vendredi 30 mars 2012

Agressivité

Au début, c'était de vraies caresses.
Puis la main s'est fait de plus en plus lourde,
est descendue de plus en plus vite,
les doigts se sont refermés de plus en plus forts...

Note à moi-même : ne jamais laisser le Petit à portée de Miss Thing One s'il n'y a pas son père ou moi juste à côté, et avec une main libre pour pouvoir le défendre.

(Mr Thing Two est moins agressif ; en revanche, il y a toujours le risque qu'il trébuche sur le bébé sans l'avoir fait exprès, ou l'assomme involontairement avec un jouet lancé à travers la pièce, ou encore essaie généreusement de le forcer à avaler un morceau de pain. Méfiance, donc.)

mercredi 28 mars 2012

Fenêtre sur cour

Quiconque a pu voir ce bel homme toquer discrètement à la fenêtre de ma chambre, hier matin, a dû se dire que j'étais tout de même courageuse gonflée de recevoir ainsi mon amant une dizaine de jours à peine après mon accouchement.
En fait, l'explication est moins romantique : Darling a oublié ses clefs en emmenant les mômes à la crèche, j'avais passé une nuit tellement épouvantable que je me suis recouché dès la porte d'entrée refermée, et j'ai sombré dans un sommeil si profond que je n'ai pas entendu la sonnette sur laquelle Darling a désespérément appuyé à son retour.
Du coup, il a profité du fait que la fenêtre de notre chambre donne sur une cour surélevée, en théorie interdite au public, pour entrer par là.

Et si, au lieu d'être au premier étage, nous avions été au quatrième ou au onzième, il aurait fait quoi ?

Perplexité

Je sais bien que nous sommes tous différents.
Que nous n'avons pas les mêmes passe-temps, les mêmes envies, les mêmes désirs.
Que le monde serait triste si tout le monde nourrissait les mêmes rêves.
Que bien des gens doivent se demander comment on peut demander un étendoir à pâtes fraîches ou un moule à kouglof comme cadeau d'anniversaire.
Que certaines personnes tiennent à être physiquement parfaites jusqu'au bout des ongles.
Qu'on n'attache pas tous de l'importance aux mêmes choses.

Mais quand même, y a-t-il vraiment des femmes qui peuvent être séduites par une publicité pour "le seul épilateur à lumière pulsée sans fil doté d'une tête spéciale visage équipée d'un filtre UV avec une vitesse de flashage 30% plus rapide" ?

mardi 27 mars 2012

Solidarité fraternelle

Miss Thing One revient de la crèche et me trouve avec le Petit, éveillé, dans les bras. Pendant que Mr Thing Two s'éloigne après un câlin express (une demi-seconde), elle me tient un discours sévère – et muet, car elle met aussi peu d'enthousiasme à apprendre à parler qu'elle en a mis à apprendre à s'assoir ou à manger seule. Elle fronce les sourcils d'un air mécontent, désigne le bébé, pose la main sur ma poitrine, puis, comme je n'obéis pas assez vite, sourcils plus froncés que jamais, elle soulève mon T-shirt.
En clair, elle me somme de lui donner le sein.
Ce que je fais. Je suis une mère très disciplinée.

Quelques heures plus tard, voyant le Petit dans les bras de Darling, elle recommence son manège avec lui. En vain, cependant, cette fois.
C'est bien la preuve que c'est moi la plus gentille, non ?

lundi 26 mars 2012

Des albums pour préparer l'arrivée d'un bébé

Il existe de très nombreux livres pour préparer la naissance d'un bébé avec son futur grand frère ou sa future grande sœur. Plus ou moins ludiques, plus ou moins tendres, drôles ou instructifs, de la petite histoire mignonne au documentaire, le choix est vaste.
Mais il y a deux catégories d'enfants qui ont été un peu oubliés par les éditeurs : les enfants très jeunes (moins de deux ans) et les enfants déjà grands (plus de cinq ans). Normal : hors familles recomposées, l'écart moyen entre frères et sœurs tourne plutôt autour de trois ou quatre ans.

Comment donc expliquer une grossesse à un enfant qui ne sait même pas parler et qui n'est pas assez vieux pour se souvenir que, six ou huit mois plus tôt, maman n'avait pas un si gros ventre et était encore capable de se relever seule après s'être agenouillée sur le sol ? Après de nombreuses recherches, les meilleurs livres que j'ai trouvés pour les plus jeunes sont les suivants :

- Et dedans, il y a..., de Jeanne Ashbé (l’École des Loisirs, 1997). Un livre petit format, très court (dix doubles pages), avec des volets, qui permet d'explorer l'intérieur des choses : celles qu'on peut ouvrir (une valise...), celle qu'il ne faut pas ouvrir (un ballon...), et celles qu'on ne peut pas ouvrir (le ventre de maman). La dernière page montre le bébé, enfin né, avec son grand frère.
- Et après, il y aura..., de la même auteure (l’École des Loisirs, 2000). Même format, même principe : en trois parties, il présente d'abord des choses de tous les jours (après les chaussettes, on met les chaussures ; après avoir renversé un verre, il faut nettoyer...), puis la future vie avec le bébé (après son bain à lui, il y aura ton bain à toi ; après la tétée, il y aura ton goûter). Encore une fois, c'est vraiment très court, mais du coup, c'est parfait pour un tout petit à qui il est parfaitement inutile d'expliquer comment se nourrit le foetus ou comment se déroule l'accouchement.

Quant aux plus grands, il n'y a pas grand-chose pour eux non plus. Il faut dire qu'à six ou sept ans, ils n'ont pas besoin qu'on leur raconte un album pour leur annoncer une grossesse. Ils ont déjà le bagage intellectuel suffisant pour comprendre ce qui se passe, pourquoi, et comment, du moins en gros. En revanche, bon nombre d'entre eux n'ont jamais vus un bébé de près, ou presque, et ignorent tout de ces petits machins bruyants. A ceux-là, je recommande Moi, je connais bien les bébés de Myriam Szejer (Albin Michel, 2002). Ce livre ne parle pas de la grossesse, mais de ce qui se passe après : il nous montre un garçon de cinq ans qui fait connaissance avec son nouveau petit frère, et chaque petite scène de la vie quotidienne (bébé prend son bain, pleure sans cesse...) est suivie d'une double page qui résume le développement d'un nouveau-né et les recommandations de la puériculture (il peut dormir à la lumière du jour ; il faut lui expliquer ce qu'on va lui faire ; etc.). Ouvertement didactique, mais très intéressant, cet ouvrage peut aider un grand à accepter plus facilement de nouvelles règles de vie, et à se sentir moins démuni face à cet extra-terrestre qui vient de débarquer chez lui  !

