mardi 4 mars 2014

Que faire ?

On me propose la traduction d'une série de fantasy. Jusque là, tout va bien. Seulement,  les héros de cette série sont des animaux. Des animaux humanisés, bien sûr, qui parlent, qui tombent amoureux, qui utilisent des outils, mais des animaux quand même.
Et moi, je suis de ceux qui, même s'ils apprécient Les 101 Dalmatiens, La belle et le Clochard, Bernard et Bianca, Les aristochats, etc., ne peut pas les classer parmi leurs Disney préférés parce qu'ils ont trop de mal à s'identifier à un chien ou une souris.
Sans compter qu'il faudrait que je case ce roman de 300 pages avant l'été, alors que, même si une de mes traductions a été annulée, j'estimais avoir assez de boulot pour travailler sans me tuer à la tâche jusqu'en juillet.

Que faire ?

Bien sûr, si j'avais un planning qui affiche complet ou presque pour les douze mois à venir, je n'hésiterais pas : je refuserais sans état d'âme, et avec un certain soulagement.
Mais ce n'est pas le cas. Une de mes éditrices m'a annoncé qu'elle allait réduire le nombre de traductions, et ma série en cours est sur le point de se terminer.
Bien sûr, si je n'avais pas de boulot en vue, je n'hésiterais pas : j'accepterai sans état d'âme, et avec un certain soulagement.
Mais ce n'est pas le cas. J'ai deux gros roman sous contrat, quelques textes plus courts, et des projets sous le coude qui pourraient enfin se concrétiser.

Que faire ?

— Il faut que tu sois raisonnable, me conseille Darling.
D'accord.
C'est-à-dire ?
Être raisonnable, c'est essayer de gagner un maximum d'argent, vu que notre changement de domicile m'a laissée avec un prêt immobilier sur le dos ? C'est accepter cette nouvelle série, pour continuer à travailler régulièrement avec cet éditeur qui, sinon, ne fera peut-être plus appel à moi de sitôt ? C'est engranger quelques économies pour le jour où on découvrira qu'il faut refaire le toit, ou que je n'ai plus de contrat en vue ?
Ou bien être raisonnable, c'est me dire qu'à chaque jour suffit sa peine, que je ne veux pas revivre des périodes de stress telles que j'en ai trop connues ces derniers temps, que si ce roman ne m'enthousiasme pas les mois qui viennent vont me paraître longs, que j'ai aussi envie d'écrire, que je ne veux pas attendre d'être à la retraite pour me mettre au jardinage et me remettre au jiu-jitsu, et qu'il n'y a pas que le boulot et les enfants dans la vie ?

Que faire ?

10 commentaires:

  1. Que conseillerais-tu à un ami dans ton cas ?

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  2. Si ça te saoule d'avance et que en plus ça risque de te pourrir la vie, refuse !

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  3. 4F : De refuser. Mais on est plus courageux pour les autres que pour soi-même. Et si je découvre fin juin que je n'ai plus aucun boulot en vue ? Avec le salaire mensuel de Darling, on tient une semaine... D'un autre côté, ça me donnerait peut-être enfin l'occasion de me bouger pour trouver autre chose, de sortir de ma "zone de confort" ?

    Aude : je ne pense pas que ce soit mauvais, objectivement. Il paraît que ça ressemble beaucoup à Warriors. ;-) C'est juste que si ça avait été, que sais-je, une belle histoire d'amour entre une magicienne et un fantôme, ou une enquête de détective dans l'Angleterre victorienne, je me serais posé moins de questions, parce que je n'aurais pas eu envie de laisser ça à d'autres !

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  4. Mais vu d'une autre façon, si tu refuses (et que tu recommandes Aude ;) ), tu te réserves l'occasion d'accepter un texte qui te botte vraiment d'ici là.

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  5. SI on m'en propose un... Je sais bien, c'est vraiment la loterie !

