lundi 8 août 2016

Le coup de la panne (deuxième partie)



(Suite du billet précédent)

(Je jure que je n’ai rien exagéré ; j’ai même largement coupé les redites, certains appels inaboutis, etc. En réalité, j’ai dû passer en tout cinq heures au téléphone dans la journée. Heureusement que l'amie chez qui j'étais avait un chargeur compatible avec mon portable.)

Donc, il est 18h20, ma voiture a été embarquée par la dépanneuse, et j’attends qu’Avis ou Europe Assistance me trouve un véhicule de remplacement. On m’a promis de me rappeler. Ce qu’on a fait, juste au moment où j’étais avec le dépanneur : je n’ai pas pu répondre. Je rappelle, et tombe sur une voix enregistrée :
— Vous ne pouvez pas appeler ce numéro.
Je téléphone encore une fois à Avis Assistance en France.
— Désolé, on a transféré le dossier à Avis Assistance Italie.
Je téléphone à Avis Assistance Italie.
— Si vous avez un problème technique avec votre véhicule, tapez un. Si vous désirez changer de véhicule pour toute autre raison, tapez deux.
Je tape un.
La ligne est coupée.
Je réessaie.
Idem.
Je recommence, et je tape deux.
— Nos bureaux sont ouverts du lundi au vendredi de 8h à 18h. Veuillez rappeler ultérieurement.
Je rappelle Europe Assistance.
— Désolée, mais Europe Assistance peut seulement vous envoyer une dépanneuse, pas vous trouver un autre véhicule : c’est du ressort d’Avis. Essayez la centrale réservation. Je vais quand même chercher de mon côté, et je vous rappellerai.
J’appelle la centrale réservation d’Avis.
— Désolé, nous n’avons pas de véhicule à sept places disponible dans votre région actuellement.
— Bon, alors donnez-moi une voiture normale jusqu’à lundi : pour l’instant nous sommes cinq.
— Rien de disponible, désolé.
— Comment ça, rien de disponible ? Mais alors je fais quoi ? Je suis coincée loin de chez moi avec mes quatre enfants, et…
— Pas la peine de vous énerver, madame ! Si je vous dis qu’il n’y a pas de véhicule disponible, c’est comme ça, je ne peux pas en inventer un !
— Mais… qu’est-ce que je suis censée faire ?
— Ce n’est pas mon problème : c’est une centrale de réservation, ici. Au rev…
— Attendez ! Il doit bien y avoir un service client, chez Avis, non ? Donnez-moi le numéro.
— 011 213…
Et après m’avoir dicté le numéro d’une voix exaspérée, il raccroche sans ajouter un mot, très agacé par mon incapacité à me tirer d’affaire toute seule.
J’appelle le service client.
— Nos bureaux sont ouverts du lundi au vendredi de 9h à 18h. Veuillez rappeler ultérieurement.
Je rappelle Europe Assistance.
— Ah oui, alors en fait nous ne vous avons pas rappelée parce que comme nous n’avons pas votre numéro de contrat de location, Avis nous a dit qu’on ne pouvait rien faire.
— Hein ? Mais vous plaisantez ? Jusqu’ici, mon nom et le numéro d’immatriculation du véhicule suffisaient, en tous cas ça a suffi pour enlever la voiture, mais pas pour m’en trouver une autre ?
— Désolée.
Je n’ai pas le contrat de location sur moi. Je rappelle Avis Assistance France.
— Désolé, mais en fait nous ne sommes pas vraiment Avis mais une société de sous-traitance, donc nous n’avons pas accès à la base de données d’Avis. Mais je vais vous donner le numéro de téléphone d’une agence encore ouverte, à l’aéroport, ils pourront vous donner votre numéro de contrat.
J’appelle l’agence Avis de l’aéroport de Roissy.
— Tous nos correspondants sont occupés. Veuillez rappeler ultérieurement.
J’appelle l’aéroport d’Orly.
— Attendez une minute, madame.
Pendant un quart d’heure, j’entends l’homme qui m’a répondu débiter des explications à un client dans un anglais exécrable, mais il finit par reprendre le téléphone et par me donner le numéro du contrat.
À ce stade, il est 21h. Les enfants sont en train de manger une pizza.
Je rappelle Europe Assistance en Italie.
— Alors, à cette heure-ci il n’y a plus que des agences dans des aéroports qui soient ouverts, mais je vais me renseigner. Je vous rappelle.
(Interruption. Je colle mes gamins devant Shrek, retrouvé providentiellement sur une clef USB qui traînait dans mon sac – non, ce n’est pas du piratage, j’ai le DVD à la maison – et je mange à mon tour.)
A 21h55, on me rappelle.
— J’ai trouvé un véhicule disponible à l’aéroport le plus proche.  Mais c’est une voiture à cinq places seulement. Il faudra que vous vous arrangiez avec eux pour avoir un véhicule plus grand ultérieurement.
— Dans l’état de désespoir où je suis, je suis prête à tout accepter. On va me l’apporter ?
— Ah non, bien sûr que non, il faut que vous alliez la chercher.
— A l’aéroport ? A trente kilomètres d’ici ? Avec quatre enfants ? A dix heures du soir ?
— Ah oui, désolée.
— On me remboursera le taxi, au moins ? Ou plutôt les deux taxis, puisque nous sommes cinq ?
— Je ne sais pas. Peut-être. Je vais vous donner le numéro de l’agence Avis pour que vous vérifiiez avec eux les modalités de retrait du véhicule. 011 545…
Je téléphone à l’agence de l’aéroport.
— Tous nos opérateurs sont occupés. Veuillez cependant rester en ligne pour ne pas perdre votre priorité. Tous nos opérateurs sont occupés. Veuillez cependant rester…
Cela dure dix minutes, puis ça coupe.
Je réessaie.
Même jeu.
Je recommence.
Idem.