dimanche 25 mars 2012

Emploi du temps nocturne

21h30, je vais me coucher. J'ai eu un samedi épouvantable car les Things étaient de très mauvaise humeur, et je n'ai pas pu faire de sieste. Vendredi non plus, d'ailleurs. Ni jeudi.
22h, le Petit se réveille. Je lui change la couche et le mets au sein.
22h30, j'entends Miss Thing One crier. Je laisse le Petit dans mon grand lit et je vais voir ce qui se passe.
23h, après avoir essayé par tous les moyens de calmer les deux Things, j'appelle SOS médecin.
23h30, le médecin arrive et examine les gamins. Verdict : angine blanche pour elle, double otite pour lui. Darling part à la pharmacie avec l'ordonnace.
00h, Darling revient bredouille. Les deux pharmacies de garde proches de chez nous, normalement ouvertes respectivement jusqu'à minuit et toute la nuit, sont fermées. Oui, toutes les deux.
00h30, Doliprane pour Miss Thing One, Célestène pour Mr Thing Two qui a l'air d'avoir vraiment mal, et au dodo. On en profite pour recoucher aussi le Petit qui était resté dans notre propre lit depuis tout à l'heure.
1h, je chante pour la dix-septième fois en boucle "Le vieux moulin" à Mr Thing Two qui n'arrive pas à s'endormir. le Célestène, ça énerve. Mais c'était ça ou le laisser souffrir. Le choix était vite fait.
1h30, je sors de la chambre à pas de loups. Au bout de deux fausses sorties, c'est bon, ils dorment.
2h, je viens de m'allonger quand le Petit se réveille. Je lui change la couche et le mets au sein.
2h30, je le recouche dans son lit.
3h, je dors. Mais si !
3h30, je dors encore. Mais si, mais si !
4h, le Petit se réveille. Je zappe le change, je le nourris directement.
4h30, je le recouche.
5h, je dors. C'est fou.
5h30, un des Things pleurniche. Je me précipite, mais ça s'arrête tout seul. Miracle.
6h, le Petit se réveille. Je le mets au sein.
6h30, j'hésite, puis finalement, je ne le recouche pas. Je sais que ça ne vaut pas la peine de prendre le risque qu'il se réveille, car...
7h, Mr Thing Two réclame son biberon, parfaitement ponctuel comme tous les matins. La journée commence.

Et puis en fait, en me levant, j'ai vu qu'il était huit heures et non pas sept heures par la magie du passage à l'heure d'été. Du coup, j'ai presque eu l'impression d'avoir dormi une heure de plus, et ça m'a mise de bonne humeur. En plus ça voulait dire que la pharmacie était déjà ouverte : Darling est allé acheter les médicaments en même temps que les croissants du dimanche.

samedi 24 mars 2012

Alliance

Sur certains sites, on vend de très jolis bijoux d'allaitement. En quoi ça consiste ? En une bague ou un bracelet réversible sur lequel est écrit "right" d'un côté et "left" de l'autre, et qui sert d'aide-mémoire pour se rappeler quel est le sein qu'on a donné pour la dernière fois au bébé. Sur les plus sophistiqués, il y a même des chiffres, pour noter l'heure de la tétée. De telle manière, quand le petit bonhomme pleure, on peut dire "Ah, la dernière fois, tu as eu le sein droit, donc maintenant c'est le tour du gauche".
J'avais découvert ça quand j'étais enceinte des Things, mais avec deux zigotos à allaiter successivement, souvent même simultanément, ça ne m'aurait pas servi à grand-chose.
Enceinte du Petit, donc, je me suis dit que j'allais me pencher sur la question. Sauf que bon, est-il bien nécessaire de dépenser de l'argent pour un bijou que je ne mettrai que quelques mois dans ma vie ? Une simple bague à porter alternativement à la main droite et à la main gauche ne ferait-elle pas l'affaire ?

Au retour de la maternité, j'ai donc essayé toutes mes bagues. Sauf qu'après la grossesse, figurez-vous qu'on a les doigts légèrement enflés pendant quelques jours ou semaine, ne me demandez pas pourquoi, j'ai lu ça quelque part mais j'ai déjà oublié. Bref, il n'y en avait aucune que je pouvais enfiler assez facilement pour l'ôter huit ou dix fois par jour.
Et puis je suis tombée sur une alliance, qui devait appartenir à mon père ou à ma grand-mère paternelle et qui a atterri dans ma boîte à bijoux. Une alliance toute simple, en or, sans date ni nom à l'intérieur. Et pile à la bonne taille en ce moment, même pour mon annulaire droit, légèrement plus large que le gauche.
Depuis quatre jours, je porte donc une alliance pour la première fois de ma vie.
Les gens vont croire qu'au bout de quatre enfants, je me suis enfin décidée à faire de Darling un honnête homme.

(Cela dit, ces jours-ci, je n'ai nul besoin de consulter la bague pour savoir quel sein donner quand le Petit réclame. Pas d'erreur possible : c'est celui qui est sur le point de faire exploser le bonnet G de mon soutif et d'inonder le lit ou le canapé.)

vendredi 23 mars 2012

Picardises

Depuis mon retour de la maternité, je n'ai pas le temps de cuisiner. Les Things sont au régime "petits pots" alors qu'ils n'en avaient pas mangé depuis des mois, et le reste de la famille au régime "Picard".

Ce n'est pas mauvais, Picard. Une fort bonne base quand on utilise les ingrédients "bruts" tels que les légumes coupés, les herbes aromatiques ou les morceaux de viande crus, et tout à fait correct même en ce qui concerne les plats cuisinés.

Mais tout de même, il y a quelque chose qui me chiffonne.
Sur chaque plat préparé, gratin, poêlée etc. de la gamme "Esprit de famille", il est indiqué "pour trois à quatre personnes".
Or, tous les midis depuis mon retour de la maternité, Darling et moi en consommons un paquet entier sans en laisser une miette. Je pense que Darling pourrait aisément en terminer un à lui tout seul, et moi aussi, en me forçant un peu.

C'est Picard qui est un radin, ou nous qui sommes des goinfres ?

jeudi 22 mars 2012

Quelques mots sur le Petit

Il est donc né à huit mois et cinq ou six jours, et pesait déjà 3,800 kg à la naissance. Je comprends pourquoi les médecins avaient hâte de déclencher l'accouchement.

Il est en parfaite santé, pas d'hypoglycémie ni d'ictère ni rien, avec le bon nombre de bras, de doigts, de testicules, d'oreilles, etc.

Il est assez calme, pour autant qu'on puisse en juger à six jours de vie : il pleure très peu, seulement quand on est vraiment très méchant avec lui, par exemple quand on lui change la couche alors qu'il a faim. Mais bon, vu l'exemple donné par les autres membres de la famille, il se peut que ça ne dure pas.

Il tête sans problème, il avait déjà repris du poids le jour de la sortie de la maternité. Il faut dire que j'ai assez de lait pour en nourrir trois comme lui (au moins deux, en tous cas : je l'ai prouvé).

Il était très moche à la naissance, même si Darling ne l'admettra jamais. D'une charmante couleur violacée, pour cause de cordon autour du cou, et avec le crâne tout allongé vers l'arrière, très Neandertal.

Maintenant il est raisonnablement mignon, avec une peau plutôt claire, des cheveux vaguement châtains, des yeux vaguement bleu foncé, une toute petite bouche, enfin bref, modèle standard. Ce qui ne nous empêche pas de nous extasier, bien sûr.

Il dort beaucoup mieux le jour que la nuit, comme n'importe quel bébé qui veut faire enrager ses parents, et beaucoup mieux dans mon lit que dans le sien, ce qui ne me convient pas du tout, car je ne suis pas une adepte du cododo.

Il a déjà arrosé ses deux parents tour à tour de pipi et de caca en jet au moment du change, pour nous prouver son affection.

Après avoir bien bu, il se tortille et fait une affreuse grimace à la Winston Churchill, puis sourit béatement et s'endort avec une goutte de lait au coin des lèvres.


Enfin bref, un nouveau-né parfaitement ordinaire, qui ressemble à tous les autres.

Mais c'est le mien.

mercredi 21 mars 2012

Tout un fromage

Il n'a pas fait une seule lessive pendant mon absence, et le coffre à linge sale débordait. Il n'a lavé les Things qu'une seule fois, alors qu'ils jouent dehors tous les jours. Il a utilisé jusqu'au dernier petit pot en réserve, et ne s'est pas demandé avant l'heure du dîner ce que les gamins allaient manger quand je suis revenue de la maternité. Il ne m'a pas fait de cadeau, alors que pour une fois, j'aurais bien aimé un bijou, un souvenir. Il n'a pas rangé la maison, alors que la femme de ménage devait venir.

