ne lisais pas la bibliothèque de famille, je voyais bien que "le canard enchaîné" et des magasines thématiques étaient acheté. Par mimétisme, ça crée un avantage. Évidement, ce n'est pas donné à tout le monde, malheureusement. (Et merci d'y palier par tes interventions).
    C'est un peu triste, car sans ce mimétisme, beaucoup de jeunes issus de milieu très modestes passent à côté des opportunités, que représentes les offres gratuites de livre que sont les bibliothèques. Ce sont les jeunes déjà favorisé qui en tire le mieux parti. (Et aussi des conservatoires. C'est une ironie que j'ai pu constater. Les dispositifs connotés "Etat social" du type médiathèque, offre muséale gratuite, prêt gratuit d'instrument au conservatoire... ce sont surtout les enfants issus déjà de milieu aisé qui ont connaissance de ces filons).
    Et pardon pour le pavé.

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  3. Pour la plupart, les librairies des petites villes dans les département ruraux, ont disparu. Plus assez de clients, avec la concurrence d'internet (qui livre, donc pas besoin de faire 50km aller-retour pour acheter un bouquin), les libraires ne gagnent plus leur vie.
    C'est dommage.

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