Lectures de vacances

C'est une famille d'intellos, des gens qui citent Rabelais et ordonnent à leurs gamins de mettre la table en latin, des gens qui n'ont pas la télé et qui considèrent les jeux vidéo comme des outils du Malin, des gens qui ont des livres dans toute la maison et qui reconnaissent du Monteverdi au bout de trois mesures. Voilà pourquoi ça ne m'étonne pas beaucoup quand, jour après jour, dès que leur nombreux enfants leur laissent une minute de répit, je les trouve plongés dans un bouquin. Mais voilà aussi pourquoi ça m'amuse de les voir immanquablement en train de dévorer, non pas des essais sociologiques ou des grands classiques russes, mais... toute ma collection d'aventures de Fantômette, les unes après les autres.
(Pendant ce temps, le fils aîné de 11 ans lit du Bradbury, lui...);

Jumeaux en rose et bleu

D'habitude, je n'aime pas trop qu'on offre une tenue bleue et une tenue rose pour les jumeaux, mais là, je pouvais difficilement en tenir rigueur à ma mère...

(Si si, le t-shirt de Mr Thing Two est bien rose foncé et pas rouge)

Un, deux, trois, quatre, cinq, six, sept...

Dernière ligne droite : derniers invités. Après mon amie d'enfance et ses deux filles, puis mon père adoptif, puis une amie / collègue avec ses deux filles et son mari, voici que sont arrivés ce soir des amis / anciens voisins avec leur quatre enfants, dont un de l'âge du Filou et une autre de l'âge des Things. Nous passons déjà notre temps à les compter (le jardin est grand, et sans clôture). Tout à l'heure, pendant que je préparais le dîner, le père est passé en coup de vent par la cuisine :
- J'en ai cinq. Il m'en manque deux.
- Lesquels ?
- Sais pas, a-t-il lâché en ressortant de l'autre côté. J'ai déjà oublié.
(Il va me falloir deux mois pour me remettre de ces vacances) (jusqu'aux prochaines, quoi) (mais je dois reconnaître que je me serai bien amusée !)

Une voisine vipérine

Visite de la voisine d'en face, une dame de 85 ans qui a certainement plein de qualités, mais aussi quelques défauts. Disons entre autres que peu de gens méritent autant qu'elle les qualificatifs de cancanière et langue de vipère.

Elle me demande comment se passent mes vacances.
- Ma foi, plutôt bien, merci !
- Ce ne doit pas être reposant, pourtant, seule avec les trois petits...
- Non, pas très, j'avoue.
- C'est bien ce que je pensais. Je disais justement ce matin à ma fille que tu as maigri, ces dernières semaine.

Ne pas prendre ça pour un compliment, ni une réalité. Si on pouvait maigrir en mangeant tous les jours des pâtes et des glaces, ça se saurait. Ce qu'elle est en train de me dire, avec son air apitoyé, c'est que j'ai mauvaise mine.

Je m'efforce de sourire :
- Oh, j'en doute...
- Si, je t'assure. Il y a un mois, tu étais plus ronde. Plusieurs personnes m'ont même demandé si tu étais enceinte !

Et vlan. Vu l'IMC moyen des villageois, c'est très très vexant. Je me justifie :
- J'ai eu quatre enfants, dont des jumeaux nés quasiment à terme, donc mon ventre est très distendu...
- Oui, je comprends. Et le derrière rebondi, tu l'as hérité de ta grand-mère !

J'aime bien la voisine. Mais pas tous les jours.

Un autre jumeau

Le Filou prend une glace pour le goûter. Miss Thing One choisit la même :
— Comme ça, on est des jumeaux ! conclut-elle.

Flaque mystérieuse

Trois soirs de suite que je remarque qu'il y a de l'eau par terre dans la chambre du Filou, toujours au même endroit. Pipi ? Non, il n'y a pas eu d'accident dans cette pièce. La pluie, une fuite dans le toit ? Mais hier, il n'a pas plu, et le plafond a l'air sec...
Ce soir, je vérifie. Le sol est sec. Routine du dodo : bisou, doudou, verre d'eau (reposé hors de sa portée), sous le drap, bonne nuit ! Deux minutes plus tard, le Filou m'appelle, et j'y retourne. Je m'approche du lit, et je pose le pied dans une flaque d'eau.
— Ce n'est pas vrai. Dis-moi que tu ne garde pas l'eau dans ta bouche pour la cracher par-dessus bord dès la porte refermée ? Tu as craché l'eau, dis ?
— Si ! Cache ! me confirme-t-il, mort de rire.
J'aurais dû me fâcher, mais j'étais soulagée de ne pas avoir à faire réparer le toit...

Lectures nocturnes

Normalement, ça m'arrive tout au plus tous les six mois. Mais depuis mon arrivée ici, ça fait déjà quatre ou cinq fois que je me couche à une heure déraisonnable, à 1h du matin ou même plus tard, malgré le risque de devoir me lever plusieurs fois dans la nuit à cause des enfants, et la certitude de devoir préparer les biberons au plus tard à 8h, parce que je n'arrive pas à lâcher un bouquin.
Je ferais mieux de me reposer, ou de bosser. Mais au bout du compte, moi qui ne lit presque plus "pour le plaisir" en temps normal, puis-je considérer que ces heures passées entre les pages d'un roman constituent l'un des ingrédients qui font de ces vacances, certes fatigantes, de vraies vacances ?