Mais il y avait un Mont d'or au lait cru qui m'attendait dans le frigidaire.

Bon, allez, je lui pardonne tout.

Annonce de service

Pour des raisons hormonales et organisationnelles indépendantes de notre volonté, ce blog ne sera plus pendant quelques temps celui d'une traductrice, mère de famille nombreuse, et cuisinière émérite, mais celui d'une mère tout court.
Nous faisons notre possible pour rétablir le service dans son intégralité dans les plus brefs délais.
Merci de votre compréhension.

mardi 20 mars 2012

Accouchement

Vendredi 16 mars, 10 h du matin. J'arrive à la maternité pour le monitoring. L'infirmière me fait faire pipi sur une bandelette, me pèse, prend ma tension, puis une sage-femme m'installe sur la table avec les capteurs.
— Tout va bien depuis mardi ?
— Oui, tout va bien, mais j'ai bien cru que j'allais accoucher mercredi, blabla, perte du bouchon muqueux, blabla, bébé très bas, blabla, contractions...
— Bon, alors on va quand même vérifier que vous ne perdez pas de liquide amniotique.

11 h du matin. La sage-femme examine la bandelette.
— Ah, on dirait que vous avez fissuré la poche des eaux.
— Vous êtes sûre ?
— Regardez vous même. Vous voyez la bande rose ?  Ça veut dire que vous perdez du liquide amniotique.
— Et donc ?
— Et donc on va vous déclencher, probablement demain. Si la poche est fissurée, il y a risque d'infection. On va aller en salle de travail, et la sage-femme va vous mettre un tampon qui va faire maturer le col sous 24 heures.

Midi. Dans la salle de travail, la sage-femme examine mon col.
— Oh, mais il est déjà à deux doigts ! Pas besoin de tampon. On va vous déclencher tout de suite. Je vous pose la perfusion d'ocytocines pour provoquer les contractions.
— Mais j'ai déjà des contractions toutes les sept ou huit minutes !
— Raison de plus.
— Mais alors... Je vais accoucher aujourd'hui ?
— Bien sûr.
— Je peux passer des coups de fil ?

13h. Après quinze coups de téléphones, j'ai réussi à trouver quelqu'un qui va prendre en charge les Things ce soir, à faire avertir le Grand qui ira passer la nuit chez un copain, à annuler le dîner programmé avec ma copine, à joindre Darling qui quitte le boulot, mange un morceau et arrive dès qu'il le peut. La sage-femme m'a posé la perfusion.
— Je vous la met à dose homéopathique, en attendant votre mari. Et puis j'ai deux autres dames qui sont presque complètement dilatées, on va commencer par elles.
— Heu... OK.

14h. Darling est là, la valise aussi, les deux autres dames ont accouché. J'ai deux perfusions, une à chaque bras, qui me diffusent en continu quatre produits différents (on ne rigole pas avec une patiente diabétique ET dont le gosse risque une infection pour cause de fissure de la poche des eaux).
— Bon, je vais vous augmenter les ocytocines, et puis je vais rompre la poche des eaux.
— Ah non ! Ah non, les contractions sur une poche des eaux vide, j'ai déjà donné, ça fait MAL !!!!
— Mais ça accélérerait les choses !
— On ne peut pas anesthésier, avant d'accélérer ?

15h. On m'a posé la péridurale, je ne sens plus mes jambes, en fait je ne sens plus rien, et franchement, vu le souvenir que j'ai de mes accouchements précédents, ça me convient très bien. La sage-femme a voulu rompre la poche des eaux, mais...
— Oh, mais vous êtes trempée ! Ça s'est fait tout seul, on dirait. Bon, je vous laisse vous reposer, vous m'appelez si vous avez besoin de quelque chose ?

16h. Heu...
Non, en fait, à 16h, il ne s'est rien passé de particulier. J'avais faim, c'est tout. Et Darling s'était endormi sur un fauteuil dans la salle d'attente.

17h. Je ne sens plus rien, d'accord, mais quand même, il me semble...
— Darling, tu ne veux pas aller appeler la sage-femme ?

17h20. Il paraît qu'on voit les cheveux (j'ai refusé le miroir, merci bien). Je suis en position, j'ai révisé la technique de la poussée non bloquée, j'attends qu'on me donne le signal.
— C'est bon, à la prochaine contraction vous pouvez pousser !
— Je ne sens plus les contractions...
— Eh bien, quand vous voulez, alors.

Et cinq minutes plus tard à peine, le gamin était là !


Alors, accouchement spontané ou accouchement déclenché ?
En fait, je m'en fiche.



jeudi 15 mars 2012

Fausse alerte

Il s'est passé quelque chose hier soir. Le Têtard, effrayé sans doute par toutes les histoires de déclenchements inefficaces que j'ai entendues ces derniers jours, est descendu encore plus bas, à tel point que j'ai désormais du mal à m'asseoir, ou alors sur le bord des fesses. Dans la foulée, j'ai perdu le bouchon muqueux (si vous ignorez ce que c'est, ne cherchez pas sur Google images, ce n'est pas glamour) ; je sais que ce n'est pas forcément un signe d'accouchement imminent, mais ça peut l'être, et quoi qu'il en soit ça prouve que le col se modifie. Enfin, j'ai eu une série de contractions, plus douloureuses que d'habitude.

Du coup, j'ai fait un grand discours aux Things au moment de les coucher, pour leur expliquer que si je n'étais pas là au matin il ne fallait pas qu'ils s'inquiètent. Je pense qu'ils n'ont rien pigé, mais Dolto serait fière de moi.
J'ai aussi commandé plein de plats tout préparés chez Picard pour le Grand et Darling. Comme ils n'y ont jamais droit en temps normal, je pense qu'ils ont désormais hâte que j'accouche pour en profiter.
J'ai terminé à toute allure de relire des épreuves pour une éditrice, et je lui ai envoyé les corrections à minuit. Je me suis dit que j'aurais plus de mal à me concentrer sur la table d'accouchement.
J'ai vérifié que Darling savait où était la valise (on ne rigole pas) et je lui ai donné de l'argent pour un éventuel taxi.
Et pendant que j'y étais, j'ai terminé le chapitre que j'étais en train de traduire.

Et puis finalement, quand j'ai appelé la maternité, j'ai appris que toutes les salles de travail étaient occupées, donc j'ai parlé très sévèrement à mon utérus en lui expliquant que ce n'était pas le moment de rigoler, j'ai pris deux antispasmodiques, et je suis allée me coucher. Ce matin, de même qu'à chaque lever-pipi au cours de la nuit, j'étais assez étonnée d'être encore là, mais aussi soulagée.

Or, ce soir, rebelote, ça contracte tant que ça peut. Franchement, ce n'est pas le moment, mes rares parents et amis qui habitent à Paris sont tous à l'inauguration du Salon du Livre, ce qui réduit considérablement le nombre de baby-sitters potentiels. On va réessayer la méthode d'hier soir, antispasmodiques et dodo.

Si ça arrivait demain matin, ce ne serait pas l'idéal : Darling fait l'ouverture à la librairie où il travaille. Demain soir non plus : j'ai invité une amie à dîner. Samedi ou dimanche, ce serait encore pire : peu de gens sont disponibles ce weekend, je ne sais pas à qui je pourrais demander de venir garder mes gosses. Et lundi, ça n'irait pas, le Grand revient de l'école avec un ami ce soir-là, il faut quelqu'un à la maison pour les accueillir.

Finalement, accoucher, c'est comme tomber amoureux : ce n'est jamais le bon moment. Heureusement, ça finit quand même par arriver.


