— Non, dans un Institut Thérapeutique Éducatif et Pédagogique... Ah, si, en fait.
— Oh la la. Oh la la. Eh ! bien, bonne chance... Tu me raconteras...
— Mais pourquoi as-tu accepté ? m'avait demandé une amie.
— Ben, en fait, j'ai accepté avant de vraiment comprendre de quoi il s'agissait, et puis au début je croyais que je n'irais qu'une seule fois. Tu crois que je n'aurais pas dû ?
— Bah, tant pis, ça te servira de leçon. Tu sauras ce qu'il faut refuser à l'avenir !
— Vous pouvez faire cinq interventions dans la journée ? m'avait demandé la directrice de l'ITEP.
— Ah non, le maximum c'est trois. C'est déjà épuisant, vous savez. Mais les enfants sont si peu nombreux qu'on peut les rassembler, non ?
— Je peux essayer de rassembler les trois groupes de l'après-midi pour n'en faire que deux, mais pas les deux du matin, parce que les élèves ne s'entendent pas du tout. Du tout. Je vous assure que c'est mieux, même pour vous : sinon, il faudra passer tellement de temps à gérer les conflits que vous ne pourrez rien faire.
— Mais tu ne seras pas toute seule avec les enfants ? m'avait demandé Darling.
— Non, bien sûr, il y aura leur instit ou leur prof.
— Mais aussi des vigiles, des gardes du corps, hein ?
Et en fin de compte, ce que j'ai eu en face, moi, ce sont des enfants à peu près comme les autres ; certes, selon les cas, excessivement bavards, ou excessivement timides, ou vaguement agressif, ou très déconcentrés, ou un peu "déficients" (comme on dit poliment). Des enfants avec un lourd passif, aussi, pour la plupart, avec des situations de famille parfois terribles, et avec une éducation culturelle limitée ou inexistante ("Moi, une fois, je suis allée dans une librairie", m'a dit l'un d'eux, ce qui m'a un peu noué la gorge). Mais ça ne m'a pas dérangé d'expliquer la différence entre un album et un roman, même quand j'ai découvert que ni Petit bleu et Petit jaune, ni Max et les maximonstres, ni même Petit Ours Brun ne leur évoquait quoi que ce soit ; ça ne m'a pas dérangé de répondre à quelques questions incongrues, comme mon animal préféré ou les sports que je pratiquais, ou même si j'étais la petite amie de l'éducateur ; ça ne m'a pas ennuyée d'expliquer quatre fois de suite ce qu'était (en très gros) la chaîne du livre, pourquoi l'auteur et l'éditeur et même l'éditeur et l'imprimeur étaient des personnes différentes, et à quoi servaient les correcteurs, les metteurs en page, les distributeurs, etc. ; ça m'a amusée de leur montrer les mêmes livres dans deux langues différentes, voire dans deux éditions différentes en français, même s'ils ne m'ont pas vraiment crue quand je leur ai expliqué que c'était le même texte (ce n'était pas la même taille, ni la même illustration de couverture) jusqu'à ce que je leur mette le poche sous le nez et que je leur lise à voix haute ce qui était écrit dans le grand format ("Oh dites donc, madame, c'est exactement les mêmes mots !"). Je n'ai pas toujours réussi à capter leur attention, je ne suis pas certaine de m'être expliquée correctement à chaque fois, mais dans l'ensemble, je pense que cette journée était intéressante, pour eux comme pour moi. Et en partant, j'ai signé pour au moins deux autres interventions dans les trois mois à venir. Même
Je trouve l'idée super et ta ténacité remarquable ! Je ne suis pas sûre que dans les écoles dites "normales", les enfants soient tous plus au fait de tout ce que tu as expliqué mais peut-être y vas-tu déjà ?
RépondreSupprimerAu fait, tu peux dire à Darling que dans ma médiathèque, on a des vigiles. Si !
Est-ce que tu as eu droit à des muffins?
RépondreSupprimerMoi j'étais sûre que ça se passerait très bien. Comme Ariane, je pense que les enfants des écoles ordinaires ne sont pas très différents, et ils n'ont pas la chance d'avoir un éducateur aussi formidable.
Ce fut une expérience très enrichissante pour ces enfants, crois-moi! J'en tiens pour preuve leurs questions quotidiennes sur la date de ton prochain passage! Cela leur a offert un espace-temps ressourçant dans le quotidien parfois répétitif de l'institution, et je suis certain que l'effet positif de ta participation s'en ressentira davantage aux prochaines séances!
RépondreSupprimerPour ma part, même s'il n'y avait pas de muffins (shame on me, d'autant plus que c'est une auteure/traductrice affamée que j'ai accueillie à sa descente de train ^^'), ce fut un plaisir de partager cet événement et de t'accompagner au cours de cette journée. Te faire découvrir les joies de la campagne, cette région où les transports en commun brillent par leur absence, où les hôtel cachent les clef dans les pots de fleurs, et où le seul restaurant étoilé d'ouvert un dimanche ressemble à un "dinner" thématique du quartier country d'Eurodisney. Heureusement, le fromage local, spécialité départementale, a conquis ton estomac. L'honneur est sauf ;)
Au plaisir de la prochaine séance! =D
PS: Pas si formidable, l'éducateur... la preuve, même pas de muffins à la descente de train, quelle honte! Non, je suis juste un bidouilleur opportuniste du quotidien qui fait occasionnellement la course à l'échalotte aux enfants réfractaires au coucher ;)