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  6. C'est vraiment la loterie pure et dure, ou bien tu peux faire un pronostic sur la probabilité de te voir proposer un texte qui correspond plus à ton goût à rendre dans les mêmes délais?
    Si tu penses que ça va te faire louper un super livre, refuse.

    Concernant la charge de travail : si on te proposait maintenant un nouveau Harry Potter ou Sally Lockhart, tu accepterais, non? Et tu aurais autant de stress (mais plus de plaisir je te le concède).

    Concernant la "sécurisation de l'emploi" : est-ce qu'accepter le premier tome ça t'engage pour tous les autres et du coup tu as du travail assuré sur du long terme? Ou bien tu peux renoncer après le tome 1 parce que finalement c'est une purge ce bouquin?

    Ficelle

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  7. C'est vraiment la loterie : je n'ai pas de véritables projets en ce moment, sauf un. Je ne pense pas qu'on me fasse une autre proposition plus intéressante à si court terme, et je n'en ai pas spécialement besoin : je pense plutôt à la suite. Si j'ai fait le tome 1, je peux toujours refuser de faire la suite après (je ne signe le contrat que pour le premier), mais l'éditeur me "réserve" les deux tomes suivants, donc ajouté à ce que j'ai déjà, ça veut dire du boulot assuré jusqu'à Noël, au moins... C'est rassurant !

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  8. (Julien)
    Tu demandes notre avis, alors je donne le mien comme il vient.

    A ta place je dirais non, et je pense que tu en as déjà décidé ainsi.
    Les journées ne sont pas étirables à l'infini, tu as déjà des journées doubles et une traduction d'ici juillet.
    Si tu te prends un burn-out derrière l'oreille, tu pourras dire que c'est la faute de cette traduction, alors qu'en fait c'est tout ce qu'il y a autour aussi. La santé et le goût à son travail c'est un truc lent à récupérer.

    Au bilan, la balance se fait entre soit dire non par sécurité (ta santé) (protéger le plaisir que tu trouves dans ton travail), soit jouer quitte ou double en acceptant cette traduction qui sera peut-être une agréable surprise.
    (Ou alors, si le roman est nul, peut-être qu'au moins le niveau de langue se laisse traduire "finger in the nose")

    Comme dit 4F, en disant non, tu laisses la place pour que la surprise vienne d'ailleurs.

    En bonne stakhanoviste, je te sais capable de réussir à faire cette traduction en plus.

    Comme plan B, si tu as comme filet de secours une bonne amie traductrice -ou traducteur- dans ton entourage, quelqu'un pour sous-traiter une partie de la traduction en juin ou certaines parties chronophages du travail (trucs intraduisibles, relecture?)-. Ca diminuerait le risque pris.

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  9. Bon, finalement, vu votre unanimité, j'ai... accepté.

    Je sais, je sais...

    Ce n’est pas très courageux. J’ai peut-être perdu l’occasion de frapper à d’autres portes, d’essayer d’autres choses. Mais c'est vraiment rassurant de me dire que mon banquier peut dormir sur ses deux oreilles jusqu'en 2015, et puis j'avais envie de continuer à bosser pour cette boîte avec qui ça se passe toujours très bien, et ma série en cours se termine.

    Et si on me propose un roman historique drôle et émouvant avec des personnages nuancés et des dialogues menés tambour battant, et que je dois refuser, ben... tant pis !

    PS : Julien, utiliser un "nègre", ce n'est vraiment pas professionnel, outre à être illégal et immoral. Et le plus chronophage, de toute façon, c'est... la traduction elle-même !

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  10. Je t'approuve : tu sécurises un minimum de boulot. Si tu te retrouves en manque de traduction, il sera bien temps à ce moment là d'aller "courir les castings".

    Et une série qui ne te fait ni chaud ni froid, ça te laissera peut-être l'esprit libre pour tes propres héros de tes futurs romans?

    Ficelle

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