PS : Quelqu'un m'a récemment fait culpabiliser en me disant que même si je perdais les eaux à minuit, je serais très vilaine d'exiger la présence de Darling à la maternité et de laisser mes enfants avec le premier venu, car ils risquent d'être traumatisés en se réveillant au matin (ou pire, en pleine nuit) et en découvrant que leurs parents sont tous les deux absents. Cette personne a même ajouté que s'ils ne sont pas traumatisés, eux, c'est la personne qui aura charitablement accepté de venir qui risque de l'être par leurs hurlements. Heureusement, quelqu'un d'autre m'a ensuite rassurée en me disant que "Bah, même s'ils hurlent pendant deux heures au milieu de la nuit, ils finiront bien par se rendormir, et ensuite ils oublieront", que "C'est normal que tu n'aies pas envie d'être seule, ça pourrait être aussi long et douloureux que les autres fois, ou pire encore, même si c'est ton troisième accouchement" et que "De toute façon je pense qu'ils seront beaucoup plus traumatisés par l'arrivée d'un petit frère que d'avoir passé une nuit sans toi". Ouf, me voilà rassérénée.

mercredi 14 mars 2012

Les petits maux de la grossesse (12) : suite et fin

Allez, on va expédier le reste de la liste, sinon je n'aurai jamais le temps d'arriver au bout.

- La constipation et les hémorroïdes
Est-il réellement nécessaire de développer ? On va dire que non.
- Les vergetures et les démangeaisons
Ah ben oui, parce que quand la peau craque, ça gratte. Mais je vous reparlerai des vergetures plus tard, quand je me lancerai dans la liste des "petits" maux qui vous attendent après la grossesse. Ah, vous comptiez y échapper ? Bande de naïfs.
Sachez cependant qu'on peut aussi souffrir de démangeaisons sur le ventre pour d'autres raisons, donc sans vergetures, à cause de modifications du fonctionnement du foie. Ou alors on peut cumuler les deux, c'est plus rigolo.
- Les troubles oculaires
Oh ben ça alors. Je n'en crois pas mes yeux, justement : je n'ai pas connu ça ! Moi qui me vantait d'avoir testé toute la liste, je suis drôlement déçue.
- Les sautes d'humeur
Bah, c'est de la blague tout ça : je suis aussi hystérique quand je ne suis pas enceinte que quand je le suis, comme pourrait vous le confirmer Darling. Ou alors il y a en effet une légère augmentation du nombre de crises, mais on part d'un niveau tel que ça passe inaperçu.
(Et puis tiens, je ne résiste pas à la tentation de vous citer une phrase de cette chère Laurence Pernoud, paix à son âme : "De toute façon, si vous vous sentez nerveuse et irritable au début de votre grossesse, dès que vous sentirez remuer cet enfant, dès que sa présence se manifestera, vous serez apaisée, vous verrez". Oui oui, apaisée, c'est le mot.)

Voilà, c'est tout ! L'Association des Joyeux Malthusiens de France vous remercie d'avoir suivi ce feuilleton, et vous annonce la sortie prochaine de trois nouvelles émissions qui devraient vous intéresser au plus haut point : "Récits d'accouchement", "Joies du pouponnage" et "Conséquences physiques de la grossesse". Restez avec nous, vous avez encore beaucoup à apprendre !



Sur ce, sachez qu'on parle de me déclencher prochainement, et que le Têtard n'attendra peut-être même pas jusque là ; si vous n'avez pas de mes nouvelles pendant plus de trois jours consécutifs, vous pouvez raisonnablement en conclure que je suis à la maternité (et aussi que je n'ai pas d'iPhone qui me permette de bloguer n'importe où) (on est moderne où on ne l'est pas, moi je ne le suis que pour le matériel de cuisine) (mais je reviendrai donner des nouvelles dès que possible, promis).


Ubiquité

Ce matin, Mr Thing Two montre mon ventre qui ondule sous mon T-shirt :
— Bébé ?
Ah, ça y est ! me dis-je, ravie. Il a enfin compris !
J'approuve donc, et j'insiste lourdement, comme je le fais désormais à la moindre occasion (même si je sais bien que ce sera un choc tout de même) :
— Oui, c'est le bébé qui bouge, il n'a plus beaucoup de place, il va bientôt sortir.
Le gamin médite quelques secondes, puis part avec sa sœur vers le cagibi la chambre du Têtard (va falloir que je m'habitue) que je leur ai montrée il y a deux ou trois jours. Arrivés là, tous les deux se dirigent vers le couffin et soulèvent la couverture :
— Bébé ? Yéou bébé ?
Et comme il n'y avait personne – et pour cause – ils l'ont cherché dans toute la maison.

Bon, disons qu'ils ont presque compris.

mardi 13 mars 2012

La bourse et la belle vie

Depuis quelques mois, je suis membre d'une commission qui attribue des bourses de travail à des auteurs de littérature jeunesse, et qui se réunit trois fois par an. La dernière en date a eu lieu hier, et courageusement, j'y ai traîné mon gros bidon pour débattre de neuf heures du matin à sept heures du soir (avec une pause déjeuner, tout de même !) des mérites de tel ou tel auteur ou illustrateur.

Sur les soixante ou quatre-vingt dossiers présentés, deux nous ont bien fait rire (jaune) :
- Celui de cette femme qui avait écrit deux petits romans pour les 5-7 ans diffusés uniquement en Corse, et qui expliquait que comme elle avait démissionné de son boulot rémunéré pour se consacrer à l'écriture, elle demandait une bourse pour tenir jusqu'en mai, date à laquelle elle toucherait ses premiers droits d'auteurs (elle semblait certaine de pouvoir ensuite en vivre*) ;
- Celui de ce monsieur qui expliquait qu'il avait décidé d'écrire une histoire de vampires se déroulant sur une île paradisiaque, qui voulait aller vivre là-bas pour écrire son roman en "immersion totale", et qui nous demandait donc de lui payer son Club Med pendant trois mois.

Il y en a qui ne doutent de rien.

*Pour ceux qui ne comprennent pas notre ahurissement, il faut savoir qu'un auteur jeunesse touche environ 6% du prix de vente public de son livre. Ces petits poches d'une cinquantaine de pages devaient coûter environ 5 euros. Elle va donc gagner environ trente centimes par bouquin. Pour gagner 600 euros par mois (soyons modeste), il faudrait donc qu'elle en vende 2000. Tous les mois. 24.000 par an. Uniquement à des enfants corses de moins de sept ans. Oui, voilà.

dimanche 11 mars 2012

Huit mois !

