jeudi 20 juin 2013

J'écope

J'ai l'impression d'être dans une barque qui prend l'eau. Constamment, le niveau de l'eau monte, monte, et menace de me noyer. Une seule solution : écoper. Pas d'échappatoire. Peut-être qu'il y a d'autres barques plus solides dans les parages, mais comment voulez-vous que je le sache ? Pour ça, il faudrait prendre le temps de lever le nez, de regarder autre chose que l'eau qui monte, d'examiner les alentours, de soupeser les options, de chercher le moyen d'aller rejoindre une autre barque. Pas le temps. Si je détourne le regard du fond de ma barque, je me noie. Alors j'écope. J'écope. J'écope. Parfois, dans un sursaut d'énergie ou de désespoir, j'écope avec tant de force et d'énergie que je commence à entrevoir le fond de la barque. Dans ces cas-là, bêtement, je relâche mes efforts, juste un peu, juste quelques heures ; je dors un peu plus, je lis quelque chose, je fais une autre activité qu'écoper. A chaque fois, je m'en mords les doigts. Mais de toute façon, c'est rare, car le plus souvent, l'eau est vraiment tout au bord du bateau, moi au bord de la noyade, et je sais que si je n'écope pas, c'est fini. Alors j'écope...
Peut-être que j'ai tort. Peut-être que je devrais arrêter, me croiser les bras. Peut-être que quelqu'un d'autre viendrait alors m'aider à écoper. Ou peut-être que je découvrirais que même si la barque coule, ce n'est pas très grave, car je sais nager. Peut-être qu'ensuite, ce serait beaucoup mieux. Mais rien n'est moins sûr. Si j'étais seule, je pourrais éventuellement courir le risque. Mais dans la barque, il y a des gamins qui ne m'ont jamais rien demandé, qui ont été embarqués malgré eux dans ce voyage. Je ne peux pas prendre le risque. Donc j'écope. Parfois avec fatalité ; parfois presque gaiement, en me disant que j'aurais pu tomber sur une barque bien pire ; parfois dans l'angoisse la plus totale, à en perdre le sommeil. Mais je continue. Je ne m'arrête jamais.
J'écope.

(Je déménage dans deux semaines, j'ai une traduction à rendre pour il y a cinq jours, des fiches de lecture pour il y a deux mois, des gamins pas encore définitivement inscrits à l'école / au collège / chez une assistante maternelle, des cartons pas encore commencés, une cuisine pas encore montée, des meubles pas encore livrés, une pile monstrueuse de fomalité administratives urgentes à expédier, et un bébé qui a la varicelle. Mais j'y crois, j'y crois. J'écope. On y arrivera. Je finirai même par recommencer à dormir...)

4 commentaires:

  1. Aïe, la varicelle en plus de tout ça !

    Mon zom te dirait de prendre l'accent chinois et de répéter : "Si ton problème a une solution, alors tout va bien. Si ton problème n'a pas de solution, alors ça ne sert à rien de t'en faire". Certes... Qui sait, tu réussiras peut-être à faire rire le Filou ;-)

    Les zondes, ça aide à flotter ? Si oui, je t'en envoie une énorme brassée. Sinon, tu leur trouveras bien une autre utilité, j'en mets double dose. Je te serre les pouces, tu vas y arriver !

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  2. Ah, je n'osais pas te demander si c'était ta trad pour le 15 dont tu parlais.
    Ça ne va pas te consoler, mais dis-toi qu'il y a deux jours, j'écopais au sens propre chez moi...Rien de grave, mais ça lasse quand même très vite !
    Allez, je pense que tu peux te dire que tu es dans la période la pire. Une fois le déménagement passé et l'appart' vendu, tu sortiras presque la tête de l'eau :) (et tu chanteras alléluia de tes yeux acérés, en savourant un cream tea grâce à ton ouïe très fine !)

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  3. Marmeline : oui, bien sûr que les ondes aident à flotter ! Merci !
    Et bien sûr que mon problème a une solution : arrêter de dormir... J'essaie, j'essaie, mais j'ai du mal !

    4F : tu m'y fais penser, ce matin il y avait un mot dans l'ascenseur disant que certaines caves étaient inondées... Je ne suis pas allée voir. Je n'irai pas. Non.

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