Il y a une dizaine d'années, lorsque le Grand était un petit bonhomme de trois, quatre ou cinq ans, fils unique, encore trop jeune pour s'occuper seul, les samedis en tête-à-tête avec lui me paraissaient interminables. Du coup, en été, lorsque les journées s'allongeaient et que les températures s'adoucissaient, il m'arrivait parfois de sortir avec lui en fin de soirée et d'aller chercher Darling à la sortie de sa librairie à 19h30. Nous partions alors en promenade, tenant chacun une main de l'enfant ; nous passions devant Notre-Dame ou d'autres monuments magnifiques sous la lumière du soir ; nous nous arrêtions dans un Hippopotamus ou dans un restaurant japonais ; nous prenions une glace sur l'île Saint-Louis, ou ailleurs, en guise de dessert ; et nous rentrions à pied ou en métro, selon le degré de fatigue de l'enfant. J'adorais ces soirées à trois, ces balades dans un Paris plein de promeneurs en tenues estivales, cette ambiance festive.
Et puis il y a eu quelques années difficiles. Et puis les Things sont arrivés. Et puis le Filou a suivi. Et les sorties en famille se sont faites plus rares, plus compliquées à organiser, et surtout, elles ont changé de nature. A six, dont trois petits, il est plus simple (et moins cher !) de pique-niquer dans un bois que de manger dans un restaurant et se promener dans les rues en n'ayant jamais assez de mains libres.
Mais cette semaine, les Things sont chez leur grand-mère : ils reviennent demain. Et cet après-midi, le Grand est allé chez un copain : il part avec lui (et sa mère) cinq jours à Londres. Ce soir, j'étais seule avec le Filou. Alors j'ai pris le RER, puis le bus, et puis nous avons vu "là où papa travaille", et puis nous avons marché, et puis nous avons mangé des sushis, et puis nous avons pris une glace que nous avons léchée en retournant vers le métro. Le petit bonhomme de quatre ans était entre ses deux parents qu'il avait pour lui tout seul, peut-être pour la première fois depuis sa naissance. Sa ressemblance avec le Grand est frappante : c'est quasiment trait pour trait le même enfant. Le même sourire : c'en est renversant. La même coiffure. Le même caractère remuant, la même tendance à escalader les sièges au restaurant et les murets et barrières dans la rue. La même voix aigüe, le même zozotement. Les mêmes vêtements, aussi, refilés de l'aîné au benjamin en passant par le cadet.
Ce soir, pendant quelques heures, j'ai eu l'impression que les dix dernières années avaient été effacées...
Très bel article, très émouvant :-)
RépondreSupprimerUne sorte de voyage dans le temps!
RépondreSupprimerEt oui, les cadets n'ont pas eu le privilège d'être enfants uniques ! Le numéro 3bis (oui, des twinx ici aussi) avait une façon bien à lui de s'accrocher à son père qui n'avait pas d'autre choix que de l'emmener partout où il aurait rêvé d'aller tout seul : chez monsieur Bricolage par exemple ! On est enfant unique comme on peut !
RépondreSupprimerJ'imagine le bonheur du Filou ! Apparemment le coiffeur ne lui a pas procuré la même volupté !
Le plus fort, c'est que contrairement à ce qu'on pourrait croire, le Filou n'était pas du tout enchanté d'être fils unique, et n'attendait qu'une seule chose, le retour des autres, en particulier de Mr Thing Two... c'est le seul de la fratrie qui n'émet jamais le désir d'être seul avec ses parents, même juste vingt minutes, le temps d'aller acheter du pain !
SupprimerPeut-être se demande-t-il pourquoi il n'a pas de jumeau ?
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