Début du neuvième mois ; j'entame la dernière ligne droite !
Depuis que j'ai écrit ceci, il y a deux semaines, nous avons fait d'énormes progrès (sauf en ce qui concerne ma traduction, bien sûr) :
- La valise est prête, avec tout ce qu'il faut de vêtements, de sucreries et de bouquins (il manque juste la fameuse trousse de maquillage, mais je crois que je vais m'en passer).
- Le cagibi s'est transformé en vraie chambre (de deux mètres carrés), avec une bouche d'aération toute neuve (à défaut de fenêtre), une commode à moitié remplie de vêtements de bébé (l'autre moitié est occupée par le bric-à-brac qui n'a pas encore trouvé sa place ailleurs dans la maison, mais qui s'en soucie ?), le couffin de la poussette en guise de lit (mais on devrait m'en prêter un "vrai" prochainement), une guirlande lumineuse (sans prise électrique, mais j'ai pris un rendez-vous dans dix jours avec le quincaillier pour qu'il m'en pose une), des murs d'une charmante nuance blanc-gris sale (mais avec quelques stickers pour décorer, je suis sûre que ce sera splendide) et une ampoule nue accrochée à un mur (que je remplacerai par une jolie lampe un de ces jours... heu, un de ces mois). Bref, c'est royal.
- J'ai pondu deux pages d'instructions à remettre à quiconque aura le courage de venir garder mes gamins pendant que je serai en train d'accoucher, et listé quelques numéros de téléphone d'urgence (avec nettement plus de plans B, voire C ou Z, que de plans A, malheureusement) (mais bon, on va dire que je vais accoucher en deux heures, un matin, en semaine, pendant que les enfants sont respectivement à l'école et à la crèche, de manière à ce que Darling puisse aller les récupérer tranquillement le soir après avoir passé la journée à la maternité) (on y croit)
- Et attention, roulement de tambours : nous venons à l'instant de choisir le prénom ! Sur les 3000 ou 4000 prénoms examinés un par un, variantes comprises, nous en avions sélectionnés 127 (une soixantaine pour moi, une soixantaine pour Darling, et pas UN SEUL prénom en commun sur les deux listes), puis nous avons réduit la liste à une douzaine de prénoms que les deux parties trouvaient acceptables, et enfin nous avons attribué des points à chacun, en demandant aussi l'avis du Grand. Donc ça y est, le Têtard a un prénom, d'origine nordique comme souhaité par Darling, mais dont l’étymologie ne signifie pas "Guerrier féroce et glorieux qui s'avance la hache à la main" comme les trois quarts de prénoms qu'il m'a proposé, et au contraire, plutôt pacifique ; un prénom qui sonne très allemand, mais prononçable en français et dans d'autres langues, et pas inconnu dans nos contrées ; un prénom moins doux que je ne l'aurais souhaité, mais qui commence par une initiale différente des autres membres de la famille, et qui est porté par un personnage de la littérature classique, ce qui me plaît bien. Bref, un compromis suffisamment satisfaisant pour les deux parties concernées !

Tout ça pour dire que je suis enfin prête à accoucher d'un jour à l'autre, ou à être déclenchée si mon diabète gestationnel continue à jouer au yo-yo avec ma glycémie.

Maintenant, je vous préviens, si après tout ça le Têtard me fait la blague de me torturer pendant encore un mois sans pointer le bout du nez, je change mon fusil d'épaule et je l'appelle Maximilien-Harald. Rira bien qui rira le dernier.

samedi 10 mars 2012

On la coupe ?

Jour de marché. Je passe devant le stand d'une maraîchère qui tutoie tous les clients et parle très fort. Un monsieur entre deux âges lui réclame une botte de carottes. La dame lui pose alors la question rituelle, à savoir : souhaite-t-il garder les fanes, ou pas ?
(Pour ma part, la réponse est non. J'ai essayé au moins trois ou quatre fois d'en faire quelque chose, mais c'est vraiment trop fibreux et pas si bon que ça. J'utilise souvent les fanes de radis, les feuilles de chou-fleur, et plein d'autres trucs, mais les fanes de carottes, j'ai laissé tomber.)
La maraîchère sait cependant que bien des gens ne connaissent pas le mot "fanes". Elle pose donc la question à l'aide de mots plus simples, et avec une voix qui porte loin :
— J'te coupe la queue ?
Le monsieur a bafouillé que heu, bof, non, il préférerait pas... M'est avis que la prochaine fois, il ira acheter ses légumes ailleurs.

vendredi 9 mars 2012

Les petits maux de la grossesse (11) : le mal au dos

On ne va pas s'étendre sur celui-ci, tant c'est évident. Avec dix ou quinze kilos de plus dans un ventre qui pointe dans le vide, on ne se tient pas de la même façon. On est cambrée, surtout si on l'était déjà auparavant ; ça tire sur les ligaments, sur les omoplates, etc. On a mal aux reins, ou en haut du dos, ou à la nuque, ou dans les fesses, avec sciatiques à la clef si on a de la veine. On n'est pas bien du tout debout, mais pas non plus assise, ni même allongée. Et pour peu que le gamin se mette dans une position bizarre, on peut aussi avoir mal aux côtes, ou au coccyx, ou dans n'importe quel point où il lui plaît d'appuyer. Sans même parler des dernières semaines, au cours desquelles le bassin s'écarte légèrement pour que la tête du bébé puisse passer, ce qui peut être très douloureux.

(Autant dire que ce n'est pas vraiment le bon moment pour faire de longues marches à pied, par exemple pour aller à la maternité trois fois par semaine pour surveillance rapprochée, ni pour porter à bout de bras des gamins d'une douzaine de kilos à mettre dans la baignoire ou dans leur lit, ni pour déménager tous les cartons d'un cagibi, ni pour rester assise pendant des heures devant un ordinateur. Mais personne n'aurait la folle idée de faire des choses pareilles pendant les derniers mois d'une grossesse, n'est-ce pas ?)

Et encore, dans la journée, ça va. C'est la nuit, quand ça fait une heure ou deux qu'on dort sur un côté et qu'on a la folle idée de vouloir se retourner et/ou aller aux toilettes, qu'on comprend l'étendue du problème – et qu'on se sent soudain très solidaire de sa grand-mère. Se mettre debout peut prendre dix bonnes minutes. Au moindre mouvement (et Dieu sait s'il en faut, des mouvements, pour se retourner ou se lever ; on ne s'en rend pas compte le reste du temps !) on a envie de lancer un "aïe" retentissant ; si on se retient, c'est uniquement pour ne pas réveiller notre moitié. Non pas parce qu'on veut qu'il profite de son sommeil, bien au contraire : si on s'écoutait, on l’assommerait volontiers à coups de lampe de chevet, d'abord pour oser ronfler pendant qu'on souffre le martyre, et ensuite pour nous avoir mis dans cet état-là, le vilain ! Non, si on veut préserver son sommeil, c'est parce qu'il nous reste une once de fierté et qu'après nous avoir vu avec les soutifs de notre grand-mère, les bas de contention de notre grand-mère, les culottes de notre grand-mère, et même les aiguilles à insuline de notre grand-mère*, on ne tient pas particulièrement à ce qu'il nous voit avec la démarche de notre grand-mère. Donc on souffre en silence, et une fois qu'on a réussi à se redresser, on fait un tout petit pas, puis un autre, jusqu'à ce que ça se dénoue un peu et qu'on arrive jusqu'au trône (où on aura bien du mal à trouver une position confortable, mais c'est une autre affaire).

Rassurez-vous, toutes ces douleurs cesseront bientôt : dès que vous aurez accouché... heu, fini d'allaiter... heu, fini de porter votre gamin à longueur de temps... heu, accouché du suivant... Enfin bref, pas de panique, ça finira par passer. Mais si.

* La grand-mère en question, aux grands soutiens-gorge informes et piqûres d'insuline, étant ma grand-mère italienne, "la Nonna", Darling plaisantait avec qui voulait l'entendre lors de ma dernière grossesse au sujet de "la nonnification de Fofo". Oui, je sais, je n'aurais jamais dû en faire un quatrième avec lui. Enfin, vous comprenez pourquoi je ne tiens pas à ce qu'il me voit boitiller, hein ?

jeudi 8 mars 2012

Il nous manque une case...

Trois semaines après l'envoi de mon dossier, la sécu me renvoie mon document sous prétexte qu'il manque la date de mon arrêt de travail. Je ne suis pas en arrêt de travail, je suis en congé maternité, et c'est la sécu elle-même qui m'a donné les dates de ce congé maternité. Dates que j'avais malgré tout indiquées sur le document, par précaution (mais à la ligne "congé maternité" et non "arrêt de travail").

