mercredi 25 novembre 2015

Visite inattendue (ou presque)

16h35, les gamins sont en train de goûter, il y en a deux qui se disputent, un qui me réclame un verre d'eau, le chat miaule de sa petite voix, je dois sortir le sachet de thé qui est en train d'infuser avant que mon thé ne devienne imbuvable, et juste à ce moment-là, on sonne à la porte. Je n'ai pas d'interphone : je dois donc ôter mes chaussons, enfiler des chaussures, trouver mes clefs, sortir sous la pluie pour aller ouvrir le portail. Un inconnu aux cheveux gominés m'adresse un grand sourire. Le dixième élagueur du mois ? D'habitude je suis polie, mais là ce n'est pas le moment. Je suis un instant tentée de lui lancer un "J'ai pas l'temps !" et de lui refermer la porte au nez pour couper court à toute discussion, mais un reste de bonnes manières me retient. J'attends qu'il prenne la parole pour me débiter son laïus (décidément, il n'a pas vraiment la carrure d'un élagueur, ni la tenue. Un vendeur de pommes "tout droit venues de notre ferme" qui vont pourrir en trois jours d'avoir été sorties de la chambre froide où elles croupissaient depuis deux ans, peut-être ?), mais il se contente de sourire encore. Il a presque l'air de s'attendre à ce que je l'invite à entrer se mettre à l'abri de la pluie. Quel culot !
- Oui ?
- Bonjour, madame Fofo. Vous allez bien ? Je suis désolé, j'ai quelques minutes de retard, mais comme vous m'aviez dit que vous préfériez plus tard que plus tôt, puisque vous aviez vos enfants à aller chercher à l'école...

???

...

!!!

- Madame Fofo ?
- Euh, oui, bonjour, monsieur. Ne vous inquiétez pas, c'est parfait. Entrez donc !



Peut-on oublier à la fois un rendez-vous pris par téléphone la veille ET le visage d'un architecte déjà vu au moins deux fois, qui vient vérifier que les travaux d'isolation ont été effectués correctement ?

On peut. Ce n'est pas facile, mais je peux vous donner des leçons, si vous voulez.


6 commentaires:

  1. Si tu étais à deux doigts d'avoir besoin de vacances, ça m'étonnerait pas....

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  2. Je suis contente que tu ne l'aies pas accueilli d'emblée en lui criant : "Toi tu m'fous les glandes, pi t'as rien à foutre dans mon monde, arrache-toi d'là, t'es pas d'ma bande casse-toi, tu pues, et marche à l'ombre!"

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    1. Et moi donc. J'ai vraiment, vraiment été à deux doigts de lui lancer "Qu'est-ce que vous voulez ? J'en ai marre d'être dérangée à tout bout de champ !".

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    2. Ca m'arrive souvent aussi.

      J'échappe à la double dose d'emmerde parce que je n'écoute pas ma contrariété ou ma déception -mauvaises conseillères- sur le moment, et que je puise un peu de patience et de sérénité, justement quand le contexte ne s'y prête vraiment pas.

      A titre d'exemple : Jeudi de la semaine dernière, après deux démarchages téléphoniques, je décroche à un numéro inconnu. Je risque de me mettre en retard pour le RDV de suivi de la Caf, ça me stress déjà, et je m'apprêtais à partir pour l'autre bout de la ville.
      Et bien c'était le gars avec qui j'avais RDV, qui annulait et reportait. J'aurais pas décroché, j'aurais passé 1h30 dans les transports en commun pour rien.

      J'ai souvent l'impression que le destin nous teste. Parce qu'à un chouilla prêt de tempérance, l'issue passe de tout blanc à tout noir. Quitte ou double. De la délivrance, à une nouvelle couche de complication.

      Je trouve que ça correspond à la définition de la "Baracca". Dans la culture musulmane, il s'agit soit de la chance dans le langage courant, soit pour les ascètes d'un surcroît de perception accordé par leur degré de sagesse et d'humilité.
      J'aime cette notion, une attitude d'ouverture mentale et de calme, qui vous prédispose à la chance dans vos relations.

      De cette façon à continuer à digérer la contrariété et de ne pas renvoyer de l'agression à l'autre, à "visualiser une fumée noire qui se transforme en fumée lumineuse". Et c'est sympa de se dire que notre façon de bien se comporter, même quand on y voit rien, est récompensée quelque part.

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  3. Étourdie + pas physionomiste, je vous assure que vous n'êtes pas seule, je me suis parfaitement reconnue dans votre histoire. Des fois ça me fait peur, je me dis qu'Alzheimer me fait coucou...

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  4. Effectivement, Fofo, tu fais fort ! J'ai bien ri en tout cas.

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