C’est à ce moment-là que j’ai laissé tomber. J’ai compris que je n’arriverais pas à rentrer dormir chez moi. Mon amie nous a préparé au débotté cinq couchages. J’ai enfin pris une douche et j’ai remis avec une grimace mes vêtements imprégnés de sueur, puisque je n’avais aucune tenue de rechange. Nous avons dormi en sous-vêtements, sans nous laver les dents. La nuit se serait bien passée, si je n’avais eu des insomnies à cause de mon énervement, et si Miss Thing One, qui partageait mon lit, ne m’avait réveillée alors que je me rendormais enfin à six heures du matin :
— Maman, un mouchoir, vite ! J’ai le nez qui coule !
— Hein, quoi ?
— Ah non, c’est du sang !
Ma sœur aussi saignait parfois du nez la nuit quand il faisait chaud, donc je ne me suis pas affolée, et la gamine non plus. Mais je défie quiconque de se rendormir après avoir couru jusqu’à la salle de bain en laissant une traînée rouge derrière soi, lavé la fillette qui en avait jusqu’aux pieds, lavé le sol de la salle de bain et du couloir, enfoncé du papier toilette dans une narine plusieurs fois de suite jusqu’à ce qu’il en ressorte blanc, etc.
Bref, tant bien que mal, la nuit a passé, et le moment de repartir au combat a sonné…

(Suite et fin – j'espère – au prochain numéro)

4 commentaires:

  1. Logiquement, s'il ne peuvent être en mesure de te fournir un véhicule, ils doivent te payer le taxi ou l'hôtel...Tu t'en es sortie ou pas ?

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  2. Je compatis mais à un point... Les miens sont grands mais quatre en cinq ans, ça pose le même genre de problème !
    J'attends la suite en retenant mon souffle (ne traine pas trop !)

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  3. Je suis consternée par autant de j'm'en foutisme. Je compatis et espère un dénouement rapide et surtout un dédommagement!!!

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