Plus de deux mois après le début du congé parental à temps partiel de Darling, la CAF lui écrit pour lui demander les dates de son congé paternité. Il ne demande pas un congé paternité, il demande un congé parental. Qui ne suit pas le congé paternité. Le cas est prévu, théoriquement. Mais là aussi, la personne qui s'est occupée de son dossier a compris de travers et trouvé qu'il nous manquait une case à cocher.

Et après, on se demande pourquoi je suis administratophobe.

Pain au lait ribot


Je fais du pain deux ou trois fois par semaine, en suivant toujours à peu près la même méthode et les mêmes proportions, par flemme, mais en introduisant très souvent des variantes : différents types de farine, de modes de cuisson, de matière grasse, de graines, de liquides...

Eh ! bien, sachez-le, si vous remplacez une partie de l'eau de votre recette lambda par du lait, ça donne un résultat déjà pas mauvais du tout. Mais si vous avez la chance d'avoir du lait ribot chez vous, par exemple si vous en avez acheté une bouteille entière pour faire des scones* et qu'il vous en reste, essayez de le substituer à la moitié de l'eau. Cela donne un pain vraiment très moelleux et aéré, même avec de la farine complète, et le goût est délicieux. Le seul inconvénient, c'est qu'il faudra en refaire beaucoup plus vite que d'habitude !


*C'est un exemple, hein. Juste un exemple. Rien qui ressemble de près ou de loin à la réalité. Je suis diabétique, je n'ai pas droit aux scones. Donc je n'en fais pas. Bien entendu. Ça va de soi. Vous l'aurez compris. C'est évident.

mercredi 7 mars 2012

La magie de Harry Potter

Du haut de ses neuf ans et demi, le Grand n'a jamais lu un roman s'il n'y était pas obligé, soit par ses institutrices, soit par sa mère qui lui a collé quelques Fantômette entre les mains après lui avoir lu les premiers chapitres à voix haute pour l'encourager. Donc en tout, une dizaine de romans tout au plus.
En revanche, il lit des bandes dessinées, et occasionnellement des documentaires. Et alors ? Lire, c'est un droit, pas un devoir. Le tout premier des dix droits du lecteur tels que définis par Daniel Pennac dans Comme un roman est celui de ne pas lire. Le cinquième est celui de lire n'importe quoi. C'est uniquement à cette condition que la lecture peut rester un plaisir.
Cela ne m'empêche pas de le regretter, bien sûr, et de ronger mon frein silencieusement. J'aurais tant aimé lui mettre entre les mains Le Petit Prince, Le Bon Gros Géant, Deux pour Une, et bien d'autres encore ! Et puis il y a les inconvénients pratiques. Comment voulez-vous partir en vacances en emportant assez de lecture pour un mois si ce ne sont que des BD ? Rien qu'en prévision des deux heures d'attente à la préfecture pour faire refaire la carte d'identité, il faut emporter trois ou quatre volumes cartonnés grand format, soit un bon kilo de bouquins, alors qu'un petit poche glissé dans le sac à main suffirait amplement.

Mais voilà que depuis quelques mois, il entend parler de plus en plus souvent de Harry Potter. En bon fils obéissant, il a résisté à la tentation de regarder les films, car il sait à quel point je trouverais lamentable qu'il les voie avant de lire les livres (et aussi parce qu'il n'aime pas regarder des films en général, avouons-le). Mais les allusions pleuvent autour de lui. Une jeune tante indélicate lui a par exemple révélé que le professeur Lupin était un loup-garou ; paf, une grosse partie du suspense s'est ainsi envolée. En apprenant ça aujourd'hui, je m'énerve :
— Elle aurait pu s'abstenir ! Il faudrait vraiment que tu lises les romans bientôt, sinon tu sauras tout avant même de les ouvrir...
— Je veux bien.
Pardon ? Qu'ouïs-je ?
— Tu veux essayer de lire le premier ?
— D'accord.
Croyez-moi, je ne me le suis pas fait dire deux fois. J'ai appelé Darling à la librairie où il travaille, et il est revenu avec le premier tome ce soir même : nous avons la série à la maison, bien sûr, mais en anglais.
Et sous nos yeux émerveillés, le Grand s'est immédiatement plongé dedans. Il n'a jamais pris une douche aussi rapide, il n'a pas voulu de dessert après le dîner, et je ne jurerais pas que ses dents ont réellement été en contact avec sa brosse à dents au cours des trois minutes qu'il a passées dans la salle de bain. Et à neuf heures, il m'a fait la scène classique du "Encore une minute je t'en supplie c'est juste un moment qui donne envie de savoir la suite !". Argument qui ne tient pas, bien entendu, car c'est la marque même d'un bon bouquin de donner envie de savoir la suite.

Je continuerai à ne prodiguer ni encouragements, ni jugements de valeur, mais je prie de tout mon cœur pour qu'il comprenne qu'un bon roman peut aussi permettre de s'évader, et bien plus longtemps qu'une bande dessinée. Parce que même si on peut très bien s'en passer, quel plus grand bonheur qu'aimer lire et bénéficier ainsi d'une garantie à vie contre l'ennui ?

Vive Harry Potter. Il a bien mérité sa baguette magique, tiens.

PS : Ce que je pense moi-même de cette série, en tant que spécialiste de littérature jeunesse ? Ma foi, comme tout le monde : ce sont de très bons romans, bien écrits, avec un univers très solide (je suis impressionnée par le talent qu'a eu l'auteure de semer dans les premiers volumes des éléments qui lui ont été utiles par la suite), avec des personnages très réussis à quelques exceptions près, un style impeccable quoique classique, et un scénario irréprochable. Comme rien n'est parfait, j'ajouterais qu'il y a des longueurs dans les derniers volumes (à partir du moment où l'éditeur, impressionné par les ventes, a cessé de lui faire retravailler ses textes, j'imagine), que les rapports amoureux entre adolescents sont mal explorés et peu crédibles, et que l'épilogue est étonnamment décevant (on sent qu'elle a voulu "bétonner" son histoire pour ne laisser à personne la possibilité d'y revenir). Des petits reproches qui ne m'ont pas fait bouder mon plaisir pour autant !

mardi 6 mars 2012

Découvertes

On en fait, des découvertes, quand on est forcé de ranger de fond en comble un cagibi où les choses s'accumulent depuis dix ans.
Par exemple, j'ai trouvé un deuxième ballon de gym pour femmes enceintes. Sachant que je ne me sers déjà pas du premier.
J'avais aussi oublié que nous avions acheté une telle quantité de matériel de camping, dont je n'ai jamais profité, puisque j'ai eu des problèmes de santé la seule fois où nous avons voulu l'utiliser. Or, avec tous ces gosses, je doute que cette tente qui me semblait pourtant énorme à l'époque nous resserve de sitôt.

Et puis il y a tous les trucs qu'on achète, et rachète, et rachète, et rachète inlassablement, parce qu'on croit qu'on n'en a plus, alors qu'ils sont juste enfouis sous le reste :
- sept lampes de poche (indispensables au quotidien, bien sûr) ;
- quatorze bougeoirs (sachant que les bougies et les petits enfants ne vont pas très bien ensemble) ;
- onze savonnettes (très utiles le jour où nous aurons onze salles de bain) ;
- six trousses d'écolier (toutes trop petites pour contenir le nombre de stylos réglementaire en primaire) ;
- dix-sept boîtes vides (on ne sait jamais, on pourrait avoir des choses à mettre dedans) ;
- vingt-neuf (29 ! VINGT-NEUF !) brosses à dent (avec leurs six tubes de dentifrices et leurs huit flacons de bain de bouche) (si quelqu'un a un jour des caries dans cette maison, ce ne sera pas ma faute).
Si j'y ajoute les dix-sept robes taille trois mois que Miss Thing One n'a jamais portées (je ne mets pas de robes à un bébé qui ne tient pas debout, on les retrouve toujours sous les aisselles), les trente-sept pulls que se partagent les Things (alors qu'ils n'en portent presque jamais, il fait très chaud chez moi et à la crèche), et éventuellement mes cent-cinquante et quelques paires de boucles d'oreilles (que je vais pouvoir remiser pendant quelques mois, j'évite de porter des boucles d'oreilles devant un nouveau-né, je ne suis pas folle), je sais quoi faire en cas de problèmes économiques : tout ça sur eBay, et hop, je suis riche.
(En revanche, on ne touche pas à mes bouquins, qu'on se le dise.)

lundi 5 mars 2012

Cake nutella / panais

Une recette de cake au nutella et aux panais dans un petit livre de cuisine consacré au nutella ? Ce n'est pas absurde : les panais ont un petit goût de noisettes assez prononcé. Et puis il n'y a pas de raisons que ce soit moins bon que le cake chocolat / courgettes, pas vrai ?
Allez, j'essaie, pendant que c'est encore la saison des panais.

Résultat... correct, disons. Sans plus. Pas assez de goût, trop friable, texture trop sèche. Quelques modifications s'imposent, pour le rendre à la fois meilleur et "diabétiquement correct".

Je recommence donc quelques jours plus tard, avec quelques légers, tout petits, quelques minuscules changements :
- Je remplace la farine par de la farine bise, et je diminue la quantité de 25%;
- Je remplace le sucre par du rapadura (sucre intégral), et je divise la quantité par trois ;
- J'ajoute trois œufs (a-t-on jamais vu un cake sans œufs ?) ;
- J'ajoute de la poudre de noisettes pour renforcer le goût ;
- Je remplace le beurre par de la margarine, et je diminue la quantité de 50% ;
- J'augmente la quantité de panais râpé de 25% ;
- Je double la quantité de nutella ;
- J'ajoute une grosse cuillérée à soupe de cacao non sucré.
J'ai tout de même gardé la levure : il y a donc UN ingrédient que j'ai conservé tel quel.

Résultat bien meilleur. On continue à ne pas vraiment deviner la présence du nutella (ni du panais, d'ailleurs, ni des noisettes, ni du cacao – en fait, on se demande ce qu'il y a, dans ce gâteau), mais c'est une bonne recette, et parfaite, tests à l'appui, pour les diabétiques. Vous pouvez féliciter l'auteure de ma part !

dimanche 4 mars 2012

C'est comme ça ! (bis)

Monitoring jeudi après-midi. Quelques légères contractions. C'est normal, me dit-on. Mais dans le doute, revenez demain.
Rebelote à neuf heures le vendredi matin. Cette fois, position imposée, sur le côté gauche, pour éviter la compression de la veine cave. Impossible de lire un manuscrit dans cette position. Gel visqueux, machine bruyante, mal au dos sur ce brancard à peine amélioré, et le mur pour tout paysage. Vingt-cinq minutes.

Conclusion : tout va bien. Quand je ne suis pas sur le dos, le gamin ne souffre pas du tout des contractions, et celles-ci n'agissent pas sur le col.
Au fil des examens, tout va bien, tout va très bien :
- Le bébé est gros, mais raisonnablement ;
- La résistance à l'insuline augmente, mais je sais gérer ;
- Le rythme cardiaque du Têtard est impeccable ;
- Les contractions, normales à ce stade, sont faibles et "inefficaces" ;
- Le gosse bouge tant qu'il peut ;
- La quantité de liquide amniotique est  normale ;
- Je n'ai pas eu le moindre saignement en huit mois ;
- Le col est encore bien fermé ;
- Les échographies sont entièrement rassurantes ;
- Il a déjà la tête en bas, la position idéale ;
- Aucun indice ne permet de soupçonner une souffrance fœtale quelconque.

Conclusion : on passe à deux monitorings par semaine. Et puis on va refaire une échographie de contrôle.

La semaine prochaine, j'ai donc :
- un monitoring le lundi ;
- une échographie le mercredi ;
- un rendez-vous avec la diabétologue le jeudi ;
- un monitoring le vendredi.
Pour une grossesse normale du début à la fin (diabète et "petits maux" mis à part), sans la moindre cause d'alarme, et dont le terme est suffisamment avancé pour que le risque de la prématurité soit presque écarté.

Faut pas chercher à comprendre.

samedi 3 mars 2012

Pollyanna

J'avais promis de vous parler de ce livre qui a beaucoup marqué mon enfance, et chose promise, chose due !

Pollyanna est un un roman américain d'Eleanor H. Porter écrit en 1913, donc en gros, à la même époque que Les quatre filles du docteur March, La petite princesse, Anne et la maison aux pignons verts, Papa Longues-jambes et d'autres ultra-ultra-classiques américains de la fin du XIXe siècle et du début du XXe siècle, pleins de bons sentiments et surtout destinés aux filles. Si ces titres ne vous disent rien, c'est normal, car en dehors du premier, ils n'ont jamais eu beaucoup de succès en France. Pourtant, je vous assure que dans de nombreux pays, en particulier bien sûr dans tous les pays anglo-saxons, Pollyanna est un personnage aussi connu que Tom Sawyer ou Mary Poppins. Elle est même entrée dans le dictionnaire pour désigner "une personne d'un optimisme béat", et a sa statue dans la ville d'origine de sa créatrice, Littleton. Qui dit mieux ?

Qui est-elle donc, cette délicieuse enfant ? Une pauvre orpheline que le destin conduit à habiter avec sa tante, une vieille fille stricte et acariâtre. Mais Pollyanna a appris à jouer avec son père au "jeu du contentement", qui consiste à trouver en toutes circonstances une raison de se réjouir. Ainsi, quand sa tante la relègue dans une petite chambre sous les toits laide et surchauffée alors que sa maison contient plein de chambres luxueuses et inoccupées, Pollyanna se réjouit de la vue magnifique, et même de ne pas avoir de miroir, puisque cela lui évitera d'avoir à se lamenter sur ses taches de rousseur ! Forcément, chaque tentative de la punir tourne court : quand sa tante la condamne à dîner avec du pain et du lait dans la cuisine, elle lui saute au cou pour la remercier, car elle aime le pain, le lait, et la compagnie des domestiques !
Son optimisme, sa franchise déconcertante, sa naïveté et sa gentillesse vont peu à peu faire d'elle la mascotte de la ville. Parmi ses conquêtes, on compte Mrs Snow, une invalide éternellement ronchon, et Mr Pendleton, un célibataire asocial. Et aussi le docteur Chilton, brouillé avec sa tante pour une raison mystérieuse...
Sa gaieté est cependant mise à rude épreuve le jour où, victime d'un accident, elle apprend qu'elle risque de ne plus jamais pouvoir marcher. Mais cet épisode lui permet de mesurer l'amour que tout le monde lui porte, y compris (enfin !) sa tante, et bien entendu, tout finit bien pour tout le monde !

Allergiques aux bons sentiments, passez votre chemin ! A côté, même Les quatre filles du docteur March est un roman noir. Dans Pollyanna, le malheur existe, mais pas le mal. Et c'est justement pour ça que je l'ai tant aimé, enfant, et pour ça qu'il a tant marqué les esprits. Et en dehors de la joie de vivre qu'il communique aux lecteurs, il faut reconnaître que ce roman possède bien d'autres qualités : des personnages hauts en couleur, des dialogues très drôles, des retournements de situation inattendus, une narration parfaitement maîtrisée, etc.
Malheureusement, vous ne pourrez en profiter que si vous lisez l'anglais (ou l'italien, ou le polonais, ou n'importe quelle autre langue dans lequel le roman a eu du succès et est encore disponible), ou à la rigueur si vous êtes très riche, car s'il a bien été traduit en français en 1929 aux éditions Jeheber, il est aujourd'hui quasiment introuvable : je viens de le voir sur Priceminister pour la modique somme de... 400 euros. Et tous mes efforts pour le faire rééditer en français auprès d'éditrices avec lesquelles je travaille ont été vains.

Quelques mots encore au sujet des suites :
- Un deuxième volume a été écrit par Eleanor H. Porter, Pollyanna grandit. Je le trouve moins réussi. Au début, l'histoire se répète – Pollyanna redonne le goûte de vivre à une femme maussade, et trouve un parent adoptif à un orphelin –, et ensuite, ça se transforme en roman à l'eau de rose très classique, avec quiproquos amoureux et happy end romantique. J'apprécie également moins les personnages, plus sombres et moins pittoresques que dans le premier volume.
- Beaucoup d'autres suites ont été écrites pour profiter du succès de l'original, un peu comme pour Heidi, mais elles ne sont pas de la même auteure, et je ne les ai jamais lues.

Enfin, au sujet des adaptations :
- Un film de Walt Disney a été tourné en 1960, et pour une fois, je l'ai vu. En toute honnêteté, il n'est pas mal, même si ça ne casse pas des briques. L'histoire est un peu différente, et je trouve que l'actrice principale n'est pas assez rayonnante et spontanée pour incarner Pollyanna, mais on passe tout de même un bon moment.
- Un dessin animé japonais d'une cinquantaine d'épisodes a été diffusé en France à la fin des années 80. La maison de production est Nippon Animation, la même qui a produit "Tom Sawyer" et "Princesse Sarah", et le dessin animé a eu pas mal de succès et a été rediffusé un certain nombre de fois. Ceux qui le connaissent s'en souvienne avec plaisir.
Autrement dit, même si je n'aime pas les adaptations, puisque les francophones monolingues ne pourront de toute façon pas lire le roman, je vous autorise pour une fois à faire une exception !

PS : Ici et ici, deux autres blogueuses qui parlent de leur amour pour ce roman.

Post-scriptum d'avril 2016 : après des décennies d'oubli, Pollyanna est enfin ressorti dans une édition française, chez Zethel. Je l'ai relu en diagonale, et la traduction d'Elisabeth Luc est tout à fait convenable (même si j'aurais fait mieux, cela va sans dire). Vous n'avez donc plus aucune excuse pour ne pas lire le roman plutôt que vous contenter des adaptations, même si vous êtes monolingue. Allez, hop, on file chez le libraire !


vendredi 2 mars 2012

Les petits maux de la grossesse (10) : les troubles du sommeil

Sous cette appellation générique se cachent deux réalités bien différentes.

En début de grossesse, avant tout autre symptôme, avant même les nausées, parfois même avant de savoir qu'on est enceinte, on est prise d'une fatigue foudroyante. Si on s'écoutait, on dormirait douze heures par nuit, plus deux siestes de deux heures chacune ; mieux encore, on demanderait une mise en hibernation immédiate pour une durée d'au moins trois mois. Malheureusement, on ne s'écoute pas, parce qu'on travaille, ou qu'on a des enfants, ou une vie sociale trépidante, ou les trois, ou qu'on est en vacances dans un petit village en Italie avec des amis qu'on ne veut pas encore informer de ce futur "heureux événement", d'abord par superstition, et ensuite parce qu'on a besoin soi-même de digérer la nouvelle et de se convaincre que l'événement est réellement heureux. (Toute ressemblance avec des personnages ayant réellement existé serait bien sûr fort truite, hein.)

Bref, pendant un bon trimestre, on se traîne lamentablement, on appelle de ses vœux un congé maternité anticipé, et quand on travaille dans un bureau, on en arrive même à faire des micro-siestes allongée sur la moquette dans les toilettes ou assise devant son ordinateur, la tête entre les mains, prête à se redresser d'un bond si le chef passe dans le couloir. (Situations vécues : je ne travaillais pas encore à domicile quand je suis tombée enceinte du Grand, et mon boss n'était pas tendre). Et on se brouille avec la moitié de ses amis parce qu'on refuse toutes leurs invitations en prétextant une panne de voiture (alors qu'on n'a pas de voiture) ou une otite du petit dernier (alors qu'on n'a pas de petit dernier), toujours pour éviter d'avoir à avouer qu'on a envie de vomir à la simple pensée de croquer dans un concombre et qu'on doit se coucher encore plus tôt que les poules si on veut tenir le choc.

Pendant le deuxième trimestre, RAS, ou presque. Disons qu'on ferait bien des grasses matinées plus souvent, et des siestes aussi, mais on survit.

Pendant le troisième trimestre, c'est une autre chanson. Au lieu de s'écrouler sur le matelas à 21h30 pour n'en émerger qu'au matin après la cinquième sonnerie du réveil, voilà qu'on se met à avoir du mal à dormir. Beaucoup de mal. De plus en plus de mal.
Certes, si vous avez bien suivi, ça n'a rien d'étonnant, car je vous rappelle que :
- On a les jambes qui remuent toutes seules dès qu'on arrête de bouger ;
- On a mal partout à cause du mauvais retour veineux ;
- On a des syncopes quand on veut se retourner et qu'on se retrouve sur le dos ;
- On ne sait plus comment caser cet énorme ventre (et je ne vous parle pas des seins) ;
- On a des démangeaisons mal placées ;
- On a envie de faire pipi toutes les deux heures maximum ;
- On a le nez tellement bouché qu'on n'arrive plus à respirer ;
- On a faim, parce qu'on a rationné les féculents ;
- On est victime de crampes fulgurantes au moindre mouvement ;
- On a un petit locataire dans le bidon qui ne trouve rien de plus rigolo que de faire de violentes galipettes (alors qu'il a pioncé toute la journée).
Ce qui, vous en conviendrez, suffit largement à justifier qu'on ait un peu de difficultés à dormir.

Oui mais non, ça ne suffit pas. Croyez-y-croyez-y pas, ce n'est pas la seule raison pour laquelle on finit, de guerre lasse, par se relever à trois heures du matin, en constatant au passage que sur les trois cent appartements de la résidence, pas un seul n'a de lumière allumée. Figurez-vous qu'au dernier trimestre, on fait des insomnies. Peut-être pour des raisons psychologiques, parce qu'on stresse, sur le mode "Oui mais alors si je mets le matériel de bricolage dans le placard à la place des couvertures pour pouvoir mettre les gigoteuses du gamin à la place du matériel de bricolage, où vais-je caser lesdites couvertures ?" ou encore "Bigre, il y a une trousse de maquillage qui figure sur la liste des choses à apporter à la maternité, dois-je en acheter une alors que je ne sais pas par quel bout on tient un mascara ?". Ou peut-être pour des raisons hormonales – la réponse standard des médecins à tous les problèmes des femmes enceintes (dans quelques semaines, quand vous passerez plus de temps chez le pédiatre que chez la gynéco, ce ne sera plus "C'est les hormones" mais "Il a des coliques", puis "Il fait ses dents", ça vous changera).
J'ai même récemment rencontré une sage-femme qui m'a expliqué doctement que les cycles de sommeil des femmes enceintes se raccourcissaient avant leur accouchement pour s'adapter à ceux du bébé, afin qu'elles soient bien entraînées à se lever huit fois par nuit dans les jours suivant la naissance.

On dit merci qui ? Merci, Madame la Nature !